Culture

L’Amérique et les arabes, le fossé

Le colloque a commencé d’une façon virulente. Les personnes présentes dans la salle ont immédiatement compris qu’il ne s’agit pas d’une rencontre convenue où l’on va effleurer les questions sans aborder les sujets qui fâchent. Loin s’en faut. Les échanges d’accusations ont marqué le premier jour des débats. Ils ont été violents. Martin Indyk, spécialiste de la politique étrangère américaine, et qui a déjà occupé des postes de responsabilité dans l’administration de son pays, a imputé la tension des rapports entre Américains et Arabes au «terrorisme» de ces derniers.
A ses yeux, l’éradication du terrorisme reste un préalable pour modifier en substance les rapports des Etats-unis avec les pays arabes. Il a abondamment commenté les événements du 11 septembre. Cette intervention a excité la verve des invités arabes. Nombre d’entre eux ont rendu la politique étrangère américaine, favorable à Israël, responsable de la mauvaise image des Américains dans le monde arabe. Ces propos ont parfois surpris par leur teneur excessive -surtout si l’on tient compte du fait qu’ils sont prononcés par des intellectuels censés faire dominer l’analyse sur le réquisitoire. C’est pourtant souvent le sentiment d’indignation qui a prédominé sur l’intellect.
A cet égard, la communication d’un professeur de philosophie à l’université de Damas, où il a fustigé de façon démesurée la politique américaine, a poussé Martin Indyk à quitter la salle. Le discours de Imad Faouzi Chaïbi était trop unilatéral, trop exclusif dans son point de vue, trop fermé sur soi pour ne pas permettre de se rendre compte du fossé qui sépare les uns des autres. Chacun est campé sur ses positions.
C’est l’impression qui s’est imposée après le premier jour de débat. Il est revenu à Martin Indyk de détendre l’atmosphère pendant le deuxième jour. Il a modéré ses propos en reconnaissant que chaque partie a une part de responsabilité et qu’il est temps de la reconnaître. Il a été relayé par Edmond Gharib, enseignant à l’American University de Washington.
Dans sa brillante intervention, ce dernier a appelé à une meilleure communication en direction de la société américaine qui ignore tout de la réalité du monde arabe. Ce qui laisse la voie libre à ceux qui travaillent à ternir cette image ou à la déformer. Pour preuve, un sondage a montré que 3% seulement des Américains savent que les Palestiniens vivent sous l’occupation. Il a également affirmé que le 11 septembre a fourni une belle occasion aux amis d’Israël. Sous prétexte de lutter contre le terrorisme, le gouvernement israélien a eu les mains libres pour étouffer la résistance. Au bout du compte, ce colloque, qui a duré trois jours et rassemblé une vingtaine d’intellectuels, a montré qu’un travail long et laborieux reste à faire pour mieux se comprendre. Un travail fondé sur des études scientifiques, loin des accusations et du sentiment d’indignation excessif. Il est rendu nécessaire par la conjoncture actuelle.
Certains intervenants ont beau s’accuser mutuellement, mais ils ont été assis côte à côte. Où pourra-t-on voir Atallah Mahajarani, l’ancien ministre de la Culture de l’Iran, assis sur la même table que Martin indyk ? L’image porte en soi l’espoir d’une meilleure entente. Mohammed Benaïssa, l’initiateur de ces rencontres, nous a confié que plusieurs invités américains ont déclaré forfait après les attentats du 11 septembre. Condoleeza Rice était au nombre des attendus. Les actes de ce colloque seront publiés selon Mohammed Benaïssa. Ils vont constituer incontestablement les premiers jalons d’un dialogue en vue d’une meilleure connaissance des deux sociétés. Ils seront aussi empreints de l’abîme qui les sépare.

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