Entretien avec Moulay Abdelaziz Tahiri, membre fondateur du groupe Nass El Ghiwane et ex-membre de Jil Jilala
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Les jeunes chanteurs doivent être intelligents dans leurs choix. Ils doivent être créatifs et novateurs. Ils doivent s’adapter et s’aligner aux styles musicaux existants et sollicités par la jeunesse actuelle.
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ALM : On parle de plus en plus d’une crainte de disparition partielle ou momentanée du malhoune. Comment voyez-vous l’avenir de cet art?
Moulay Abdelaziz Tahiri : Je ne suis pas inquiet. Je suis plutôt optimiste quant à l’avenir du malhoune. La période présente est à mon sens fulgurante, car elle connaît l’organisation d’une multiplicité de festivals annuels dédiés à l’art du malhoune. Outre ces manifestations, on retrouve une série de recherches et de thèses mettant l’accent sur les vétérans du malhoune.
D’ailleurs, il existe des encyclopédies réalisées dans ce cadre dont notamment celles de Mohamed El Fassi et Abbass El Jirari. Celui-ci a pu collecter plus de 6.000 «qssaïd» (poèmes) de l’art du malhoune appartenant à de grands poètes marocains.
Les orchestres traditionnels sont devenus de plus en plus rares, qu’en pensez-vous ?
Il est vrai que ces orchestres traditionnels de malhoune étaient auparavant nombreux. Ils sont devenus aujourd’hui de plus en plus rares, cela n’empêche pas que les cantatrices peuvent chanter avec d’autres orchestres.
Que pensez-vous de ces jeunes chanteurs qui «rechantent» le malhoune à leur propre manière? Et que recommanderiez-vous aux jeunes chanteurs en général?
Le malhoune aura ainsi la possibilité de se développer et de rayonner. Ces jeunes ayant recours au malhoune sont censés y contribuer. Je trouve que c’est une bonne initiative de la part de ces jeunes qui retournent à leurs sources et essayent de développer cet art à leur manière et avec leur propre style. L’expérience de Jil Jilala et Nass El Ghiwane dans les années 70 était une réussite. Grâce aux célèbres «Chem3a», «Naker Lhassan»… ils ont pu réussir à séduire une grande catégorie de jeunes de cette époque.
Cependant, les jeunes chanteurs doivent être intelligents dans leurs choix. Ils doivent être créatifs et novateurs. Ils doivent s’adapter et s’aligner aux styles musicaux existants et sollicités par la jeunesse actuelle. Je peux citer le cas de Saad Lemjarred. Celui-ci a réussi à choisir le style adapté à la nouvelle vague.
Est-ce que les associations joueraient un quelconque rôle pour les amateurs du malhoune ?
Les associations jouent un rôle important afin de promouvoir et préserver le malhoune. Aujourd’hui, on remarque que ces associations sont devenues des amicales. Auparavant, les associations ne rassemblaient que les «Sheikh cheyakh». Ceux-ci y étaient une référence. Je peux dire que ces associations qui se trouvent actuellement sur la scène doivent maintenir et préserver cette méthode traditionnelle. Parallèlement, il existe plusieurs poètes et écrivains talentueux. Je peux citer à titre d’exemple Haj Ahmed Sahoum, Abran Tawfiq, Bachir Khedar, Mohamed Nmila, Ahmed El Banouadi et d’autres.
Que faut-il faire pour préserver ce patrimoine ?
Le malhoune représente l’histoire d’une civilisation. Je ne pense pas que nos jeunes vont abandonner un jour ce patrimoine car il représente la mémoire d’un peuple. C’est notre responsabilité de veiller à préserver cet art ancestral. Je pense également que nos jeunes vont se tourner vers l’art du malhoune.