Chroniques

La guerre de Calais

© D.R

Une guerre perdue d’avance, puisque la majorité des populations afghanes, les tribus pachtounes, montrent chaque jour quelles ne supportent pas l’intrusion occidentale dans leurs affaires. Or, dans le temps même où les soldats français veulent se présenter en libérateurs du peuple afghan, à plusieurs milliers de kilomètres de là, les policiers français, eux, sont mandatés pour faire la chasse aux jeunes réfugiés afghans qui errent aux environs du port de Calais, espérant trouver une occasion de passer clandestinement en Grande-Bretagne!
Beaucoup de Français ont été émus par les images télévisées de la grande opération de police menée le 22 septembre dernier, montrant les visages en pleurs de jeunes Afghans menottés. Ces images n’étaient pas sans rappeler celles du très beau film du cinéaste Philippe Lioret, «Welcome», sorti en mars dernier et consacré justement à ces jeunes Afghans qui tentent à tout prix de rejoindre l’Angleterre et peuvent y perdre la vie. On sait, malheureusement, que ce que l’on voit «à la télé» s’oublie vite, et qu’un événement a tôt fait d’en chasser un autre. Déjà le débat que cette opération de police avait commencé à ouvrir dans une partie de l’opinion, est en train de se refermer. Trop d’information tue l’information! De surcroît, chacun se sent tellement impuissant devant des situations aussi complexes! On peut être bouleversé par la détresse de ces jeunes réfugiés. Mais qui a une solution pour résoudre leur drame? Si la Grande-Bretagne ouvrait le passage à leur traversée de la Manche, ne seraient-ils pas des dizaines de milliers d’autres à se précipiter en Europe?
Les jeunes Afghans qui fuient un pays en guerre depuis trente ans, désireux de trouver des espaces de paix et de prospérité, ne sont pas entièrement comparables à tous les jeunes Maghrébins qui, de leur côté, nourrissent eux aussi le projet de partir tenter leur chance en Europe, quitte à périr noyés en effectuant clandestinement la traversée du détroit de Gibraltar sur de fragiles embarcations. Ce qui est comparable, cependant, c’est l’existence de réseaux mafieux qui exploitent les aspirations ou la détresse de ces jeunes, avec une soif de profits financiers qui se moque bien de ce qui adviendra de ceux-ci. Ce qui est commun aux deux groupes, surtout, c’est l’incapacité dont font preuve les pays de l’Union européenne à faire face de manière humaine et constructive au problème de leur migration.  Voici plus de dix ans que les autorités françaises tentent d’éradiquer la présence de plusieurs centaines de jeunes réfugiés afghans, iraniens, kurdes, somaliens ou nigérians dans les régions de Calais et de Dunkerque. Il en demeure toujours entre mille et deux mille, vivant dans des conditions de très grande misère aux alentours de ces villes. Une opération de police comme celle qui a eu lieu récemment ne constitue qu’une esbroufe politico-médiatique. La «guerre de Calais» s’avère aussi désastreuse que celle d’Afghanistan.

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