Chroniques

Lettre de Marrakech : Laurent Tarridec, un grand chef à Marrakech

© D.R

Marrakech, la ville touristique et ocre du Maroc continue d’intéresser certains étrangers célèbres qui viennent s’installer chez nous à cause de l’attrait de la ville sur eux. En fait, la ville de Marrakech a un côté charme depuis longtemps et non pas celui d’une mode passagère, puisque certaines personnes, venues en touristes, il y a plus d’un demi-siècle ont été envoûtées et ont décidé d’y rester. Aujourd’hui, des grandes personnalités dans différents domaines sont aussi attirées par Marrakech et veulent s’y installer. La plupart que je rencontre me disent : « Nous sommes attirés par le Maroc, pays d’ouverture, d’accueil et de paix, mais aussi pays de respect mutuel et de tolérance ». Aussi cette semaine, nous présentons aux lecteurs de la « Lettre de Marrakech », un grand monsieur de la cuisine française, un homme qui est venu appréhender la restauration marrakchie et pour contribuer avec son second, Jean Emmanuel Christ, à faire une bonne cuisine raffinée au restaurant « Le Pavillon », situé à Bab Doukkala et tenu par Catherine Debois-Frogé, ancienne dirigeante pendant dix ans du Château-hôtel : « Le domaine de Valaudran» à Sabris. Ce grand chef s’appelle Laurent Tarridec, un deux étoiles Michelin, qui a eu un parcours surprenant pour finir dans la cour des grands chef cuisiniers renommés. Laurent Tarridec, un homme aux cheveux bouclés et en bataille, est natif d’un petit patelin de 300 habitants : St Coulitz. Dès son jeune âge, Laurent n’aimait pas trop l’école et finira par pratiquer le métier de maçon, chose qui ne plaisait pas à sa mère. Finalement, il ira au lycée hôtelier Chaptal à Quimper, à 30 km de sa maison. A 16 ans, il est pris en main par Mme Henri Lepaute (décédée à 95 ans en 2001) qui plaçait les jeunes chez tel et tel, à titre bénévole. Elle était connue et très respectueuse et respectée (en 1954, elle était à l’origine de la création de la chaîne des « relais et châteaux »). Laurent Tarridec disait : « Elle m’a fait débuter dans un relais château tenu par une autre grande dame, Mme Lecoz (85 ans aujourd’hui) à qui je dois aussi beaucoup. Il y a eu aussi Mme Castain à Condrieux, 2 étoiles Michelin à l’époque, presque 90 ans maintenant ». Notre ami Tarridec a beaucoup travaillé puisqu’à 22 ans, il se retrouve au Vivarois à Paris chez Claude Peyrot. De cette expérience parisienne, il dit: « Il a tout compris, c’était quelqu’un d’exceptionnel, un homme rare chez qui, tout geste est important. Chez lui, j’ai découvert un autre univers. Jusque-là je faisais ce métier sans savoir trop pourquoi, chez lui j’ai découvert que c’était autre chose ». De Paris, Laurent ira à Antibes en 1981, dans le restaurant « A la bonne auberge » chez Rostang (3 étoiles de l’époque). Après peu de temps, il est envoyé aux Caraïbes pour faire l’ouverture de l’hôtel «Le Mali Hounnah » à Arguilla. Jack Lacan, psychanalyse renommé traitait Peyrot de patron d’une cuisine psychanaliste. Au retour, Laurent se retrouve successivement au « Château d’Esclinont » avec Patrick Sicard (chez G. Lenotre) et ensuite à l’Auberge des Templiers » avec Philippe Dépées, toujours en Sologue. Puis Laurent décide de retourner à l’école pour préparer un DUT de gestion hôtelière. Une fois finie cette formation, notre chef va se diriger sur la côte bleue, la côte d’Azur à St Tropez. D’ailleurs, les patrons anciens de «Lei Mouscardin » habitent actuellement à Marrakech, Hélène et Felix Giraud. Voilà, un chef à 30 ans, qui est devenu propriétaire à 40 ans et aujourd’hui son objectif est de déléguer comme à Marrakech où il a placé son second Jean Emmanuel Christ dont je donnerais un historique plus loin. En fait, Laurent Tarridec a aussi la responsabilité de la restauration du Moulin-Rouge à Paris et d’autres affaires créées et lancées dans la discrétion, c’est ce qu’on appelle « réussir calmement». Quand on demande à Laurent Tarridec s’il aime cuisiner, il répond : «C’est le marché qui décide, la carte doit reposer sur les produits locaux». Si on devait parler de tous les journaux, de toutes les revues et de toutes les publications faites sur Laurent Tarridec, il faudrait plusieurs livres. Nonobstant, citons quelques-uns des extraits que j’ai pu recueillir. La revue, « L’hôtellerie », parlait du Breton tropézien, ce restaurateur pas comme les autres : « Il s’adapte sans cesse avec l’évolution de la demande et avec les changements de la société». Bien plus, Laurent Tarridec disait de lui-même : « J’ai toujours travaillé comme si j’étais dans un petit village car je m’attache à la fidélisation pour voir revenir tous mes clients ». Laurent Tarridec à qui j’ai demandé comment il voyait aujourd’hui, le métier de la restauration, répond : « Pour faire de la qualité en cuisine, il faut savoir gérer. Cette notion de gestion est très importante, c’est une autre base du métier avec le savoir-faire c’est-à-dire bien communiquer, c’est aussi une forme de gestion, il faut être pluridisciplinaire pour bien assurer ». Et comment voyez-vous la réussite dans ce métier, cher Laurent ? «Voyez-vous