Culture

Khalid El Bouazzaoui : «Le passage par le café “Bousbir” marque le début de ma carrière»

© D.R


ALM : Vous êtes né à El Gara, mais vous avez vécu à Derb Sultan. Quel est votre lien avec ce quartier ?
Khalid El Bouazzaoui : J’ai passé mon enfance à El Gara dans la région d’El Chaouia. Tout au long de cette période, mon père m’initiais à l’apprentissage d’El Aïta. La passion pour cet art m’a poussé a exploré de nouveaux horizons, d’où mon arrivée à Derb Sultan. Avant d’y atterrir, j’entendais beaucoup parler du café «Bousbir» (prospère) de Derb Sultan. En matière de l’Aïta, ce café était le lieu de rencontre des différents chioukh d’El Mersaoui. Il était en quelque sorte une agora où les professionnels de cet art se réunissaient. Ils achetaient du matériel, faisaient des répétitions et négociaient leurs contrats d’animation des cérémonies et fêtes. Derb Sultan était ma destination de rêve, ma source d’apprentissage et par la suite mon point de départ dans le monde de l’art.

Souvenez-vous du premier jour de votre visite à Derb Sultan ?
C’était vers la fin de 1979. Je devais passer quelques jours chez mon oncle maternel. Dès mon arrivée, j’ai aussitôt couru vers le café «Bousbir». Une fois sur place, j’ai ressenti une impression extraordinaire. À la vue des chioukh qui jouaient dans un petit magasin, mon corps s’est mis à trembler et mon cœur battait. J’étais aux anges. Malgré cette euphorie, je me suis fait chasser à plusieurs reprises par ces Maâlem vêtus, élégamment, de djellabas blanches et de tarbouch. Je n’ai pas résisté à leur exclusion. Après quelques heures d’admiration à ces messieurs, j’ai pris mon courage à deux mains. Je les ai informés que je suis le fils du cheikh El Bouazzaoui et je désire qu’ils m’inculquent leur savoir-faire. J’ai pris un violon puis j’ai commencé à jouer les «Ayout». Je n’oublierais jamais l’expression d’admiration qui s’est tracée sur leurs visages. Tous les gens qui se trouvaient dans le café se sont rassemblés autour de moi pour écouter mon chant. Ils m’ont nommé l’enfant prodigue d’El Aïta et ont commencé à me solliciter pour jouer avec eux. J’ai passé trois années inoubliables dans ce quartier.

Pourquoi avez-vous quitté Derb Sultan ?
Je ne voulais pas quitter ce quartier. Mais les choses ont pris une nouvelle tournure. J’ai troqué mes études contre El Aïta, chose que mon père n’admettait pas. De plus, j’ai commencé à jouer dans des cabarets, ce qui a déplu encore à mon père. Il faut dire que j’ai quitté Derb Sultan à la hollywoodienne. Je m’apprêtais à monter sur scène dans un cabaret du centre-ville, au moment où mes frères ont débarqué dans les coulisses et m’ont en quelque sorte kidnappé. J’ai ressenti beaucoup de peine, mais je ne regrette rien. Trois années étaient suffisantes pour moi afin de gagner une certaine notoriété. Malgré mon jeune âge, j’ai réussi à gagner la confiance des séniors d’El Aïta et même à leur faire apprendre quelques techniques. Le passage par le café «Bousbir» de Derb Sultan marquait la réalisation de mon rêve d’enfance et le début de ma carrière.

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