Culture

Haj Youness : «Derb Sultan a perdu son identité»

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ALM : Que représente pour vous Derb Sultan ?
Haj Youness : Derb Sultan est un livre ouvert . Ce quartier était incontestablement une référence de modernité et de culture. Il m’est difficile de résumer l’histoire de ce quartier préféré de Feu SM Mohammed V. Derb Sultan est le groupement de plusieurs quartiers populaires qui ont été réputés par leur authenticité et modernisme. On cite dans ce sens, quartier El Houbouss, l’un des plus propres quartiers de Casablanca, ainsi que le boulevard Victor Hugo qui abritait le premier institut américain de la métropole.

Parlez-nous un peu de votre enfance dans ce quartier ?
Il faut dire que j’ai parcouru Derb Sultan en entier. Je suis né à Derb Lihoudi puis j’ai grandi à Derb Telba et Chorfa, Derb Grégoine (grigouine) et Derb El Fida. Je garde de très bons souvenirs de cette période. Les coups de canons annonçant l’arrivée du Ramadan sonnent toujours dans mon oreille. Le climat était convivial. Les gens étaient purs et innocents. Le respect et la serviabilité étaient notre devise. Ce fut une belle époque. De plus Derb Sultan marque mes débuts artistiques. La première fois que j’ai joué au luth était à l’âge de 16 ans à l’annexe du Conservatoire municipale qui se trouvait dans ce quartier. Cela a été sous la supervision du grand musicien Ahmed Soulaymane Chaouki.

Rendez-vous visite régulièrement à ce quartier ?
Il m’est arrivé, récemment, de visiter notre demeure au quartier Grégoine ( grigouine ) . J’ai été choqué face au changement qu’a connu ce lieu. Avant il y avait une entente chaleureuse et cordiale . Le quartier était sous forme d’une petite ruche à laquelle tout le voisinage prenait part. Aujourd’hui les choses diffèrent. Tout a changé, la rue a perdu son âme.

Qu’est-ce qui caractérisait Derb Sultan des autres quartiers de Casablanca ?
Derb Sultan était une source de références intellectuelles inépuisable. Ce quartier a donné naissance à de grands hommes qui ont conduit la marche du pays. Citons, à titre d’exemple, El Hamdaoui Taghi, l’un des signataires du Manifeste de l’indépendance, le grand journaliste Said Saddiki, le grand photographe Mohamed Moujahid, le poéte El Faqih El Ôthmani, et autres. De même, ce quartier se distinguait par la présence de grandes écoles et institutions scolaires construites sous le protectorat et qui constituent un riche héritage culturel et éducatif.

Quels sont les lieux qui vous ont marqué à Derb Sultan ?
J’étais épris par les salles de cinéma de Derb Sultan, en l’occurrence le cinéma Royal qui a connu le passage de Farid Al Atrach, Houda Soultane et Youssef Wahbi. Pas loin de ce lieu, se trouvait un café que fréquentait Feu Ibrahim El Alami. Derb Sultan était un carrefour où se réunissaient tous les intellectuels.

Aujourd’hui, qu’est-ce qui manque à ce quartier ?
Derb Sultan est devenu comme une zone insalubre. Le quartier a perdu son identité. Cela est décevant, car Derb Sultan a été négligé. On ne lui a pas prêté l’importance qu’il méritait.

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