Aziz, je pense que la passion et l’acharnement au travail sont indispensables si l’on veut réussir dans un certain métier. Aussi il faut remotiver les jeunes pour qu’ils viennent vers ce métier, il y a une pénurie aujourd’hui mais je reste confiant ». Voilà, nous recevons donc un grand chef à Marrakech qui sera présent par son art culinaire au « Pavillon » et à travers son second et ami. J.E Christ, un jeune chef, dont le parcours en dit long déjà à 36 ans. Ce dernier vit en permanence à Marrakech pour diriger ce restaurant en agissant sur la gestion culinaire où il mijotera des plats baignés de soleil et d’inspiration comme sur la côte d’Azur. Lorsque j’ai remontré ce jeune chef, j’ai été frappé par sa discrétion c’est tout juste qu’il fallait lui demander de parler. A côté de sa future femme Murielle Trama, fille du grand chef Michel Trama, rappelons-nous de l’article d’il y a 15 jours, J.E Christ me déclarait : « Ma venue au Maroc, surtout Marrakech ne s’est pas faite par hasard car Murielle, y a passé ses vacances depuis son enfance avec ses parents. Elle m’a conté Marrakech comme dans un livre avec des images pleines de couleurs, de senteurs subtiles des rues animées et colorées, des ryads majestueux, une palmeraie, des souks de la bonne cuisine marocaine et des habitants accueillants et hospitaliers. Il y a bien longtemps, elle m’a glissé au creux de l’oreille son rêve de vivre à Marrakech. Alors quand monsieur Tarridec m’a proposé la place de chef au restaurant « Le Pavillon », et après réflexion, j’ai accepté. J’ai quitté ma place de chef à « Villa Marie », un 4 étoiles à Marrakech. Je suis parti avec une valise de connaissances obtenues dans les établissements étoiles de France où j’ai travaillé. Après peu de temps, j’aime Marrakech et le Maroc, c’est super». En fait, le couple culinaire Tarridec-Christ doit bien marcher car en dinant ensemble au Pavillon, alors que J. E. Christ était aux fourneaux, Tarridec nous commentait les différents plats comme s’il les a faits lui-même, une même technique, une complicité entre les deux hommes, une association du savoir et de la compétence. En revenant à Laurent Tarridec, je lui ai demandé s’il connaissait notre pays. D’abord il me rappelle un bon souvenir, d’il y a dix ans où il est venu avec 20 chefs français, faire un rallye organisé par Moet-Chandon, huit jours en plein désert. Laurent a aussi procéder à une mission d’expertise aux différents Clubs Méditerranée du Maroc, mission que lui a confiée Henri de Bodinat (ancien SFP) prédécesseur de monsieur Bourguignon. Comment voyez-vous la cuisine au Maroc : «Ici, je mange toujours marocain, en plus ici on a un espace de liberté pour faire des bons plats ce qui n’est pas le cas en France où les gens sont « emmerdants ». Je suis venu à Marrakech car pour moi c’est le St Tropez marocain ». De plus, Laurent promouvoit le Maroc et avec la CCI de Toulon, il a créé un club Maghreb avec comme mission de faire recevoir les gens par le consul et créer un lien entre les deux rives. En effet, Laurent dit : « Nous les gens du Midi, du Sud on se branche plus vers ce qui correspond à nous, comme le Maroc, tout comme les Alsaciens se tournent vers ce qui est allemand. Le Maroc et Marrakech correspondent à notre philosophie de la vie ». « Quand je suis arrivé à Marrakech j’ai senti des émotions si bien que j’ai envie de « matcher» ma cuisine avec les produits locaux et mettre en valeur ces mêmes produits dans la cuisine française de qualité ». D’ailleurs, Laurent me disait encore: « D’ici un an, on espère pouvoir créer des recettes tendances tirées de la cuisine française et des produits locaux. De plus ce qui m’intéresse aussi au Maroc, c’est le pays qui se développe, qui s’ouvre qui se modernise grâce à votre jeune Roi, qui est très bien vu et bien apprécié chez nous et qui mène à mon avis votre pays vers un avenir meilleur ». Sincèrement je me suis posé dernièrement la question de savoir pourquoi ces hommes célèbres viennent s’installer à Marrakech. Parfois on sent que ce n’est pas le matériel qui attire ces gens mais une vie plus tranquille qui les intéresse, un climat sain, ce réveil avec l’Atlas enneigé mais avec un soleil dès sept heures du matin. Cela me rappelle qu’en Europe on a pas cela. De plus, si on ajoute une population gentille accueillante et surtout une relation sincère qui se crée entre l’étranger et les habitants… J’ai posé comme question à des amis étrangers que peut-être Marrakech est seulement une mode. On me répond systématiquement que non car la mode passe et si c’était le cas, les célébrités n’achèteraient pas de résidences et ne viendraient pas s’y installer. Alors soit, et oeuvrons, nous Marrakchis pour garder intact, ce trésor et le sauvegarder des grandes touches modernistes d’urbanisme. Laurent est reparti en France pour son travail mais, me dit-il je reviens sous peu dans cette ville majestueuse que j’aime maintenant. Tu verras cher Laurent ça deviendra un «besoin» de revenir chez nous où on t’accueillera comme il se doit car tu est simple et sympa ».

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