Chroniques

Un vendredi par moi

© D.R

Nicolas Beau et Catherine Graciet, dans un ouvrage de préscience intitulé «Quand le Maroc sera islamiste», écrivent : «La bourgeoisie casablancaise se prélasse sur les terrasses fleuries du quartier résidentiel d’Anfa. Le gotha parisien se presse au Festival du cinéma de Marrakech …». On sent que ça fait plus que les emmer…. Tant mieux ! J’y reviendrai la semaine prochaine.
 
De Bab Doukala à Bab Aghmat, il y a dix neuf portes pour accéder ou sortir de Marrakech. Le Festival international du film a doté la ville de sa vingtième. Tout en couleurs. De plus en plus passage obligé, la cité magique en est à sa sixième édition. Un succès qui ne se dément plus. Rubans de soie et paillettes d’or, mais aussi ceux qui en sont encore au stade de la galère cinématographique sous les mêmes sunlights. Les badauds qui ne se lassent pas de se laisser éblouir, le Palais des congrès qui enchante autant que Jamaâ El Fna. Une union pour faire rêver, le temps d’une projection, l’instant d’un conte.

L’Almoravide Youssef Ibn Tachfine. C’est lui qui a posé les bases de la ville ocre en 1062. Dès ce jour son destin était celé. Une merveilleuse ville faite pour émerveiller. Les Almohades n’en auront cure. Sous leur règne elle deviendra rapidement l’antre du rigorisme religieux. Plusieurs fois capitale mais aussi plusieurs fois oubliée, c’est un phénix de l’histoire du Maroc, toujours renaissant de ses cendres. Dans les années quatre-vingt-dix du vingtième siècle, on avait fini par se dire, sous les contrecoups de la guerre du Golfe et de l’agression de l’hôtel Atlas Asni, que c’en était fini de Marrakech. C’était compter sans sa magie, prendre pour argent comptant la nonchalance de ses hommes. Plus de sept, il faut croire.

On peut ne pas encaisser l’humour chwingum des Marrakchis. Mais on ne peut pas se payer aisément la ville. Ni, actuellement, facilement, un lot de terrain. Il aurait fallu se lever tôt, être foncièrement spéculateur, ce qui n’est pas péjoratif, et financièrement autant avisé que cossu, ce qui ne gâcherait rien.

A moins d’avoir un intercesseur parmi les saints patrons de la ville. Pour ceux qui croient qu’il vaut mieux s’adresser au bon Dieu qu’à ses saints, ce qui est plus conforme à la religion musulmane, n’ont qu’à ne pas lire Henri de Castries qui signe son ouvrage comme colonel conseiller historique du gouvernement chérifien, et raconte l’histoire des seb’âtou rijals en soixante-quinze pages. Cela ne plaira pas beaucoup aux Marrakchis, mais avant les sept patrons de leur ville, il y avait les sept saints de Regraga. Leurs origines remonteraient au temps du Prophète et porteraient en conséquence le titre de compagnons de Sidna Mohammed. Issus d’une même famille, la légende raconte qu’ils se seraient rendus à la Mecque, auraient rencontré et adressé la parole en berbère à l’envoyé de Dieu qui leur aurait répondu dans leur langue.

Les sept saints de Marrakech, bien plus récents, devraient leur prééminence à Moulay Ismaïl.  Selon Henri de Castries, ils n’ont aucun lien et sont venus de pays parfois éloignés. Leurs arrivées respectives sont séparées «puisque les dates de leur mort, les seuls que l’on puisse donner avec précision, s’échelonnent entre 1148 [calendrier chrétien] et 1528, date de la mort de Sidi Adellah el-Ghezouani.» Ils doivent leur gloire, et la vénération des gens, à la rencontre de la politique et de la religion. Si l’une ne s’était pas immiscée dans l’autre, l’Islam qui récuse l’intermédiation entre l’être et son créateur, serait aujourd’hui bien plus sain.

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