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Décryptage : honorer ses dettes, d’abord !

Aboubakr Jamaï – dont on ne connaît plus la fonction précise au sein de l’hebdomadaire casablancais – estime dans ses réactions suite à la fermeture du Journal qu’il s’agit d’une action de l’Etat contre la liberté de la presse au Maroc. M. Jamaï, s’autoproclamant l’unique défenseur de la liberté de la presse au Maroc, considère que les autorités ont tout planifié pour le faire taire. Au-delà du fait que cette accusation revêt en elle-même une sorte de paranoïa excessive puisqu’elle accorde à son auteur une importance stratégique qu’il n’a pas, il est nécessaire de mettre les points sur les « i » pour comprendre exactement ce qui se passe avant de se laisser emporter par des accusations trompeuses.  D’abord, l’affaire remonte à l’année 2002. La procédure judiciaire a été engagée par les créanciers (la CNSS, le fisc, les banques, etc.) il y a huit ans. Toute entreprise, quelle qu’en soit la nature, est tenue de payer ses créances et ses charges fiscales et sociales. Nul ne peut dire le contraire. Maintenant, si une entreprise fait de la fraude fiscale et de la fraude sociale un mode de management, elle doit en assumer les conséquences sur le plan judiciaire. Ce sont les lois dans tous les pays. Aux Etats-Unis, la fraude fiscale est considérée comme un crime. Le non payement délibéré des impôts conduit en prison même dans le cas où l’intéressé procède au payement a posteriori. Et nul ne peut y échapper car les gens sont égaux devant la loi. Or, dans le cas du Journal, il est clair que ses gérants se sont retranchés derrière le fait que leur journal se soit positionné dans une sorte d’opposition systématique à tout ce qui se passe au Maroc (contre la Monarchie, contre la marocanité du Sahara, contre la légitimité constitutionnelle, contre les partis politiques, contre le respect des fondamentaux politico-religieux du Royaume, etc.) pour refuser de payer ses impôts, ses charges sociales et ses dettes. Ce qui va à l’encontre des principes prétendument défendus par M. Jamaï à savoir le respect des lois, de l’égalité des citoyens et des principes généraux de l’Etat de droit. La seule attitude comparable à ce rejet des lois, malheureusement, est celle des membres d’Attakfir Wal Hijra (anathème et exil) qui considèrent que l’Etat est impie et refusent de se soumettre à ses lois et à ses règles procédurales. Parmi les raisons aussi qui ont poussé les gérants du Journal à refuser de payer leurs charges fiscales et sociales est le fait de croire que la notoriété médiatique leur attribue une sorte d’immunité. Or, la construction de l’Etat de droit exige que les autorités appliquent les lois à tout le monde sans aucun privilège. L’Espagne démocratique a connu, début des années 1980, des cas pareils où des artistes célèbres et aimés de l’ensemble de la population, entre autres, ont estimé qu’il leur était possible de faire de la fraude fiscale s’estimant intouchables vu l’amour populaire dont ils bénéficiaient. Le gouvernement du socialiste et grand démocrate Felipe Gonzalez avait alors frappé fort et sans pitié en appliquant à la lettre les dispositions de la loi à leur encontre. Que l’on soit journaliste, artiste, politique, ou autres, la loi devrait s’appliquer à tout le monde sur le même pied d’égalité. C’est cela, d’abord, l’Etat de droit.

Me Abdelkébir Tabih, avocat de la CNSS dans l’affaire du Journal,  commente la réaction des gérants de la société éditrice de l’hebdomadaire
«Ce qui arrive au Journal Hebdomadaire est l’aboutissement d’un processus judiciaire ordinaire engagé depuis 2002. Il s’agit d’une procédure purement commerciale de recouvrement de créances dans laquelle je représente les intérêts de la CNSS. Cet établissement public a l’obligation d’user de tous les moyens légaux pour recouvrer les droits des salariés.
L’Etat, tel que veulent le faire croire les responsables du Journal Hebdomadaire, n’est pas partie dans ce procès qui n’est nullement politique mais, plutôt, purement commercial. Si cette affaire était politique, je serais le premier à me solidariser avec le Journal, étant moi-même un défenseur des libertés publiques. Or, il s’agit uniquement de dettes dont toute entreprise est tenue de s’acquitter. La procédure de redressement est une procédure de conciliation. D’ailleurs, si les sommes dues par le Journal Hebdomadaire aux différents créanciers sont payées, maintenant, toutes les démarches judicaires seront automatiquement abandonnées. Aussi, si l’autre partie veut donner un aspect politique à cette affaire, qu’elle le fasse sur un autre terrain et non pas sur une question de dettes dont il faut s’acquitter. Personne n’est au-dessus du droit commercial ».    

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