Culture

Nadia : le Melhoun chevillé au coeur

© D.R

Les chanteuses du Melhoun sont très rares au Maroc. Le seul nom qui revient régulièrement est celui de Majda El Yahyaoui qui a su se frayer une place de choix dans l’univers du chant traditionnel du Melhoun. Cependant, cette chanteuse est loin d’être la seule femme au Maroc qui maîtrise cet art et ce style nécessitant une pratique musicale bien approfondie et très pointue. Il existe une jeune fille qui vient de rejoindre le nombre très réduit de femmes chanteuses du Melhoun.
Elle est aussi une virtuose du Melhoun et du Gharanati, un style très fréquent dans la région orientale ainsi qu’en Algérie. Elle est timide certes, jeune, mais elle est surtout dotée d’une voix très mélodieuse. Son nom est Nadia tout court comme elle aime que son entourage la surnomme « Je préfère mon prénom puisque je pense qu’il est rare au Maroc », indique-t-elle sans plus d’explication. Son actualité est prédominée par l’enregistrement des morceaux de son répertoire en compagnie de son orchestre Ziriab dans l’album « la Kahena ».
Cet album réalisé par l’illustre Dj de la World Music Dj I Sabbah et qui est par la même occasion le neveu d’Enrico Macias regroupe un certain nombre de voies féminines du Maroc. Des groupes qui font très rarement parler d’eux malgré le fait que leur potentiel musical et créatif soit d’une qualité louable. Qui au Maroc connaît Cheba Zehouania, Hadarat ou B’nat Marrakech ? Une catégorie sans aucun doute très restreinte compte tenu du simple fait qu’aucun producteur ne s’est intéressé à leur travail et à leur production. Par là même, elles ne sont pas médiatisées et ne font guère parler d’elles, même si elles sont détentrices d’une culture musicale inégalable de l’avis même des spécialistes et de Dj I Sabbah lui même. L’originalité de ce CD réside dans le fait que toutes les chanteuses qui ont été rassemblées toutes ensembles par ce DJ ne sont pas très médiatisées. Elles ne sont pas très connues pour ne pas dire pas du tout. Cette expérience leur a permis de découvrir pour la première fois un studio d’enregistrement et les a fait sortir de l’ombre. Nadia parle de cette rencontre avec Cheb I Salah comme une vraie aubaine pour toutes ses voies.
«Les Hadarat, ou encore B’net Marrakech, ne sont pas célèbres étant donné qu’elles ne sont pas invitées dans des festivals, et très peu de gens les connaissent, moi-même je viens tout juste de les découvrir». Tout comme  les autres femmes qui font partie dans cet album ficelé par Dj I Sabbah et qui sortira aux Etats-Unis à la mi-mai. Nadia fit elle-même parti de celles qui ne sont pas très médiatisées. Cette jeune chanteuse est native d’Oujda dans une famille où la pratique de la musique arabo-andalouse est chose courante. « J’ai été très influencée par mon milieu familial même si mes parents ne sont pas musiciens mais ils sont de vrais fanatiques de l’art du Melhoun » Et d’ajouter :
«dans la région orientale, on est tous plus ou moins très attachés aux racines du patrimoine musical arabo-andalou ». A huit ans, Nadia intègre le conservatoire de musique de sa ville natale, puis d’année en année, elle gravira les échelles musicales. De l’apprentissage des techniques du chant à celles du violon, Nadia en fera son credo. Elle poursuivra son éducation musicale avec de grands maîtres du classicisme arabo-andalou dont les plus connus sont Mohamed Chaaban, et Nasrddine Chaaban les deux fils du grand maître Cheikh Salah. Après être passée par toutes les classes du conservatoire, elle ira en France où elle poursuivra ses études à l’Académie des arts et de la musique à Paris.
En 1986, elle rejoindra l’association Adaloussia où elle devient une des principales solistes. C’est ainsi, que Nadia construira petit à petit sa carrière doucement sans vouloir trop se mettre au devant de la scène. Elle aime ce qu’elle fait, mais elle semble ne pas vouloir trop se compromettre. « Cette musique, c’est plutôt une passion pour moi, mais je ne veux pas pour l’instant en faire ma carrière, car je ne me sens pas encore professionnelle ». Et d’ajouter : « j’en ferais ma carrière le jour où le Maroc nous donnera nos pleins droits en tant qu’artiste, et musiciens, oui, là je pourrais m’engager pleinement dans cette entreprise musicale ». Pour l’instants Nadia a déjà enregistré deux CD en Algérie et prépare le troisième. «J’ai préféré travailler en Algérie où je pouvais trouver les meilleurs musiciens et tous les instruments traditionnels qu’on peut avoir dans un orchestre ». Une exigence de Nadia qui semble vouloir privilégier une manière purement classique avec tout ce qu’elle comporte comme rigeur. « Ma technique artistique privilégie une interprétation rigoureusement classique de la nouba selon l’esthétique de l’école d’Alger : «un style léger, hautement fleuri qui porte au rêve», explique Nadia.
«Aoutar Al Andalous » et « Noubat Zidane» sont ces deux premiers CD enregistrés et distribués en Algérie. Un pays où Nadia se rend également pour des spectacles. Mais la première fois où Nadia chantera une nouba complète, qui est caractéristique du Melhoun, «c’était en 1997 à la demande du maître Châaban à Séville, j’étais accompagnée d’un orchestre de 20 musiciennes », se rappelle Nadia. En 2000, Nadia fondera son propre orchestre « Ziryab » composé d’une dizaine de musiciens professionnels. Elle se produit dans plusieurs concerts en Europe, et dans quelques pays arabes en Egypte, Tunisie et rarement au Maroc. Pour son public au Maroc, Nadia réserve bientôt une surprise. « Je prépare un travail avec l’orchestre philharmonique du Maroc ». Mais Nadia n’en dira pas plus. Introvertie, Nadia n’aime pas trop parler de ses projets. Une façon peut-être de prendre son temps. Elle n’est pas pressée.

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