Culture

Le recyclart au Maroc, entre phénomène tendance et militantisme écologique

© D.R

Fouiller dans les poubelles, se balader dans les marchés aux puces et les souks à la recherche de vieux objets, marcher en pleine mer ou à la campagne les yeux rivés sur terre guettant le moindre matériau récupérable, c’est ce que font de plus en plus quelques artistes au Maroc. Motif ? Donner une nouvelle vie à des objets anciens, les transformer en œuvres d’art. Cela s’appelle du recyclart ou encore du récup-design. De luxueux meubles, de belles petites tables magnifiquement colorées, une lampe ou encore des rideaux faits à base de carton, ces objets bien propres, exposés dans le luxe d’un atelier de création en plein centre de Casablanca, contrastent avec l’histoire de leur matières premières, exclusivement des matériaux récupérés ici et là. «Tout est recyclable» a déclaré à ALM Khadija Kabbaj, plasticienne et designer fondatrice de l’atelier création KHK qui vient d’ouvrir à Casablanca et qui propose entre autres des ateliers spécial recyclArt. Selon elle, ces ateliers sont motivés aussi bien par des démarches esthétiques, artistiques et ludiques que par une démarche citoyenne et écologique. «L’écologie, c’est devenue tendance, de toute façon on ne va pas y échapper. Il faut plus de sensibilisation. Et à travers l’art, les gens peuvent prendre conscience de l’environnement et du recyclable», a-t-elle souligné. Et d’ajouter  : «Il y a un travail à faire auprès des enfants et auprès des écoles. C’est un travail qui doit se faire au niveau de la base». Il faut dire qu’au Maroc, la société commence à peine à prendre conscience des sujets liés à l’environnement et au recyclable, malgré le fait que le Maroc soit une mine d’or en matériaux recyclables, et disant- le, en déchets non traités. Ainsi, les artistes s’y mettent chacun selon ses moyens, ses goûts et sa sensibilité. Quelles sont leurs motivations, leurs tendances et aussi leur mode de vie? Existe-il un public pour ces objets d’art?
«L’important, c’est de réfléchir à une 2ème ou 3ème vie d’un objet qui allait se détériorer dans la nature et détériorer notre environnent», a expliqué à ALM Lucile Dahoui, une artiste autodidacte. «J’ai des moyens limités. Et tout ce qui est matériau d’art est cher au Maroc. Ainsi, c’est mon envie de bricoler associée à mon refus d’entrer dans la société de consommation qui m’ont amenée à faire du recylart». Et le souci écologique est également présent chez cette artiste militante qui habite au bord de la mer et qui ne cesse de collecter toutes sortes de matériaux rejetés par cette dernière, et ce jusqu’à encombrer son atelier et sa maison. «Le Maroc est pays encore plus beau quand il est propre», partage-t-elle soucieuse qu’une attitude plus consciente par rapport à l’environnement soit généralisée partout dans le Maroc. «Prendre conscience comment jeter et comment ramasser ce qui existe par terre, réfléchir à notre façon de consommer», c’est ce qu’essaie aussi de transmettre Lucile Dahoui, également animatrice de l’atelier recyclArt de l’atelier KHK. Pour l’artiste-plasticienne Mounat Cherrat, le recyclart est avant tout un mode de vie. C’est aussi une réaction à une société de consommation. Cette activité consiste pour elle à se balader dans «des lieux pas forcément chics et à se laisser aller à l’émotion par rapport à des objets anciens et poussiéreux, mais qui ont du vécu». «Au Maroc, il y a plein de souks à Casablanca, Marrakech, Rabat… et en se baladant dans ces derniers, ce sont les objets qui viennent à vous et pas vous qui allez vers eux». En 2000, elle avait monté une exposition intitulée «Bobo» avec une amie à elle et à l’issue de laquelle toutes leurs œuvres, s’étaient vendues, affichées au prix de revient. Également artiste-peintre, actuellement, Mounat Cherrat n’expose plus ses œuvres d’art issues du recyclage et préfère les garder chez elle. Elle estime que malgré le succès relatif de ces premières expositions, une partie du public reste tout de même peu demandeuse d’objets d’art recyclés. Par ailleurs, les techniques et les démarches diffèrent d’un artiste à l’autre. Ce qui distingue chaque artiste est plus le matériau de prédilection qu’il récupère ainsi que sa façon de travailler. Pour la jeune artiste Soukaina Hachem, ce sont plus les emballages qui l’attirent ainsi que des matériaux industriels récupérables notamment les tuyaux de climatisation par exemple. Lauréate d’un diplôme d’architecture intérieur, Soukaina Hachem s’est mise au recyclart depuis trois ans à l’issue d’un projet d’étude où elle devait concevoir comment serait la maison idéal dans 20ans. «Sensibilisée par un documentaire sur l’avenir du monde dans 20 ans ( réchauffement climatique, la crise financière). Après plusieurs recherches, j’en ai conclu que l’appartement idéal pour moi sera basé sur du recyclage et c’est ainsi que j’ai commencé mon activité», a confié cette jeune créatrice qui espère monter sa première exposition.

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