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Ramadan aux fines herbes

Il n’y a pas de Ramadan sans Harira et il n’y a pas de Harira sans Krafess, l’incontournable céleri. Indissociable du bouquet garni de coriandre et de persil, cette plante aux nombreuses propriétés – apéritive, diurétique, dépurative, stomachique, reminéralisante, antiscorbutique, antiseptique, antirhumatismale tonique et aphrodisiaque – confère à la Harira cette âcreté subtile sans laquelle la soupe symbolique de la ruture du jeûne ne serait pas ce qu’elle est.
Les puristes vous diront que le standard de la Harira à la mode de Fès n’en contient pas. Mais les standards sont faits pour être personnalisés et l’on doit sans doute à la cuisine juive, grande consommatrice de céleri, ce perfectionnement bienvenu.
En ces temps de hausse des prix généralisée, le céleri a malheureusement suivi la tendance. Au marché de gros, il a enregistré ces derniers jours une hausse de 2 DH pour passer à 6 DH le kilo. Hassan Harrach, qui tient depuis 16 ans un étal de salades et fines herbes au marché du boulevard Bourgogne à Casablanca, n’a pas pu faire autrement que de répercuter cette hausse sur son prix au détail : chez lui, le céleri vous coûtera désormais 8 DH le kilo.
Ceci dit, rares sont ses clients qui achètent cette plante, à la fois légume et condiment, au poids. Hassan la détaille le plus souvent à la branche, dont il apprécie le poids au jugé. Faites lui confiance, vous ne serez pas grugés : non seulement ses mains ont acquis la sensibilité nécessaire mais, surtout, il fait partie de ces marchands qui font de la probité le premier élément de leur fonds de commerce.
L’une des particularités du marché du boulevard de Bourgogne est d’être fréquenté par les ménagères très aisées des quartiers résidentiels environnants. Son parking est souvent encombré de voitures très chères, ce qui est souvent le cas des marchés bon marché. Ce qui n’empêche pas les petites gens des quartiers populaires environnants de venir s’y approvisionner, la diversité de la clientèle ajoutant au charme du lieu…
Autres herbes auxquelles les ménagères reprochent de coûter plus cher depuis que Monseigneur Ramadan nous impose sa loi, la coriandre et le persil : un à deux dirhams en moyenne de hausse à la botte. Mais Hassan considère cela avec philosophie. Les prix augmentent en général les premiers jours du Ramadan parce que, explique-t-il «la demande s’accroît soudain énormément». Commentaire souriant de Hassan, qui a l’air de ne s’émouvoir de rien : «Vous savez comment sont les gens, ils se précipitent le premier jour avec la furie d’acheter comme si le marché risquait de s’assécher. Alors que grâce à Dieu, rien ne manque dans ce pays. Mais en général, passé la fièvre des premiers jours, la demande revient à la normale et les prix ont tendance à baisser…»
D’où proviennent-elles ces précieuses herbes fines ? Pour le persil et la coriandre, de la région des Mzamza, dans la Chaouïa, répond Hassan, qui précise qu’il s’agit là de la meilleure qualité disponible sur le marché et qu’il faut se méfier des productions des régions côtières. Quant au céleri, il vient des Oulad Ziane.
Chaque approvisionnement lui revient à 300 DH en moyenne, auxquels s’ajoute le prix de revient des salades et des piments, son autre spécialité.
À propos, un conseil en passant : d’après Hassan, on peut faire confiance aux cultivateurs pour l’emploi de produits phytosanitaires.
Mais que cela ne vous empêche pas de laver rigoureusement les herbes que vous achetez avant de les consommer, voire de les faire passer un dernier bain désinfectant dans de l’eau additionnée d’une goutte de Javel.
Hassan, originaire des Rhamna, a pour voisine Rahma, native des Doukkala. Rahma trouve Hassan tout à fait fréquentable, pour un Rahmani. Et puis cela fait si longtemps qu’ils sont voisins de stands; en fait, depuis la construction de ce marché. Le plus étrange, ajoute-t-elle est qu’ils étaient déjà voisins lorsqu’ils commerçaient sur le terrain vague d’à-côté, avant que la commune ne les installe ici.
Ni Hassan, ni Rahma ne se posent de questions sur le mystère qui fait que les clients s’approvisionnent chez l’un ou l’autre d’entre eux. On pourrait croire que les femmes sont naturellement attirées par Rahma et les hommes par Hassan mais cela les fait sourire. Non, ce qui est dévolu à chacun par la grâce de Dieu ne se discute pas : « à chacun son rizq», c’est là leur profession de foi de commerçants que la concurrence ne dérange pas.
D’ailleurs, à l’entrée du marché, la modeste caisse en carton sur laquelle Fatna propose quant à elle une maigre quantité de coriandre, persil et céleri relève de la même logique.
Tandis que deux cents mètres plus loin sur l’avenue, l’imposant supermarché qui a ouvert il y a deux ans sous une enseigne conquérante doit compter avec la présence de Hassan, Rahma et Fatna, vendeurs emblématiques des fines herbes du Ramadan.

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