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Gouvernance locale : Qui limoge qui ?

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Ce n’est plus du ressort du ministère de l’intérieur

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Toute détention en cours du mandat pendant une durée supérieure à six mois entraîne automatiquement le renvoi du président. Cette condamnation peut intervenir, notamment, suite à un cas de flagrant délit de corruption ou tout autre acte incriminé par la loi et sanctionné par le code pénal.

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Plusieurs médias ne parlent presque plus que d’un troisième «séisme politique» qui semblerait imminent. Des présidents de communes, voire des régions, seraient visés par une purge d’envergure. On est même allé jusqu’à avancer un chiffre de plus de 50 présidents de communes, dont au moins une vingtaine cumulant le mandat d’édiles locaux et de parlementaires des deux Chambres, qui seraient sur le point d’être limogés. Seulement, et quand bien même ces présidents de communes, ou encore de conseils provinciaux, préfectoraux ou régionaux, seraient coupables d’un quelconque écart de gestion, leur révocation n’est pas aussi automatique qu’on le laisse croire.

En effet, depuis l’adoption en février 2016 de la loi organique des communes, qui prend place de l’ancienne charte communale, et de celles des régions et des conseils provinciaux et préfectoraux, bref des collectivités territoriales, seule la justice peut révoquer un élu local ou régional. Et plus précisément le tribunal administratif, saisi par le wali, pour les Régions, ou le gouverneur pour les communes et les conseils préfectoraux et provinciaux. Quels sont donc les cas où un président d’une collectivité territoriale, que ce soit une commune une Région ou un conseil préfectoral ou provincial, peut être révoqué ? Jusqu’à l’adoption de la nouvelle loi (il s’agit d’une série de lois organiques en fait), le ministère de l’intérieur, qui est l’autorité de tutelle, se contentait d’un décret pour révoquer un président de commune sur la base des conclusions d’un rapport de l’IGAT (l’Inspection générale de l’administration territoriale). Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Le ministère de l’intérieur ne peut plus révoquer ne serait-ce qu’un simple élu d’une commune rurale perdue au fin fond du pays. La loi est claire sur ce point.

Le président et les vice-présidents sont élus pour toute la durée du mandat du conseil, soit pour six ans (article 18 de la loi organique des conseils communaux et 20 de celle relative aux conseils des régions). Bien sûr ce n’est pas un chèque en blanc que reçoivent ces responsables locaux dès leur installation. Les présidents des collectivités locales, pour ne s’en tenir qu’à ces cas, peuvent effectivement être révoqués dans plusieurs situations. Ainsi, toute détention en cours du mandat pendant une durée supérieure à six mois entraîne automatiquement le renvoi du président. Cette condamnation peut intervenir, notamment, suite à un cas de flagrant délit de corruption ou tout autre acte incriminé par la loi et sanctionné par le code pénal. Cette situation n’est envisageable, notons-le, que lorsque le concerné est poursuivi en détention préventive. C’est le cas également lorsqu’il s’agit d’une condamnation en vertu d’un jugement définitif ayant conduit à l’inéligibilité. Là, il faut bien insister sur l’expression «jugement définitif» ou, dans d’autres cas, «jugement ayant la force de la chose jugée». En effet, la révocation n’intervient qu’après avoir épuisé tous les recours, que ce soit le recours en appel ou le pourvoi en cassation. Ce qui risque de prendre des années, et l’intéressé pourrait bien terminer son mandat avant que le jugement définitif ne tombe. De même, la cessation sans motif ou le refus de remplir ses fonctions, pour une durée de deux mois, peut également valoir à un président de collectivité territoriale son poste. La révocation sanctionne une procédure initiée en ce sens par l’autorité de tutelle, le gouverneur pour les communes et le wali pour les régions. Par ailleurs, les nouvelles lois organiques relatives aux collectivités territoriales apportent deux nouveautés en la matière. Elle figurait déjà, en fait, dans l’ancienne charte communale, mais elle a été amendée en 2002. Il s’agit de la possibilité de renvoyer le président en mi-mandat par les membres du conseil. Ainsi, comme le précise l’article 70 de la loi organique relative aux communes, depuis février de l’année dernière, deux tiers des membres du conseil de la commune en exercice peuvent, à l’expiration d’un délai de trois années du mandat du conseil c’est-à-dire à compter de septembre 2018, présenter une requête demandant au président de présenter sa démission. Si le président refuse de présenter sa démission, le conseil peut lors de la même séance demander par une délibération, approuvée par les trois quarts des membres en exercice, au gouverneur de saisir le tribunal administratif compétent pour demander la révocation du président. Un dernier cas qui entraîne également la révocation du président de la commune est celui de la transhumance. Un président qui change de parti est déchu de son mandat et perd son poste.

La requête de déchéance est déposée auprès du greffe du tribunal administratif par le président du conseil ou par le parti politique au nom duquel le membre concerné s’est porté candidat. Naturellement, les finances des communes font l’objet d’audit de l’IGF ou de l’IGAT ou les deux. Cela en plus des missions des Cours des comptes régionales. Et lorsque les rapports de ces institutions relèvent des cas de dysfonctionnement sanctionnés par la loi, l’autorité de tutelle, soit le gouverneur ou le wali, dans les cas de l’IGF et de l’IGAT peut saisir la justice. Laquelle saisine peut même donner suite à un procès, voire à une condamnation et donc à la révocation des présidents concernés.

Dans le cas de la Cour régionale des comptes, lorsque des faits qui paraissent de nature à justifier une sanction pénale sont relevés, c’est le Parquet général qui est saisi et qui peut décider, s’il le juge opportun, de déclencher des poursuites judiciaires avec les mêmes conséquences.

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