Chroniques

J’aime, je partage: Tu ne boiras point pendant ramadan

© D.R

Si j’en crois mon acolyte du jour dans le taxi qui nous mène au boulot, «il faut arrêter de picoler au moins 40 jours avant d’entrer dans le recueillement du mois sacré?»

A la question : «pourquoi exactement 40 jours ?» Il ne le sait pas. Mais c’est comme ça, dit-il, fier de son savoir ancestral. Pour mon ami chauffeur de taxi, «tout ceci est une énorme supercherie doublée d’une grande hypocrisie où tout le monde est complice avec tout le monde.

On boit du vin et autres spiritueux toute l’année, dans un pays où personne n’est censée toucher à l’alcool, puis quand arrive ramadan, c’est le grand débat, le déballage des théories sur la bibine devant le seigneur. On arrête quand il faut arrêter graduellement, il faut boire, mais avec modération jusqu’à la veille du ramadan, non, c’est 40 jours, non c’est trois mois avant…

Je pense que nous sommes tous une bande de nazes qui racontons n’importe quoi puisque nous voulons faire entrer la religion dans un sujet qui est clair à la base : pas d’alcool pour un musulman dans un pays musulman, point barre. Et je ne suis ni pratiquant, ni zélote, ni prêcheur du vendredi, encore moins religieux, je veux juste, mon ami, te souligner qu’il y en a assez de cette hypocrisie à deux sous». Là, mon pote taxi driver marque un point. A y voir de plus près, c’est quoi cette mascarade ?

On autorise la vente d’alcool toute l’année partout, les bars sont ouverts et sont pleins à craquer de Marocains et de musulmans, et si tu as la malchance de tomber, tu raques pour soûlographie notoire. Pire, quand tu vas à la superette acheter tes bières, ton whisky, ton tord-boyaux, on te le vend, on ne te dit jamais si tu es musulman, marocain, «majoussi» ou moine tibétain !

On empoche l’oseille, on te met le tout dans un sac noir qui sent le pétrole de mauvaise qualité et tout le monde il est content, tout le monde il va boire comme un grand. Mais quand approche ramadan ou une quelconque fête, il faut fermer, sept jours, non trois jours avant, il faut arrêter de boire, il faut attendre que les bars rouvrent pour se payer la cuite de sa vie, c’est quoi se joyeux bordel ?

Le client qui a amorcé le sujet semble avoir de sérieux problèmes de conscience par rapport à ce qu’il a ingurgité comme litres de vin durant les onze mois qui ont défilé. Il a peur de ne pas pouvoir assurer la continence durant 30 jours. ça se voit, il a les jetons. «Il devrait y avoir une loi qui autorise aux alcooliques de boire durant ramadan. J’ai lu que l’alcoolisme était une maladie très grave et qu’il faut aider les gens qui boivent à se soigner en les laissant boire un peu». Non, le mec ne sourcille pas en disant cela.

Moi, je le comprends, je sais qu’il veut picoler avant d’aller faire ses «tarawih». Mais mon ami : boire, c’est pas bien pendant ramadan, malade ou pas, c’est la loi. Si tu t’amuses à interpréter les lois à l’aune de ta volonté de te payer  ta dose quotidienne d’alcool, tu vas aller en prison, mon ami. On va te faire ta fête, mon ami.

Et ton delirium tremens qui semble t’avoir déjà pris par le cou sera dur à vivre dans une chambrée avec des dizaines d’autres gars, mal lunés et prêts à te manger tout cru. Alors, tu vas faire ce que je vais te dire, mon ami : tu ne boiras point au moins pendant trente jours. C’est pas sorcier. Tu te fais une raison : tu deviens frère musulman, tu te payes une barbe, tu habites dans une mosquée, tu fais ce que tu veux, mais tu ne bois pas. Compris ?

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