Chroniques

Un vendredi par moi

Ma voix ne sera pas de trop pour souligner le succès du festival de Mawazine. Tant pis si je répète ce qui a été dit sur les colonnes mêmes de ce journal : l’apothéose ! Qui plus est à Marrakech victime quelques semaines plutôt d’un lâche attentat. Malgré sa forte symbolique, ce fut une cerise sur le concert de concerts. Autour de trois millions de spectateurs qui ont vibré aux rythmes des musiques du monde à Rabat. C’est bien plus que ce que les manifestations du 20 février ont pu réunir en trois mois. Aziz Daki, le directeur artistique du festival, n’a pas toujours été heureux dans ses déclarations, notamment face à un jeune févriétiste sur Al Jazeera, mais a été bien inspiré lorsqu’il a déclaré que les organisateurs arrêteront le grand rendez-vous printanier de la musique le jour où il n’y aura plus personne pour applaudir les artistes du festival. Le succès de Mawazine c’est la victoire sans appel de la liberté de l’esprit et l’esprit pluraliste sur le monolithisme et la pensée unique. Le Maroc c’est bien le 20 février. Mais c’est aussi tous les autres, le plus grand nombre. Le clan des hostiles au festival, une mixture douteuse de sclérosés idéologiques, d’islamistes et de revanchards, s’inscriront dans la normalité le jour où ils comprendront cette donne fondamentale.
Le flirt contre nature d’un nombre important de jeunes du Mouvement du 20 février avec les islamistes, particulièrement Al Adl wal Ihssane, me renvoie sans cesse au film les Gremlins. Tout commence par une étrange et douce peluche, Gizmo, qui, sous les effets de multiples manipulations et accidents, va donner naissance à une multitude d’autres créatures, cette fois-ci monstrueuses. Le drame a été possible parce qu’il y a eu un défilé de manquements aux règles qui auraient préservé à Gizmo sa pureté. Sans préavis, la ville théâtre des Gremlins va basculer dans les ténèbres du chaos. Pour la morale de l’histoire, c’est finalement le sympathique Gizmo qui anéantira le dernier survivant des Gremlins alors qu’il tentait de se démultiplier. Il l’a détruit en ouvrant la fenêtre à la lumière du jour. Mais toutes les fins ne sont pas toujours des happy-end.
Pour des queues de cerise la tentation est forte chez le Mouvement du 20 février, sous l’impulsion des nahjistes et des adlistes, d’appeler au boycott du référendum sur la nouvelle Constitution. Parce qu’ils sont contre la Commission Mennouni, parce qu’ils veulent une constituante, parce qu’ils souhaitent la dissolution du Parlement, parce qu’ils appellent de leurs voeux la chute du gouvernement en place, parce qu’ils veulent que les diplômés chômeurs travaillent dans la fonction publique auparavant… et peut-être aussi parce qu’ils désirent pour qu’on leur apporte le petit déjeuner au lit. Mais ils peuvent aussi, pour toutes ces raisons et pour bien d’autres, appeler à voter non. Non seulement l’acte témoignerait de la citoyenneté dont ils se revendiquent, mais permettrait à chacun de se compter. Le boycott c’est trop vague. Au fait il équivaut à une lâcheté. Au mieux une fuite en avant.

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