L’examen des données et informations recueillies auprès de différentes sources sur les graves violations des droits de l’Homme au Maroc entre 1956 et 1999 et les investigations menées à ce sujet ont permis d’établir la responsabilité de différents services de sécurité dans la plupart des cas dont l’Instance Equité et Réconciliation (IER) a été saisie, indique le rapport final de l’Instance.
L’IER a pu établir que, dans de nombreux cas, il y a eu responsabilité collective, voire solidaire, entre différents services de sécurité, ajoute le rapport.
L’examen des dossiers soumis à l’IER sur les événements de 1965, 1981, 1984 et 1990, ainsi que les investigations et recherches entreprises ont abouti à la conclusion qu’il y a eu "graves violations des droits de l’Homme", qui se sont traduits essentiellement par des "atteintes au droit à la vie de nombreux citoyens, dont des enfants et personnes sans aucun rapport avec ces événements", souligne le rapport.
Selon le rapport, ces violations sont la conséquence du non-respect des engagements quant aux normes et principes internationaux des droits de l’Homme relatifs aux conditions et limites de l’usage de la force publique, ce qui a conduit à un recours disproportionné et excessif à la force ayant entraîné mort d’homme.
Les résultats des investigations et analyses des données ont permis d’établir que les autorités ont fait usage d’armes à feu à balles réelles dans plusieurs cas, évitant de recourir à des moyens permettant de disperser les manifestations sans faire de victimes.
Il ressort de différents témoignages et données consignées dans des registres, ajoute le rapport, que de nombreuses victimes sont mortes d’impacts de balles dans le crâne, le thorax ou l’abdomen. Parmi les victimes, figure un nombre important d’enfants dont certains étaient âgés de moins de 10 ans.
Les services intervenus lors de ces évènements, ajoute le rapport, ont ouvert le feu à l’intérieur de maisons, à travers fenêtres et portes, touchant des personnes dont des enfants, des vieillards et des femmes, dont certains ont été tués par balles. Ces faits ont été confirmés par témoignages devant l’IER, ainsi que par les registres de décès faisant état d’enlèvements de corps à l’intérieur de maisons.
En retirant les corps des victimes de l’intérieur de leurs propres domiciles, les services d’intervention ont privé les familles de savoir la destination où les dépouilles des leurs ont été emportées. Les lieux d’ensevelissement étaient tenus secret et les autorités ont même refusé d’inscrire les morts dans les registres de décès des services compétents.
L’IER note, dans son rapport, que les autorités se sont abstenues d’apporter aide ou assistance à des blessés, dont des enfants tués dans le tir. Elle a enregistré des pratiques qui relèvent de l’absence du respect aux morts en les entassant dans des camions, dans des conditions ne tenant aucun compte de leur dignité d’êtres humains.
L’IER a localisé de nombreux lieux d’enterrement des victimes des troubles sociaux, précisant que, bien que le rituel religieux ait été respecté dans les cimetières réglementaires, les ensevelissements ont eu lieu de nuit, pour la plupart des cas en l’absence des familles et sans les avertir.