Chroniques

Point de vue : Hommes et femmes de terrain, honneur à vous !

© D.R

Curieux ce sentiment, de plus en plus acéré, qui me fait percevoir que, en tant qu’hommes -et femmes- de terrain, nous sommes bizarrement perçus par une certaine «caste» : l’élite financière, les «intellos», les politiques, les organisateurs de séminaires, de colloques et autres…/…

Ils nous côtoient certes – car ils y sont en quelque sorte contraints, soit pour avoir la «caution populaire», soit parce que nous donnons du grain à moudre à leurs études, leurs recherches, leurs colloques, soit parce que nous leur apportons une expérience qu’ils n’auront jamais – mais en vérité ils ne nous aiment pas, ils nous «tolèrent dans leur sphère», mais avec condescendance, avec une pointe de mépris qui installe toute la distance qu’ils veulent à tout prix mettre entre eux et nous.
Il faut en être conscients car cela en dit long sur la «compartimentation» de notre société et le côté factice des relations humaines qui s’y jouent.
Ainsi dans la situation tendue que traverse actuellement notre pays, nous sommes nombreux – acteurs associatifs, culturels, sociaux… présents au cœur de la population, sur le terrain, à avoir tiré la sonnette d’alarme, car nous, nos sentiments, nous les tirons de la base, et non pas de quelques cénacles où l’entre-soi est de mise.
Nous n’avons au mieux récolté que des sourires faussement intéressés ou des haussements d’épaules paternalistes…

pourtant !
Que ne nous a-t-on pas écoutés et surtout suivis ?
Que me disent par exemple les jeunes avec lesquels j’agis sur le terrain ?
Qu’ils veulent y croire, qu’ils veulent espérer en un avenir, que pour cela il faut que l’exclusion et la pauvreté reculent, que la justice sociale règne, que les richesses soient mieux réparties, que chacun(e) de nous puisse se soigner, que notre système éducatif éduque consciencieusement… bref ils réclament le droit à l’espoir et le droit aux avancées pour tous et non pas réservés à quelques-uns. Ils ne supportent plus justement le mépris que leur oppose notre administration et nombre de nos politiques, élus, décideurs… dans leur quête de futur, ne croyez surtout pas qu’ils oublient les parents, ils savent qu’ils leur doivent tout et rêvent de pouvoir à leur tour les faire bénéficier d’une vie meilleure. Les manques nous les avons identifiés depuis longtemps et c’est pourquoi les moments de doute, de découragement, les craintes, les questions… nous les connaissons chaque jour. Il ne se passe pas un moment où les peurs pour l’avenir que ressent notre population ne nous transpercent. Tous nos maux en tant qu’ hommes -et femmes- de terrain nous ne cessons de les dire, de les écrire, de les faire entendre dans tous les colloques, forums, séminaires dans lesquels nous sommes invités. Mieux, nous avons également des remèdes, des solutions, des actions, des propositions à faire, et nous les faisons, hélas qu’en advient-il une fois le colloque terminé ? Quelques lignes dans un rapport, qui restera lettre morte…

Alors ?!
Alors devrions-nous céder à la tentation de baisser les bras ?
Certes non, car ce que nous entreprenons nous dépasse, ce que nous faisons est «plus grand que nous» : au mépris du pauvre répond la haine du riche, à celui qui s’insurge contre une peine de prison de 20 ans répond celui qui estime que si «atteinte à la sûreté de l’Etat» il y a, alors se justifie la peine. A celui qui boycotte réplique celui qui voit là une manipulation…et nous – hommes et femmes de terrain- nous sommes «au milieu», à essayer de retisser du lien, à essayer de créer des passerelles, à «jouer les médiateurs» et faire en sorte que notre tissu social ne se déchire pas de façon irréparable. Les moments que nous vivons sont peuplés de doute, d’inquiétude, de colère… mais aussi d’espoir, de volonté, de foi… et c’est la confiance qu’a placée en nous la population qui fait que nous sommes encore là, sur le terrain, à agir !
Cela est sûrement le bien -et le lien- le plus précieux !

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