Culture

«Je dédie mon livreaux enfants illégitimes»

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ALM : Pour votre deuxième roman, vous avez choisi le titre : «Un honorable enfant de putain». Cherchez-vous à provoquer le lecteur ?
Abderrahmane Nazih : On peut être enfant de putain et on peut améliorer son image de marque et essayer de paraître honorable pour berner les gens. J’ai tenu à ne pas mâcher mes mots et à dire les choses crûment. Je sais que cela peut heurter certaines gens, mais j’ai tenu à dépasser ce genre de tabous. Peut-être que cela ouvrira la voie pour d’autres auteurs pour dire un peu plus haut ce que certains pensent plus bas de certains sujets tabous comme la prostitution. Mais il ne faut pas réduire le livre à cet aspect, l’essentiel pour moi étant de montrer comment des enfants illégitimes peuvent s’élever dans la hiérarchie sociale et avoir l’apparence de gens honorables, intégrer et construire une façade irréprochable.

Considérez-vous votre livre comme étant immoral ?
On n’est pas immoral quand on parle d’immoralité. Il doit y avoir une morale quand on parle d’immoralité. Personnellement, je ne crois pas être immoral en parlant d’immoralité. Il faudrait plutôt dire ces choses et ne pas les cacher, pourquoi cacher des pratiques que tout le monde connaît et que la majorité font alors que c’est tout à fait flagrant. Dans mon livre, je retrace la vie de cet enfant illégitime mais en le faisant passer par beaucoup d’étapes qui mettent en évidence des pratiques immorales et ignobles qui ont toujours cours dans notre société. J’estime qu’une société comme la nôtre, qui est à plusieurs vitesses doit, être mise face de ses responsabilités afin qu’elle puisse décoller.

Le recours au sujet de la prostitution, avec ce que cela implique en termes de voyeurisme, n’est toutefois pas nouveau chez nos auteurs. Ce choix n’obéit-il pas plutôt à des considérations commerciales ?
C’est un sujet qui m’a interpellé depuis déjà des années. Loin de moi l’idée d’avoir écrit dans un but commercial. On sait d’ailleurs qu’au Maroc, l’écriture ne fait pas vivre son bonhomme. On ne peut pas vivre de sa plume.

Dans votre livre, vous utilisez le «Je». Votre héros a-t-il une existence réelle ou est-il un pur produit de la fiction ?
J’ai employé le «je» par commodité narrative. Cela dit, je suis issu d’un village où il y avait plusieurs maisons closes comme partout ailleurs. J’ai vu comment cela se passait, je me suis renseigné et j’ai écrit mon livre. Mais j’ai évoqué d’autres façades de la société marocaine comme la corruption, la misère des marginaux… En ce qui concerne le héros de mon livre, il s’agit simplement d’un enfant issu de la prostitution comme tant d’autres  qui existent dans notre société.
Quand j’étais dans l’enseignement, où j’ai passé 30 ans, j’ai constaté qu’il y avait de nombreux élèves dont le père était inconnu et, sur leurs extraits de naissance, le nom du père n’existait pas. On trouvait par exemple Lahcen Ould Aïcha, mais il n’y avait pas de nom de famille.

La chute de votre livre est peu convaincante, pour ne pas dire expéditive. Etiez-vous à court d’inspiration ?
A un certain moment, j’ai été bloqué dans mon récit, ce qui fait que la chute a été un peu brutale. A la fin, j’ai flanqué le sida au narrateur, il est donc condamné et j’ai voulu montrer que même un enfant de putain pouvait avoir des sentiments humains et tenir à la vie comme tout le monde.

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