Culture

Les deux rémouleurs

Elle est étonnante l’histoire du caricaturiste Larbi Sebbane avec l’aïd El Kbir. Chaque année, il revient inlassablement à la charge à l’approche de cette fête. Sa verve ne s’endiable jamais autant qu’avec le mouton et toutes les tracasseries qu’il introduit dans les familles marocaines. Le rapport des Marocains à l’aïd est représenté sous forme d’un combat. Le mouton est loin d’être une victime docile : c’est le bourreau des économies de la majorité des familles marocaines. Un affrontement terrible oppose, dans les caricatures de Sebbane, l’homme à la bête.
À l’instar de cette image où les deux protagonistes s’activent à aiguiser leurs couteaux. L’on ne saura jamais qui saignera le plus l’autre. Une autre caricature montre un homme, armé d’une corde, qui suit les empreintes laissées par les pattes d’un mouton. Il a les yeux rivés sur le sol et semble à la poursuite d’une affaire de laquelle dépendra sa vie ou sa mort. Dans telle autre, l’étalage d’un boucher propose des parties du mouton, non dépecées, avec cette inscription : «aïd au détail».
La cherté du mouton, et le fait que l’aspect religieux ait été complètement relégué au second-plan par des considérations financières, est ce qui préoccupe le plus le caricaturiste. Il est fier que la caricature dise mieux et vite ce que les mots peinent à exprimer.
Larbi Sebbane déplore toutefois que cet art ne se soit pas développé dans les journaux marocains comparativement avec ce qui se fait ailleurs. Il explique cela par le fait que la caricature «se veut généralement dérangeante, combative, provocatrice puisqu’elle se fait juge et interprète de l’actualité. Elle touche souvent à la situation politique, ce qui embarrasse les journaux». Larbi Sebbane est cofondateur du premier journal satirique au Maroc : «Akhbar Assouk». Né en 1948 à Kénitra, il est venu très tôt à la caricature. Dès 1968, ses dessins ornaient les pages du quotidien «Al Alam». Nombre de ses caricatures ont déjà fait l’objet de publications dans des livres. Il possède un trait qui fait aisément reconnaître ses dessins.
Certains lui reprochent de privilégier les sujets misérabilistes, Larbi Sebbane s’en défend : «je m’intéresse aux faits de société. La réalité est ma seule préoccupation, et je ne suis pour si elle porte plus à grincer des dents qu’à l’euphorie», répond-t-il. Il est curieux de noter que le mot «caricature» vient du latin «caricare», qui signifie «charger». Il s’agit évidemment de charger les principaux traits du visage, mais dans l’art de Sebbane, c’est des charges d’un mouton cornu qu’il est question.

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