Chroniques

Label Marocanité : Les purificateurs du Maroc

© D.R

«Un seul homme de science à plus d’emprise sur le démon qu’un million de dévots». Je me suis, toute de suite, rappelé cette consigne musulmane, avec sa vérité et sa beauté subliminale, en lisant un article d’Attajdid sur le Tsunami.
L’auteur, un certain Hassan Serrat, affirme, dans une forme d’alliance avec un journal orthodoxe grec, que le cataclysme asiatique est, en quelque sorte, l’expression de la colère de Dieu sur une partie de la planète où sévit le mal : tourisme sexuel, homosexualité, trafic d’enfants. Sodome et Gomorrhe version 2005, en somme.
Mais l’essentiel de l’analyse ne réside pas dans le fait d’attribuer ce désastre à la colère divine. Ce ne sont pas les faits qui ont interpellés l’auteur, c’est l’exemple qui l’a inspiré. Par un tour de passe-passe, il ramène la tragédie à la situation marocaine et augure, dans une prédiction eschatologique, le même sort au Maroc et à son tourisme. Il conclut son propos en déniant toute efficacité à tout système d’alerte invoquant le respect des enseignements religieux, comme seul moyen, pour prévenir efficacement ces catastrophes naturelles. Monsieur Serrat et consorts ne sont pas à une dinguerie près. Dans leurs diatribes, la sexualité revient de manière obsessionnelle. Qu’il s’agisse de vouloir expurger les Mille et une nuits de sa dimension érotique. Qu’il s’agisse d’Alexandre d’Oliver Stone dont l’homosexualité du personnage historique est la dimension la plus insignifiante de l’oeuvre. Et on pourrait en citer des inepties…
Je suis tout aussi contre la pédophilie et l’esclavagisme sexuel. Je suis contre parce que c’est un crime contre l’enfance. Je suis contre parce que le tourisme sexuel est la dimension la plus abjecte des rapport Nord/Sud. Mais de là à prétendre que le Tsunami est une justice divine qui, de surcroît, confond entre victimes et coupables, ce n’est pas simplement l’oeuvre d’un esprit dérangé, c’est une farce intellectuelle et une injure à l’intelligence musulmane.
C’est dire combien quand la politique touche un domaine, elle peut le souiller. Quand l’interprétation religieuse devient démagogique et simpliste pour mieux servir des calculs politiciens, cela se fait aux dépends de l’esprit religieux. Quand le commentaire religieux contredit la raison, il ne contredit pas le Prophète ou le texte sacré. Il accouche d’erreurs et de mystifications énoncées en leurs noms. Et c’est un bien piètre service rendu aux religions en général et à l’Islam en particulier. Je dirais même que l’Islam est, aujourd’hui, fondé à se défendre contre ce type de charlatanisme tant celui-ci a un besoin de raison.
Ibn Rushd professait, il y a neuf siècles, Al Aql et non Anaql. La raison non la copie. Ou, en langage contemporain, le copie collé. Ceux qui ont appris à ânonner le Coran en se méfiant de la raison oublient un autre texte qui dit que «la science est plus méritoire que la prière». Dès lors, ils font, impunément, office de pollueurs se dissimulant sous la Djellaba blanche de purificateurs.

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