Chroniques

Un vendredi par moi

© D.R

Coup de cœur. Pour Mogador. La petite Essaouira a été pendant trois jours La Mecque des Gnaouas. Une déferlante humaine rarement connu par un festival. Une véritable «nouba» qui a opposé à la «kawma» d’Abdessalam Yassine la «nayda» de Telquel et de tous ceux qui, s’ils ont la foi en Dieu, n’en ont pas moins le culte des rythmes, justement pour ce qu’ils ont de divin.
Des milliers de jeunes en même temps, au même endroit, pour la même joie, en nombre si fort que fort probablement jamais les amis du Cheikh, dans leur œuvre de contrition, ne pourraient égaler. Mais si jamais, par inadvertance, ils y réussissaient, il est certain qu’ils auraient pour eux toute la presse du Monde. Ce que les Gnaouas d’Essaouira ne pourraient espérer. L’odeur du sang doit enivrer mieux que la transe gnaouie, et c’est en cela que nous, journalistes avons ce côté charognard,  encore que les vrais chacals et authentiques vautours ont au moins sur cette terre une mission écologique.

La «kawma» et la «nayda», quelle différence ? Essentiellement que les troupes de la première, le moment venu, sont prêtes à mourir et à tuer. Les autres à les regarder faire. C’est pour cela que, le moment venu, il arrive que les armées sortent pour faire barrage au nom de cette majorité pas si silencieuse lorsqu’il s’agit de faire la fête.

Coup de gueule. Eugène Aubin (1863-1931) estime que Mogador  «n’est qu’une fantaisie européenne sur un thème marocain». S’il avait pu prévoir qu’Essaouira sort du lot des médinas,  précisément parce que l’architecte français, Cornut, auquel Sidi Mohammed Ben Abdellah avait confié la construction de la ville, avait imprimé à son plan marocain la rationalité des cités européennes, il se serait abstenu d’un tel jugement. N’empêche, son livre contenant ces appréciations, «Le Maroc d’aujourd’hui», réédité par Eddif sous le titre «Le Maroc dans la tourmente» est un ouvrage à visiter. J’y reviendrai.

Mogador encore. Comment devrions-nous écrire Essaouira en arabe, avec un «sade» ou un «sine». Argutie ? Pas si sûr. Avec un «sade», elle signifie la petite image, le petit tableau. Avec un «sine», la petite muraille qui en fait une petite forteresse. Entre les deux, mon cœur que répugnent les clôtures penche sans appel pour les toiles de tous les peintres que la petite image a inspirés. Et tant pis pour le laborieux travail que Mina Mghari a fourni pour défendre l’Essaouira-muraille.
Mina Mghari, il nous en faut plusieurs pour le Royaume. Elle est l’auteur d’une volumineuse étude historique et archéologique sur Mogador. Pour tout savoir ou presque sur la ville, ce sont quelques six cent soixante-quatorze pages d’érudition. Edition Dar Bouregreg.

Amuse-gueule. Une Française, à laquelle je parlais de l’image que la France renvoie actuellement d’elle-même, s’insurge contre les «déclinologues qui ne voient que la moitié vide du verre, le train sur cent qui n’arrive pas à l’heure, la chaise sur mille qui est tordue… » J’en souris, j’en ris même car c’est bien la première fois qu’un Français me tient le même langage que je lui aurais tenu s’il m’avait fait une observation similaire sur le Maroc.

Une raison supplémentaire d’adorer le foot. C’est le seul rapport de force où un pays comme le Maroc peut battre les USA sans risquer les porte-avions ou l’embargo, l’arbitre prendre une résolution sans se voir opposer un veto, le pot de terre tenir tête au pot de fer et, devant le bonsaï, le chêne faire le roseau.

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