Culture

«La tbourida est un vecteur de solidarité»

© D.R


ALM : Quand avez- vous commencé à monter à cheval, et qu’est-ce que la tbourida ?
Bourhim Moha : J’ai commencé à monter à cheval depuis l’âge de 14 ans, je suis d’ailleurs né en 1937. C’est, précisément, en 1951 à Béni Ayat dans la province d’Azilal.
Pour ce qui est de la tbourida, celle-ci était très convoitée à l’époque et on allait d’un moussem à l’autre. On désertait nos maisons pendant des mois car les moussems se succédaient. Nous commencions par celui de Sidi Ali Ben Brahim, pour lui succéder celui celui de Moulay Driss, celui d’Afourer, celui de Beni Mellal, et j’en passe .
La cavalerie se composait de 15 à 25 cavaliers. Nous achetions nos montures à partir de 10.000 dirhams à l’époque, selon sa qualité bien sûr, en plus de la selle dont le prix variait entre 750 et 1500 dirhams. J’aimais et j’aime encore la tbourida car c’est un legs laissé par nos parents. Quand on organise la fantasia, notre but n’est pas de gagner de l’argent, nous  en dépensons pour le bien d’autrui : on achète des chevaux des selle «charoujas », et nos apparats aussi. Il y a des moussems où on trouve 30 à 40 équipes et chaque groupe se compose de 15 à 30 cavaliers. Mon feu père avait lui aussi un cheval que mon grand-père lui a légué à son tour. Quand un moussem arrive, il faut que j’y participe à tout prix.

Quelles sont les attributions d’un mokadem de la tbourida ?
Je suis en quelque sorte leur chef. C’est moi qui m’occupe de mon équipe qui se compose d’ailleurs de 30 cavaliers. Ces derniers jours, à l’occasion du concours régional de la fantasia, par exemple, les repas pour tout le monde sont préparés chez moi, et toute l’équipe y est invitée. Je ne peux me passer de cette habitude. Je suis leur « Allam », par exemple, avant le jour de la tbourida, je suis allé chercher les chevaux à Tagzight, à El Ksiba, à Beni Ayat, à Foum El Ansar…et à la fin de la manifestation, je transporte les chevaux dans mon camion pour les rendre d’où je les ai embarqués. Pour ce qui est de nos trophées et récompenses, les commissions relevants de la wilaya de Tadla-Azilal nous présentent soient des tapis, à la fin de tout moussem, soit des certificats, des sommes d’argent, des épées…pour nous encourager. A Beni Ayat, j’ai été toujours classé le meilleur et j’en remercie Dieu chaque jour.

Quels sont les objectifs de la tbourida ?
La tbourida, la fantasia qu’on appelle aussi «jeu de la poudre», est un moyen qui nous permet de développer une sorte de solidarité entre nous, de nous réunir grâce aux moussems. Avant, nous organisions ce genre de rencontres après les récoltes. C’était l’apothéose de l’année. De nos jours, on se réunit pour ressusciter nos traditions, notre patrimoine. On passe des moments agréables entre amis, on parle de nos soucis. Ce sont des habitudes qui sont devenues une seconde nature. N’oubliez pas que la tbourida est un art qui n’est pas donné à tout le monde, c’est une sorte de philosophie qui est génératrice  de rencontres basées sur l’entente cordiale et la compréhension mutuelle entre les cavaliers et leurs familles.

Est-ce que la tbourida est associée à un quelconque rituel ?
Chaque équipe doit chercher un homme qui s’occupe de remplir nos fusils «mkouhlas» par le baroude. Le cavalier ne descend pas de son cheval. Le commis à cette tâche doit faire la même chose pour tous les cavaliers et il  nous aide même à la maison. C’est un travail dur. Chaque équipe a un numéro. Et quand on prononce le numéro de l’équipe concernée dans un haut-parleur, les cavaliers se mettent en ligne et la parade commence. Le mokadem de chaque équipe doit veiller à ce que tous les cavaliers sont bien alignés. Et quand il se rend compte qu’un cheval devient réticent ou récalcitrant, il demande à son propriétaire de changer de place ou de se mettre soit à droite, soit à gauche pour éviter de semer le désordre parmi les autres chevaux. La meilleure scène c’est celle où tous les fusils tirent en même temps et s’il y a un seul cavalier qui devance les autres ou qui tire après eux, tout le monde se met en colère car à ce moment, la parade est un fiasco. Imaginez le nombre de familles qui assistent à la tbourida, c’est honteux devant les gens. Le «Allam» guide les cavaliers de son équipe, les conseille et leur demande de tirer au même moment. Il y a aussi  des jeunes parmi nous. Malheureusement , parfois, il y a des incidents qui arrivent, des décès, ce sont des cavaliers qui tombent de leurs chevaux, on peut se fracturer une main ou une jambe…

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