Chroniques

Un vendredi par moi


L’affaire du réseau Belliraj vient remettre sur le tapis le vieux débat sur l’islamisme et les nuances entre ses différents courants et sensibilités. De même pour les véritables lignes de démarcation entre sa variante dite modérée et sa version extrémiste. Le moins que l’on puisse dire est que l’islamisme tel qu’il se déploie sous nos yeux n’est pas mono-doctrinal et les divisions en son sein transcendent de loin les grandes tendances qui ont commencé à marquer l’Islam immédiatement après le décès du Prophète. Rassurez-vous, je ne vais pas rentrer dans les méandres de cette flore ni de la faune qui la peuple. Je n’en ai ni l’envie car je risque de ne pas en sortir, ni, plus important, la compétence. Il y a toutefois entre tous ces mouvements et tendances un grand dénominateur commun qui mérite qu’on s’y arrête : leur volonté partagée de voir s’ériger un Etat islamique qui appliquerait la chariâ dans toute sa rigueur supposée ou qu’ils lui prêtent. A partir de là toutes les frontières s’estompent pour se réduire à un détail du moment que pour le profane que je suis il n’y a pas de grande différence à vivre sous un régime islamiste tel que vu par le PJD, par Al Adl wa Al Ihssane ou par toute autre fraction de la mouvance.

C’est réducteur ? A l’excès. Mais l’intention n’est pas de mettre dans un même panier tous les militants islamistes ni de leur attribuer les mêmes travers. Il y a certainement à la base une dose de bonne foi -la vraie, l’unique diront les intransigeants-dans l’appartenance à l’islamisme. Elle va de l’identitaire au social à l’économique. Cette quête de soi mêlée à la revendication sociale et économique peut s’exprimer de mille et une autres façons politiques, syndicales et culturelles. Le hic avec l’islamisme, c’est qu’il partage avec son ennemi de toujours, le marxisme, la prétention de détenir exclusivement la solution à nos problèmes de développement et à nos maux de société. Sans vouloir s’en rendre compte, les islamistes rééditent un trait de caractère commun à toutes les pensées totalitaires. Convaincus qu’ils veulent notre bien et d’œuvrer pour lui, ils se croient dès lors tout permis, essentiellement de nous sacrifier sur l’autel de la communauté. Ils oublient  seulement un peu vite, ou ne le savent pas, que le socialisme scientifique (sic) est mort d’avoir voulu faire le bonheur des gens malgré eux.

Si l’on dépouille tous les discours islamistes de leur érudition, de leurs subtiles différences, que restera-t-il ?  Tout ce qui va au-delà du minimum nécessaire à la vie en collectivité : le règne sur la terre des percepts d’Allah tels qu’ils les conçoivent eux et pas quelqu’un d’autre, leurs valeurs, morale et éthique. C’est ce que veulent en définitive les commanditaires des attentats du 16 mai 2003 en s’attaquant à la Casa d’Espagne, c’est ce que cherchent Abdessallam Yassine et ses disciples, c’est ce que prônent le PJD et ses militants, c’est derrière ces objectifs que courent toutes les autres fractions. Ce que les uns cherchent à réaliser par des coups de boutoirs terroristes destinés à fragiliser l’Etat, d’autres tentent de l’obtenir par des campagnes d’intimidation de la société au nom de la morale au point que dans certaines municipalités des pharmaciens ont été pris à partie pour avoir installé des distributeurs de préservatifs dans le cadre de la lutte contre le Sida. L’une dans l’autre, l’ensemble des actions de la confluence islamiste concourt à la maturation des conditions objectives pour l’émergence de la société de leur rêve. Dès lors, n’est-il pas légitime de croire que nous sommes face aux affluents qui mènent vers un même fleuve ?

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