Automobile

Un homme providentiel

© D.R

Carlos Ghosn est né à Porto-Velho au Brésil en 1954. Ses parents libanais ont veillé à l’éduquer à la française. Il passera ainsi son adolescence sur les bancs du collège Notre-Dame de Jamhour à Beyrouth (dirigé par des Pères Jésuites), avant d’aller poursuivre de hautes études à l’Ecole Polytechnique et des Mines de Paris.
Après avoir décroché son diplôme, il fera ses débuts en 1978 chez Michelin comme chef de fabrication dans les ateliers de Clermont-Ferrand. Et très vite, il entamera son ascension au sein de l’équipementier. Ainsi, dès 1981, il devient directeur d’une usine du Puy en France, puis passe, entre 1984 et 1985, à la tête de la recherche et du développement en matière de pneumatiques à destination de l’agriculture et engins de chantiers. Les quatre années suivantes, M. Ghosn occupera la fonction de chef des opérations du Groupe Michelin pour le continent Sud-américain, puis deviendra en 1989, président-directeur des opérations de Michelin en Amérique du Nord. Au cours de cette période, il sera à l’origine de la fusion entre Michelin et Uniroyal Goodrich. Un an plus tard, il devient P-DG de Michelin Amérique du Nord et mène à bien la nouvelle stratégie multi-marques initiée par le pneumaticien français.
Après 18 ans de carrière chez Michelin, M. Ghosn n’a désormais plus rien à prouver quant à ses talents de grand manager. Son secret : imposer des méthodes de gestion volontaristes, visant la réduction des coûts par la supression d’effectifs, mais dans une moindre mesure certes. C’est ce qu’il fera aussi chez Renault, où il entre en 1996. En décembre de la même année, il est nommé vice-président exécutif en charge du Management général. Un poste où il aura pour responsabilité plusieurs pôles d’activité de la recherche avancée à l’ingénierie et le développement des véhicules, en passant par les achats et l’usinage. Renault lui confie également la direction de la zone d’affaires Mercosur (Amérique latine). Mais pour ce Franco-brésilien d’origine libanaise, à la fois ferme et méthodique, la profitabilité n’implique pas forcément des pratiques de business locales, mais plutôt une vision rationnelle de la productivité. Il initiera ainsi la fermeture de l’usine de Renault à Vilvoorde en Belgique, ce qui lui vaudra le surnom de «cost killer».
Renault sort alors d’une phase de restructuration et cherche à se développer hors d’Europe. Ghosn va donc pousser à l’alliance avec Nissan, un constructeur qui a été l’un des fleurons du Japon avant d’en symboliser la crise économique. Nous sommes alors en 1999, lorsque Renault signe un accord de fusion avec Nissan, alors au bord de la faillite. L’achat de 36,8% du capital de Nissan coûteront 5 milliards d’euros à Renault. Un investissement que les analystes financiers jugent comme très risqué pour le constructeur français. Ghosn, lui, est prêt à relever le défi de redresser Nissan, qui accuse de lourdes dettes et une gamme pas assez attrayante. Devenu président de la firme japonaise, il s’installe alors à Ginza, un grand centre d’affaires de Tokyo. Là-bas, on dit que son prédécesseur Yoshikazu Hanawa lui a même laissé son bureau et ses meubles au septième étage du building, mais qu’il ne les a pas acceptés. Ghosn préfère tourner partout préférant travailler d’arrache-pieds avec ses collaborateurs envoyés par Renault. Pour lui, le défi culturel est plus grand que le défi économique. Aussi, il estime qu’à tous les échelons de l’entreprise, les employés ont des solutions aux problèmes qui se posent. Il prend la peine d’écouter tout le monde et organise des groupes de travail réunissant des salariés de différents grades et de cultures diverses. Il prend soin d’expliquer sa démarche, de fixer des objectifs précis et de motiver les employés en les impliquant davantage. C’est là, la clé de voûte du «Nissan Revival Plan», le plan de renaissance de Nissan. Ses trois grands axes : réduire les coûts d’exploitation de 1.000 milliards de yens (8,7 milliards d’euros), diviser par deux le nombre de fournisseurs, faire baisser l’endettement financier de 1.400 milliards de yens à moins de 700 milliards à la fin de l’exercice 2002. Le nouveau patron conserve sa réputation de «cost killer» à travers une petite vague de licenciement, mais reste aussi conscient que l’avenir de Nissan dépend de sa capacité à développer des modèles innovants. La citadine Micra et la familiale Primera sont alors renouvelées, tandis qu’on voit apparaître de nouveaux modèles tels que le 4×4 X-Trail.
La nouvelle gamme rencontre un franc succès notamment sur le marché américain et un an après le début du plan de redressement, Nissan annonce des résultats financiers record et une marge opérationnelle établie à 5,4 %. Mais la réussite de Nissan tient également à la politique des plates-formes communes (avec Renault), ainsi qu’à la motivation des employés.
A ces derniers, Ghosn propose en effet une sorte de prime de rendement et d’efficacité, à travers des dividendes. Auparavant inconnu au pays des samouraïs, Ghosn y est devenu alors très populaire. Il a même un manga qui porte son nom… Aujourd’hui, Nissan vend près de 3 millions de véhicules dans le monde et contribue à 70 % du bénéfice net de Renault.
Carlos, lui, est marié, père de quatre enfants et est pressentit, comme le futur remplaçant de Schweitzer à la tête du groupe Renault-Nissan. En attendant, il a déjà publié des ouvrages et continue à accumuler les distinctions, dont celle de l’«Homme de l’année pour l’industrie automobile mondiale» obtenue en janvier dernier. Il n’est donc pas étonnant que le Financial Times le présente aujourd’hui comme étant l’un des dix patrons les plus respectés du monde.

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