Culture

A la une : Production télévisuelle, jeu pour quel enjeu ?

© D.R

Abdelkhalek Fahid se demande, la mort dans l’âme, pourquoi son projet n’a pas été retenu par 2M, alors que Saïd Naciri a réussi à passer deux Ramadans de suite à la même chaîne ? Son projet de sitcom « Rabeh» serait-il moins « bien » que celui d’« Al Awni », jugé néanmoins « médiocre » par les téléspectateurs ? Si la qualité des « produits » diffusés à la télévision n’est généralement pas à la hauteur des attentes, est-ce vraiment parce que dans notre pays il n’y a pas de personnes capables d’écrire de bons scénarios, des scénographes pour monter de bons décors, des réalisateurs pour diriger les comédiens comme il faut, et assurer de belles mises en scène ? Ce n’est pas vrai, il suffit de voir, par exemple, du côté du cinéma pour se rendre compte que le Maroc a pu produire des films qui ont suscité, sinon l’admiration, du moins le respect à l’étranger, pour ne pas rester dans la sphère nationale.
Plusieurs films produits ces dernières années ont réussi à glaner de nombreux prix en Europe, Asie, ou même aux Etats-Unis. Les domaines de création où notre pays a réussi sont légion; pourquoi la télévision, pourtant dotée de grands moyens (subventions, publicité, etc), continue alors de nous décevoir ? Un producteur à la télévision se dit « alarmé » par le règne du copinage, du clientélisme et du favoritisme dans sa boîte. « Il suffit d’avoir un numéro de patente, un téléphone portable, pour s’improviser producteur auprès de notre télévision », se révolte-t-il.
Le népotisme et autres traitements de faveur font le reste. « Cela ne m’étonne plus de voir certains producteurs avoir pignon sur rue à Dar Brihi. A chaque occasion, ce sont les mêmes qui décrochent des marchés juteux », s’indigne-t-il. N’est-ce pas parce que ce sont toujours les mêmes « favoris » qui « concoctent » des émissions que le « scénario » des médiocrités se reproduit infiniment, au Ramadan comme en temps normal ?
Mais passons, plusieurs se posent maintenant la question : « A quoi servirait un producteur, si le résultat est souvent nul ? ».  Contacté par « ALM » , un observateur se demande sur quel critère le statut de « producteur » est attribué à une personne qui n’a pas les moyens de produire ses propres œuvres pour les proposer ensuite à la télévision. Husseïn Chaâbi, un professionnel de la communication, préfère parler  ici de « producteur exécutif ». Hassan Nafali, président de la Coalition marocaine des arts et de la culture, ne mâche pas ses mots : il évoque le mot « pseudo-producteur ». Et pas vraiment à tort. A  la TVM ou 2M, pour ne citer que ces deux chaînes de télévision, rarement, fait constater un autre producteur, on aura proposé des émissions P. A. D (Prêt-A- Diffuser). La deal, vous n’êtes peut-être pas sans le savoir : un auteur a un scénario, il le soumet à l’approbation de la commission de lecture de telle ou telle télévision ; si ce scénario a l’accord de cette commission, un producteur s’impose. Et c’est à partir de là que les problèmes commencent.
Au lieu d’un appel d’offres clair et net, des producteurs privés (de moyens ?) font jouer leurs relations, que sais-je ?,  auprès de la Division de production, du côté de Dar Brihi ou d’Aïn Sbaâ, pour décrocher le marché. Et ce n’est pas tout… Au lieu de faire appel à ses propres moyens, comme le stipule son statut de « producteur», ce dernier utilise les propres moyens de la télévision (caméras, plateaux, station de montage, pro-tools : son, logistique, sans oublier les moyens humains : directeur de photo, éclairagiste, cameraman, preneur de son, perchman, accessoiriste, cableman, etc. C’est ce qu’un observateur a voulu qualifier de « production par intérim». Or, utiliser sans aucune contrepartie une caméra de télévision publique, dont le montant de location s’élèverait à 5.000 dirhams la journée, ou encore les moyens de transport de la même télévision pendant toute la période du tournage, cela n’est pas normal. Dans un autre « cas », -à mettre cette fois sur le passif de nos deux chaînes-, une œuvre artistique (spectacle, par exemple) devient la propriété de la télévision en contrepartie simplement de la diffusion de quelques spots de promotion.Cette « pratique », qu’on enveloppe sous le label clinquant de « coproduction », n’est pas pour servir la production artistique dans notre pays.
Voilà une certaine « idée » que notre PAM (Paysage audiovisuel marocain) se fait de la production. En l’absence encore et toujours d’un concours transparent pour distinguer les méritants et les intrus, la porte reste ouverte à toutes sortes de surenchères. Le téléspectateur est la première victime de cette pratique.

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