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La chronique du mercredi

© D.R

Colère chez les associations au Maroc de parents d’élèves des écoles et lycées de l’Agence de l’enseignement français à l’étranger (AEFE). En gros caractères, de couleur rouge sur fond jaune, elles ont publié un tract qui en dit long sur leurs sentiments : «L’avenir de l’école française au Maroc est menacé. Réagissons !». De quoi s’agit-il ? L’AEFE a annoncé une hausse des frais de scolarité estimée à 40,49% d’ici à 2012. Et ce chiffre ne serait qu’un minimum, que l’AEFE aurait communiqué à titre indicatif. «Nous dénonçons cette explosion des frais de scolarité», s’insurgent les associations qui ajoutent «nous protestons vigoureusement auprès des instances gouvernementales et des établissements de l’AEFE».
 Il y a du pathétique dans cette situation. Et des motifs de réflexion. Inscrire un enfant à l’école, qu’on soit le parent ou l’institution scolaire, c’est passer contrat pour longtemps. Difficile d’accepter, dans cette matière plus qu’en toute autre, que les règles changent en cours de jeu. Que les familles trouvent la pilule amère se comprend d’autant qu’elles n’ont d’autre alternative que payer. Où instruire ses enfants lorsqu’ils ont commencé leur scolarité dans un système sans équivalences ni passerelles locales ? Et à la qualité éprouvée et inégalée.
 Les raisons de l’AEFE ne sont pas non plus difficiles à imaginer. L’heure est aux restrictions budgétaires. De plus, la France n’a plus besoin de faire pression pour conserver un réseau d’enseignement dans son ancien protectorat – comme elle a dû le faire entre la fin de l’année 1955 et le début 1956 lors des discussions des conventions qui devaient alors fixer ses liens avec le futur Maroc indépendant. Ce sont les Marocains qui sont devenus demandeurs, immensément. Alors que leur pays est souverain. La France n’a ni vocation à organiser, ni pour mission de subventionner l’éducation d’une partie des Marocains. C’est sans doute abrupt mais nécessaire à dire, et à entendre. L’enseignement français au Maroc a été une chance formidable pour des dizaines de milliers d’enfants dont, notamment à ses débuts, une grande partie issue de classes populaires et moyennes. Aucun d’entre ses élèves ne saurait, de bonne foi, nier ce que cet enseignement offre de progrès. Une grande partie de ces gens ont à leur tour veillé à faire bénéficier leurs enfants d’une expérience identique. La success story est réelle. Marocains et Français vont cependant devoir apprendre à en sortir, et il faut espérer que ce sera par le haut. La saga de l’enseignement français au Maroc est devenue celle d’une élite en butte à la question, hautement anxyogène, de sa propre reproduction. La responsabilité de cette élite ne peut pas se limiter à crier au déclin de l’enseignement français au Maroc. Elle est de permettre aux générations futures de bénéficier d’un enseignement de qualité. Celui qui consiste, comme le professait Montaigne, à  fabriquer des têtes bien faites plutôt que bien pleines.

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