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Autrement : toujours plus haut ?

© D.R

Le 4 janvier, les autorités de Dubaï ont inauguré «Burj Khalifa», un gratte-ciel de 828 mètres de hauteur, la plus haute structure du monde. Voulu par la société immobilière Emaar, ce projet a demandé six années de travail. Le bâtiment de cent soixante étages, comportant appartements, bureaux et hôtel, a été principalement construit par des ouvriers immigrés d’Asie du Sud-Est, dont les conditions de travail et d’existence ont été dénoncées par de nombreuses organisation de défense des droits de l’Homme. Paradoxe ou sanction? Cette tour démesurée a été inaugurée alors que l’émirat de Dubaï est en situation de faillite. Si l’émirat n’a pas encore sombré, c’est grâce au secours que lui apporte l’émir d’Abou Dhabi. Dubaï croyait être destiné à une croissance sans limite. Or la crise financière mondiale a mis un coup d’arrêt à la frénésie de ses programmes immobiliers. Et la «Tour Khalifa», appelée initialement «Tour de Dubaï», fait étrangement penser à la «Tour de Babel»…
Quand bien même elle ne se trouve pas dans le Coran, et pas davantage dans la Sunna, l’histoire de la «Tour de Babel» est connue dans le monde musulman. Cette construction est évoquée sous le nom de «ad-Sarh», terme qui désigne une bâtisse s’élevant hautement dans le ciel. Dans le recueil de hadiths de Bukhâri, la tour n’est pas évoquée, mais la ville de Babel est néanmoins citée. Il est mentionné que Ali répugna à faire la prière dans les ruines qui en restaient. Une manière de signifier sa réprobation à l’égard d’une ville dont les habitants avaient jadis tenté de défier Dieu?
Rappelons l’histoire telle que la rapporte la Bible. Selon celle-ci, c’est le roi Nemrod, arrière-petit-fils de Noé, fondateur de Babylone, le premier empire qui a existé après le Déluge, qui a eu l’idée de construire à Babel une tour assez haute pour que son sommet atteigne le ciel. On remarquera avec intérêt que le nom de la ville n’est certainement pas innocent, puisqu’il signifie, en hébreu, «Porte de Dieu». Selon la Bible, réprouvant l’orgueil humain de Nemrod et de son peuple, Dieu décida de semer la division parmi les hommes qui, en ce temps-là, n’auraient parlé qu’une seule langue, multipliant chez eux les langues afin qu’ils ne puissent plus s’unir à nouveau dans de telles folles entreprises.
Cette histoire s’est-elle réellement produite? Elle est d’abord un récit imagé, qui veut illustrer  les dangers qu’il y a à vouloir se placer à l’égal de Dieu. Le récit est probablement né en Mésopotamie, au sixième siècle avant l’ère chrétienne, quand une partie de la population juive a été déportée à Babylone par le roi Nabuchodonosor II. Là, les Juifs ont pu être subjugués par les «ziggurats» qui s’y trouvaient, des bâtiments élevés «entre terre et ciel» depuis déjà plusieurs siècles par les habitants de la Mésopotamie en l’honneur de leurs dieux. Ils ont notamment pu découvrir la ziggurat du dieu Marduk, qui avait une base de 90 mètres de côté et, sans doute, une hauteur équivalente.
Symbole d’orgueil, de prétention à se hisser toujours plus haut, la «Tour de Babel» s’est révélée annonciatrice de l’effondrement de l’empire babylonien. Et si la «Burj Khalifa» annonçait, à son tour, l’effondrement d’un autre système délirant?

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