Chroniques

Eric Laurent ou la tentation au chantage

© D.R

Mis en examen le samedi 29 août pour «chantage» et «extorsion de fonds», accusés d’avoir tenté de soustraire au Roi du Maroc Mohammed VI de l’argent contre la promesse de ne pas publier un livre compromettant sur le Royaume, l’enregistrement (une preuve de plus) dévoilé par le Journal du Dimanche le 30 août, accablant définitivement Eric Laurent et Catherine Graciet, ces derniers n’ont rien trouvé mieux que de nier toute tentative de chantage! De qui se fout-on ? Et les enregistrements, et la lettre manuscrite, et l’argent dans les poches ? En droit, cela s’appelle tout simplement du flagrant délit (situation dans laquelle un individu est pris sur le fait en train de commettre un délit ou un crime).

Dans le détail, cela fait une sordide histoire où Eric Laurent contacte un 23 juillet le Cabinet royal, indiquant qu’il préparait un livre explosif. Une rencontre a lieu le 11 août dans un palace parisien, entre le journaliste et l’avocat Hicham Naciri. Ce dernier enregistre discrètement la conversation à l’aide de son smartphone. «Vous voulez quoi ?», demande l’avocat. «Je veux 3», répond le journaliste. «Trois quoi? Trois mille ?». «Non trois millions». «Trois millions de dirhams?». «Non, je veux trois millions d’euros», ce sont ainsi les propres paroles du grand pourfendeur des puissants.

Une deuxième rencontre est organisée, toujours avec l’avocat de Mohammed VI qui continue à enregistrer les propositions indécentes du journaliste.

La suite, on la connaît, Eric Laurent et Catherine Graciet seront interpellés par la police le 27 août avec en leur possession 80.000 euros en liquide ainsi que la fameuse lettre signée où ils s’engagent à ne plus rien écrire sur le Roi du Maroc en contrepartie du versement de 2 millions d’euros.

Après sa mise en examen, Eric Laurent a reconnu avoir cherché un accord financier. Mais l’espace d’un week-end passé à l’ombre, les deux journalistes décident de changer de stratégie et de baser leur défense sur la thèse «d’un traquenard», une «opération politique» concoctée pour faire tomber ces deux preux journalistes «dont l’enquête est de nature à révéler de lourds secrets» ( sic).

Dans la foulée, les deux complices n’arrivent pas à se mettre d’accord sur l’accusation de «constitution d’une bande criminelle», Laurent soutenant (dans une interview au Monde) que Graciet était bien d’accord sur tout le contenu de la transaction alors que la défense de cette dernière a décidé de faire porter le chapeau à l’écrivain «accusé d’avoir tout organisé…»

Passons sur le jeu de mots de Laurent «C’est une tentation, pas un chantage» mais en réalité, le seul piège dans lequel est tombé l’homme de plume est celui de la tentation.

En réalité, en termes de racket, Laurent, comme beaucoup de ses confrères, n’en est pas à son premier coup d’essai. Dans ce cas d’espèce, il s’agit d’une tentative d’extorsion de fonds doublée d’un racket intellectuel. En effet, quand Eric Laurent nous fait la faveur de s’abstenir «d’ébranler» la monarchie alors que le journaliste lui demande si «ces informations étaient de nature à faire tomber la monarchie», on reste effaré devant l’aveuglement et l’insolence de plumitifs, acoquinés avec quelques rescapés du stalinisme intellectuel français qui pensent qu’ils ont toujours la main sur le pouvoir marocain comme dans n’importe quelle république bananière. Faire tomber la monarchie, rien que ça ! Graciet aurait-elle été contaminée par quelques confrères en mal de sensations fortes à l’époque où elle officiait dans la presse marocaine ? A-t-elle pris pour argent comptant l’idéologie mortifère et autres thèses absurdes pour de véritables promesses de lendemains enchantés qui n’existent que dans la conscience aigrie de quelques esprits revanchards ? Il est permis de le penser.

Dans l’histoire des nations et des grands hommes, il arrive toujours un moment où la question n’est plus de savoir ce que l’on veut mais ce que l’on peut encore. Les temps ont changé, le Maroc n’a plus rien à cacher, les années de plomb ont été soldées au début du règne, nous autres, on n’a pas attendu Gilles Perrault pour demander des comptes mais une petite partie de l’intelligentsia française, suivie aveuglément par quelques médias en perte de vitesse n’ont pas encore compris que le temps de «regarder le Maroc du haut d’une terrasse», comme disait Giraudoux, était révolu et que dans le courage de regarder le Royaume comme une grande nation en devenir, ils retrouveraient enfin la grandeur que les Marocains leur refusent désormais.

Quant à Eric Laurent et sa consœur, ils devraient écouter attentivement Aznavour quand il chante : «Il faut savoir quitter la table, Lorsque l’amour est desservi, Sans s’accrocher, l’air pitoyable, Mais partir sans faire de bruit». A la guerre comme à la guerre.

Par Abdellatif El Azizi
 

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