ALM : Comment avez-vous rencontré votre époux ?
Malika Mechhour : Nos chemins, mon mari et moi, se sont croisés lors d’une « ziara » (une visite) au mausolée de Sidi Abdellah Ben Hsain à Marrakech. Dès notre arrivée, au seuil du mausolée, nous nous sommes échangés quelques regards et la magie a opéré. C’est comme si on avait moi et lui eu au même moment la même idée, une inspiration, celle d’aller au Moussem de Sidi Abdellah Ben Hsain. Le soir, lui et moi, chacun de son côté, étions aussi partis assister à une lila de feu Maâlem Hmida Boussou. Et puis, à l’issue du Moussem, je suis rentrée avec mon frère à Marrakech. Quelques jours après, nous avions comme invité Mahmoud Guinea. J’étais stupéfait de voir chez nous cette personne avec qui j’avais échangé quelques regards furtifs. Mon frère avait fait sa connaissance lors de la lila précitée et l’avait invité sans que je ne le sache. Il me l’a présenté.
Et après être rentré chez lui à Essaouira, Mahmoud m’a appelée puis est revenu chez nous à deux reprises, une première où il était accompagné de sa sœur, la regrettée Lalla Jamila, et une deuxième, avec toute sa famille pour demander ma main. C’était en 1990.
Comment avez-vous accueilli sa demande en mariage ?
Avant de le rencontrer, je n’avais jamais pensé au mariage. Parce pour me marier, je me disais qu’il me fallait trouver un homme avec lequel je serais sur la même longueur d’onde, c’est-à-dire qui partage et accepte ma passion pour les gnaoua et les lilas. J’avais donc des critères bien établis et difficiles. Mais Mahmoud était finalement l’homme de mes rêves. D’ailleurs, j’ai réalisé pleins d’autres rêves grâce à lui. Je voyage partout dans le monde en sa compagnie. Grâce à son aide, je suis devenue son manager, je m’occupe aussi de la traduction lors de ses interviews. Pour moi, il est l’homme parfait, un homme qui a du cœur et qui est généreux. Je suis chanceuse de l’avoir comme mari. On a eu trois enfants, l’aîné c’est Hamza né en novembre 1992, le cadet Houssam est né en mars 1996. Et née en juillet 2003, Bouchra la benjamine.
Est-ce que tous vos enfants suivent la voie de la musique gnaouie ?
Ils apprécient tous la musique gnaouie et la pratiquent plus ou moins. Ils sont aussi brillants dans leurs études. Hamza est plus passionné par le sport et surtout le football. C’est Houssam le plus doué en musique gnaouie, il aime la scène. On avait organisé dernièrement, une cérémonie familiale, un dîner où Mahmoud a donné à son fils Houssam un guenbri. Il lui a passé en quelque sorte le flambeau. Aussi récemment, quand on était en Belgique, avec l’aide de notre producteur, on avait fait une surprise aux spectateurs en leur proposant une première partie du concert de Mahmoud, animée par Houssam tout seul.
Quels conseils donneriez-vous à Houssam, Maâlem Guinea junior?
Actuellement la carrière d’un Maâlem gnaoui ne se résume plus aux lilas et à la dimension thérapeutique de cette culture. Les pratiques gnaouies ne sont plus clandestines, elles ne se limitent plus à un rapport entre le «Mourid» (disciple) et le Maâlem. Leurs champs se sont élargis et les gnaoua sont de plus en plus sollicités à l’étranger, d’ailleurs nous avions animé dernièrement trois soirées en Italie. C’est pour cela que je dis à mon fils, «quoi qu’il soit, tu seras un jour un Maâlem, puisque tu es doué et que tu as hérité ce don de ton père». «Mais ce qu’il faut le plus, c’est que tu te concentres sur tes études et que tu deviennes une personne instruite et capable d’assumer les nouveaux défis des gnaoua».