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Côte d’Ivoire : des « Gris-gris » fatigués

Au début du conflit, le doigt sur la gâchette de leurs armes, les rebelles ivoiriens se présentaient toujours, bardés de talismans, au cou, au bras, ou encore en mains. Des rebelles ont expliqué à l’AFP la disparition de ces talismans par "la nouvelle donne": les lignes de fronts sont désormais figées, il n’y a plus de combats généralisés, donc comme les armes lourdes de guerre, les "gris-gris" sont "rangés dans les tiroirs".
Un ministre issu des FN se souvient qu’un jour, il a été bloqué par les Forces de défense et de sécurité (FDS, loyaliste) à l’entrée du Conseil des ministres du gouvernement de réconciliation nationale, à Abidjan, parce qu’il avait à la main un "gri-gri", preuve pour lui, que "l’ennemi" avait vraiment peur. Ces amulettes sont censées empêcher les balles ennemies de pénétrer dans le corps et de protéger contre les "mauvais esprits". Les chasseurs traditionnels, les "dozos", qui ont intégré la rébellion par centaines au début de la crise, sont des "spécialistes" de la fabrication de ces amulettes.
D’abord, incorporés dans des unités de combats, les dozos ont été regroupés au sein d’une "unité spéciale", baptisée "les guerriers de la lumière". "C’est effectivement nous qui confectionnons ce que vous appelez “gris-gris”, affirme un dozo. "Il est impossible de douter de ces “redoutables armes”, qui ont souvent mis en déroute les "forces ennemies", selon lui. L’amulette, dans une poche de cuir cousu, contient de la poudre, des feuilles séchées, des poils d’animaux. Des formules incantatoires sont prononcées au moment de sa fabrication.
Un autre "dozo" estime cependant que si les rebelles ne portent plus avec ostentation les talismans, c’est qu’ils ne sont plus efficaces "à 100%", parce qu’ils ont violé "des interdits". Parmi ces "interdits", il y a "sortir avec des femmes", poursuit-il.
"Quand on fait la guerre, on ne fait pas autre chose", sinon, les talismans "ne marchent plus". Propos répétés à un "Chef" de la rébellion, qui sourit: "eh oui! L’âme humaine est faible, et quand il n’y a pas la guerre, c’est vrai qu’on pense à autre chose!".
Cependant, ce "dozo" croit toujours aux vertus "magiques" de ces talismans. Selon lui, quand on viole un interdit, "on fait des sacrifices" pour implorer les mânes tutélaires, pour mettre "les compteurs à zéro".  Les croyances ont la vie dure, et "Saint-Clair", un rebelle de Bouaké (centre, fief de la rébellion), persiste: "Nous croyons toujours à ces talismans, mais on est plus discret avec, c’est tout".
 Il sort de sa poche, une petite amulette, et affirme que depuis deux ans qu’il voyage avec, il n’a pas eu un seul accident. Un de ses amis, qui a eu un grave accident d’automobile, s’en est sorti indemne grâce à son amulette, cachée dans sa poche, soutient-il. "Dans les FN, aujourd’hui, les talismans les plus "efficaces" sont noués autour de la hanche, frime un autre, estimant que "ce qui est caché, est plus efficace".
Avec les "turbulences" qui pointent à l’horizon, les rebelles vont "démontrer" que leurs "gris-gris" ne sont pas "si fatigués que ça", assure-t-il, en allusion au blocage politique qui pourrait préluder à une aggravation de la crise ivoirienne.

Serge Daniel (AFP)

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