La célébration du 50ème anniversaire de l’indépendance du Maroc est une occasion où la symbolique a son importance. Au-delà des festivités grandioses rehaussées notamment par la présence d’une brochette de chefs d’État et de gouvernement amis et illuminées de feux d’artifices et de spectacles “son et lumières“, il s’agit avant tout de mesurer à travers cette commémoration le chemin parcouru depuis le départ du colonisateur et d’y rechercher aussi les raisons de se projeter dans l’avenir et de croire dans ses potentialités. Loin de toute tentation d’autosatisfaction béate, chacun jugera cet événement à sa manière et selon sa vision des choses.
Ce qui est sûr, c’est que l’histoire des peuples n’est jamais un long fleuve tranquille, souvent jalonnée qu’elle est de heurts, de drames et de confrontations. Qui ont souffert le martyre pour recouvrer leur liberté, qui ont consenti de lourds sacrifices afin que les générations futures vivent en vraie démocratie, qui continuent encore, c’est le cas particulièrement des Palestiniens et des Irakiens, à se battre pour être des hommes libres dans un État souverain. Le Maroc, lui, est passé par des moments assez difficiles pour arracher son indépendance sous la conduite de feu Mohammed V. Des hommes et des femmes ont lutté avec sincérité et détermination pour un Maroc indépendant, prospère où tous ses enfants ont les mêmes chances, égaux en droits comme en obligations. Tout n’est pas heureux dans ce qui a été accompli depuis la fin du protectorat : le Royaume, sous le règne de feu Hassan II, a connu des luttes intestines, parfois sanglantes pour le contrôle du pouvoir, les années dites de plomb ont plongé le pays dans un climat de répression féroce sur fond de règlement de comptes, retardant ainsi sa marche vers le développement et la démocratie. En somme, nous avons dépensé plus d’énergie et passé plus de temps à se livrer la guerre qu’à essayer ensemble de construire un autre destin national. Les adversaires extérieurs de la nation, l’Algérie en tête, se sont, eux aussi, dépensés sans compter jusqu’au jour d’aujourd’hui d’ailleurs, dans l’objectif inavoué de déstabiliser le pays. Ce dernier, malgré ses moyens limités, a tenu face à l’adversité en tentant de renforcer son front interne et les fondations de l’État pendant que les profiteurs de tout acabit n’ont pas boudé leur plaisir dans une course effrénée vers toutes les formes d’enrichissement. Difficile dans un contexte pareil, aggravé par une gouvernance passée peu conséquente de ne pas commettre des ratages. D’abord sur le plan social où le déficit accumulé depuis plusieurs décennies est énorme avec des pans entiers de la population laissés au bord de la route. Un déficit que S.M le Roi Mohammed VI tente depuis son avènement en 1999, de combler par une action permanente sur le terrain. Le Maroc a fait très tôt le choix de l’ouverture et du libéralisme économique. Ici, le bilan aurait pu être plus intéressant qu’il ne l’est aujourd’hui. Une chose est sûre : le Royaume doit changer à son rythme. Plus solidaire qu’il ne l’a jamais été, il lui reste toutefois à réussir le grand chantier de la réhabilitation de la militance politique et des réformes fondamentales sans aller plus vite que la musique. Mais il ne faut pas surtout que les contingences du développement, certes importantes, détournent les gouvernants de l’essentiel qui fait la force d’un État de droit et constitue le préalable à toute démocratie solidement ancrée.