Chroniques

Pas vous mesdames !

© D.R

ça se passe à Salé, donc à quelques encablures de la capitale, en 2016 : le patron d’un «snack» ose afficher dans sa salle «Interdit aux femmes de s’asseoir» et, sans aucun scrupule, affirme à ceux qui s’indignent de cette pancarte que «les femmes sont porteuses de fitna» et qu’en conséquence il préfère prendre les devants et –en quelque sorte– protéger ses clients masculins… On pense au remake d’un film se déroulant au Moyen-âge et pourtant, il s’agit bel et bien d’une réalité qui fait que certains – sous prétexte de religion – ravalent la femme à un rang de «sous-homme» (avec ou sans jeu de mots).

Depuis quelques années, la situation de la femme dans notre pays se dégrade : de faux imams, des prêcheurs auto-proclamés et hélas une certaine catégorie de politiques n’ont de cesse de grignoter ses droits, de minorer son rôle et de nous tirer ainsi tous vers le bas.

Certes, le mouvement associatif, la société civile, les citoyens vigilants et le Roi veillent et font rempart, mais insidieusement l’érosion se fait, et de silences en renoncement c’est toute notre société qui adopte des attitudes rétrogrades, voire obscurantistes.

Nous aurions aimé entendre s’élever la voix de membres du gouvernement – notamment de la ministre en charge des droits de la femme et de la famille – mais la mobilisation est venue de militants associatifs, de journalistes, d’écrivains, de figures de la société civile et a pris une ampleur remarquable sur le Web… Il faut d’ailleurs saluer la réaction de l’Autorité qui, en 24 heures, a fermé ce snack.

Cet épisode tragi-comique est révélateur de bien des dérives insidieuses et porteur de bien des motifs d’inquiétude, d’autant plus que certains ne se privent pas pour dire que ce bien-pensant restaurateur (pseudo restaurateur d’ailleurs) a agi selon la morale et les prescriptions religieuses et qu’il a été victime d’un complot de «modernistes», assimlés bien sûr à des mécréants. Ce discours ô combien fallacieux est en fait une utilisation éhontée de la religion qui ferait que tout musulman épris de progrès, de justice, de parité et militant pour les droits de la femme serait excommunié, alors qu’au contraire, nos valeurs, héritées tant de notre religion que de notre culture ancestrale, nous incitent à militer contre toute discrimination.

C’est ainsi une multitude de «petits signes», au quotidien, qui doit nous inquiéter, nous réveiller et nous inciter à l’action, la réaction n’étant plus suffisante et nous plaçant toujours sur la défensive.
Une société tentée par les démons de l’obscurantisme s’en prend toujours -en premier lieu – aux femmes et à la culture, Dieu Merci nous avons des «vigies» qui savent nous alerter et faire bouger les choses telles Narjis Rehraye, Sanaa El Aji, Hind Taarji, Bouthaina Azami, Lamia Berrada, Souad Mekkaoui, Aicha Zaimi Sakhri, Majda Saber, Khouloud Kebali Sajid et quelques autres –dont trop peu d’hommes d’ailleurs– mais il est urgent de passer à une autre étape, et devant les limites de notre classe politique et l’éclatement de notre société civile, inventer une nouvelle forme de militantisme, peut-être en créant une cellule de veille, voire un parti virtuel… Il faut agir !

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