Chroniques

Mieux vaut en rire : La France, Hollande et nous…

© D.R

C’est une occasion rare, et je ne pouvais donc pas la rater : un président français est en visite chez nous, et celui-ci, contrairement à un autre, est de pure souche, même si son nom pourrait insinuer le contraire. Et puisque nous avons un président français rose dans nos murs blanchis pour l’occasion, je me dois, moi le francophone chronique et le francophile aigu, de dire tout ce que j’ai sur mon cœur tendre, mais blessé par tant d’agressivité qui s’est accumulée en moi depuis le jour où ma famille m’a inscrit dans une école faisant partie de ce qu’on appelait à l’époque : «La Mission française». J’étais à peine grand comme 3 oranges (on dit 3 pommes, mais ça, c’est en France), mais je m’en souviens comme de ma première communion que j’ai failli avoir, mais ça, c’est une autre histoire. En réalité, je me dois de rétablir une vérité historique. Ma famille n’a jamais choisi de me mettre dans les bras des Gaulois volontairement, mais c’était absolument accidentel. En fait, c’était le fruit du hasard qui, comme chacun sait, fait souvent les choses comme il l’entend. Je vous raconte : feu mon père était un homme d’une grande piété, et qui dit piété, dit forcément arabité. Les Français, il les aimait bien, notamment parce qu’il travaillait bien avec eux, mais pas au point de leur confier le beau rejeton que j’étais et que je suis toujours. Bref, quand j’ai atteint l’âge de la scolarité, il m’a confié à un de mes grands frangins pour qu’il m’inscrive à l’école. Arrivés sur place, j’avais remarqué – j’étais déjà très perspicace – qu’il y avait en fait deux écoles : une où un monde fou faisait la queue, et l’autre devant laquelle il n’y avait presque personne. Mon frangin, qui n’était pas quelqu’un de patient, a choisi, contraint mais apparemment content, celle qui nous accueillait  les portes vides et grandes ouvertes. Et c’est ainsi que je suis rentré de plain, pied – et quel pied ! – dans le monde fabuleux du français. Depuis, je me suis toujours considéré comme un grand chanceux et un grand privilégié. Autant je ne crois pas avoir perdu une once de mes identités originelles qu’on pourrait appeler, si vous voulez, mon «authenticité», autant la France et le français m’ont apporté l’essentiel de ce que j’ai en moi de conscience démocratique, d’humanisme, d’ouverture, de libéralisme, bref, de ce qu’on doit appeler, qu’on le veuille ou pas, «la modernité». Maintenant, on pourrait me dire tout ce qu’on veut, que notre langue maternelle, c’est l’arabe et que c’est à elle qu’on doit s’attacher et à elle seule, mais je suis quand même très fier de vous apprendre que c’est en France, alors que j’étais à la Fac, que j’ai appris réellement l’arabe. Et c’est grâce à cet acquis que j’arrive aujourd’hui à lire quotidiennement et assidûment les journaux, ce que ne font pas, loin de là, tous les «vrais» arabophones, et que j’arrive à défendre, entre autres, tous les principes et les valeurs de démocratie que j’ai appris ailleurs et ici.
Tout ça pour dire qu’il faut arrêter de mettre tous les torts sur nos anciens «protecteurs» et de considérer tout ce qu’ils nous ont laissé ou légué comme un vulgaire butin de guerre. Un francophone n’est pas moins marocain qu’un autre, comme un arabophone ou un «amazighophone» ne sont pas plus citoyens que d’autres. C’est le grand poète espagnol, et andalou, Juan Ramon Jiménez, qui a dit un jour: «Qui apprend une nouvelle langue acquiert une nouvelle âme». Tout est dit. Je reviens vers vous, Monsieur le Président, pour vous dire que vous êtes ici chez vous, et que vous pouvez revenir quand vous voulez et autant que vous voulez.
En attendant de pouvoir en faire autant chez vous, je souhaite à tous et à toutes les francophones un très bon week-end. Quant aux autres…

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