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L’Europe rattrapée par ses vieux démons

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L’Union européenne devrait se lancer en fin de semaine bon gré mal gré dans un nouveau changement risqué et controversé de traité, sous la pression de l’Allemagne et de la France qui veulent en passer par là pour garantir la survie de la zone euro. Les 27 pays membres pensaient en avoir fini en décembre 2009 lorsque, après une décennie de laborieuses tractations et de référendums perdus, ils étaient enfin parvenus à faire ratifier un nouveau traité, celui de Lisbonne, censé améliorer le fonctionnement du bloc. Moins d’un an plus tard, l’ouvrage s’apprête à revenir sur le métier. La chancelière allemande Angela Merkel insiste pour obtenir un «mandat clair» en ce sens de l’ensemble des dirigeants européens, lors d’un sommet à Bruxelles jeudi et vendredi, précédé de deux rencontres ministérielles préparatoires dimanche soir et lundi à Luxembourg. Elle a conclu un accord à ce sujet très contesté avec le président français Nicolas Sarkozy, qui laisse peu de choix à leurs partenaires. Au Parlement européen, certains dénoncent un «diktat franco-allemand». Objectif: tirer les leçons de la crise de la dette qui a failli emporter au printemps la Grèce et, avec elle, l’euro. La France a fini par convaincre la chancelière Angela Merkel de la nécessité de combler les lacunes de l’Union monétaire, née en 1999, en la dotant d’un Fonds de sauvetage permanent pour les pays en difficulté. Celui-ci doté de 440 milliards d’euros mis en place dans l’urgence en mai expirera en 2013. L’Allemagne avait demandé cette limite car elle craignait sinon d’encourager les gouvernements au laxisme budgétaire.
Si Berlin s’est rangé par réalisme à sa pérennisation, il exige que cela passe par un changement de traité. A défaut, la Cour constitutionnelle allemande risque de s’y opposer car le traité de Lisbonne interdit aujourd’hui en principe qu’un pays de la zone euro soit sauvé de la faillite par ses partenaires. «Le sommet doit donner des indications sur la manière d’arriver à créer un mécanisme crédible, tenant compte des préoccupations de l’Allemagne qui refuse de le prolonger sans conditions», résume un diplomate européen de haut rang. Berlin a aussi obtenu l’accord de Paris pour inclure de facto dans le nouveau mécanisme une procédure de mise en faillite des pays surendettés. En contrepartie, Paris a réussi à adoucir le dispositif prévu pour renforcer la discipline budgétaire en zone euro, qui doit être approuvé lors du sommet de l’UE. Les sanctions tomberont plus tôt et plus vite, mais pas de manière automatique lorsque les limites seront franchies. Cette concession vaut à Paris et Berlin une pluie de critiques, y compris au sein de la coalition gouvernementale de Mme Merkel.  «Les sanctions contre les pays qui ne jouent pas le jeu ne doivent pas être retardées ni contournées», a dénoncé ce week-end le secrétaire général du Parti libéral allemand, Christian Lindner. Surtout, la perspective d’un changement de traité, nécessitant l’accord unanime des 27, donne des maux d’estomac à de nombreux pays qui craignent d’ouvrir une «boîte de Pandore». Certes, l’idée est cette fois de limiter strictement les modifications et d’éviter une ratification séparée: elles seraient intégrées par exemple au traité d’adhésion à l’UE à venir de la Croatie. Mais rien ne garantit que certains pays n’exigeront pas pour prix de leur feu vert des changements supplémentaires du traité, à l’instar de la Grande-Bretagne sous pression des eurosceptiques pour rapatrier des pouvoirs de Bruxelles à Londres. Ou que d’autres capitales, comme Dublin, en passent par un référendum toujours à haut risque. «Le sujet est politiquement extrêmement sensible, il fait très peur à certains. Il faut donc s’attendre à de fortes résistances», met en garde un diplomate d’un grand pays de l’UE.

  Yacine Le Forestier  (AFP)

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