Culture

Narjis Nejjar : un autre regard

© D.R

On la présente souvent en tant que cinéaste citoyenne. Elle se définit elle-même comme quelqu’un qui aime son pays. Elle se sent violentée par ce qui se passe actuellement. Elle essaye dans ce sens de dégager une réflexion sur «qui nous sommes et qui nous voulons être».
Existentialiste, la cinéaste Narjis Nejjar l’est bel et bien. Ses positions tranchées et sa fermeté l’emportent sur tout le reste. A deux exceptions près : son talent et son patriotisme. Méconnue il y a quelques années, Narjis Nejjar est entrée dans le monde du cinéma par la grande porte. C’était l’année dernière quand son premier long-métrage «Les Yeux Secs», a été sélectionné pour la Quinzaine des réalisateurs, comptant pour le Festival de Cannes. Une consécration dont elle garde plus d’un souvenir. Le plus marquant restera le moment où la responsable du festival l’a présentée en tant que représentante, dans toutes les couleurs, du Maroc à travers ce film.
« Je suis loin d’être une férue des strass et paillettes, je n’ai pas pu contenir le sentiment de patriotisme et de fierté qui m’a submergée à ce moment. Un moment unique ». Une consécration bien méritée et qui est intervenue 21 ans après que « Poupées de Roseaux » de Jilali Ferhati ait été retenu dans la sélection officielle de Cannes.
Une consécration qui ne lui a pas fait perdre de vue ses priorités et le rôle que doit jouer le cinéaste dans sa société. Une société en mouvance, mais en perpétuel tiraillement dans laquelle le cinéaste a un rôle pondérant, dit-elle. «Le cinéaste fait office de porte-voix, non d’une position pré établie ou d’une partie déterminée, mais plutôt du partage. Plus qu’une représentation, le cinéma est une invitation à la discussion, à la communication», déclare-t-elle. Sa quête d’établir un dialogue avec le public se double d’une ferme volonté de changement.
«Un changement qui semble systématiquement confronté à une fin de non-recevoir. Nous avons toujours du mal à se regarder en face. Entre ce que ne refusons de reconnaître sur ce que nous sommes vraiment et ce que nous disons être, il y a toujours une forme de télescopage. Je pense qu’il faudra commencer par assimiler ces deux identités», affirme-t-elle. Elle qui dit se battre contre elle-même, contre cette hypocrisie qui constitue un trait de caractère chez-nous.
« Je suis le produit de cette société », précise celle que l’on considère, à tord, comme une Marocaine de France alors qu’elle n’est allée à ce pays que pour ses études supérieures. Preuve de sa «marocanité» : sa dernière sortie véhémente contre le Mégarama. « J’ai subi un véritable chantage d’exclusivité.
Je devais choisir entre le Mégarama et le Dawliz, alors que j’avais envie de parler à tout le monde. Et je sais que pas tout le monde peut se permettre de regarder un film à 45 DH. Quand j’ai fait part de mon choix aux responsables du complexe, tout ce que je peux vous dire, c’est que la réponse a été offensante pour le peuple marocain », explique-t-elle, sans vouloir en dire davantage.
Des positions, mais aussi du travail.Narjis Nejjar travaille actuellement sur un projet de film. Un nouveau longs-métrage dont on ne connaît actuellement que le titre : “Ahrar” (Libres). Après avoir reçu une fin de non-recevoir lors de la 1ère commission du fonds d’aide relevant du CCM, et tout comme « Les Yeux Secs », le scénario de ce film, qui a déjà remporté plusieurs prix, est actuellement entre les mains de la 2ème commission.
«Mes films semblent toujours relever d’un tabou qu’on ne veut pas encore briser. On a toujours du mal à dissocier la provocation, à laquelle je ne m’identifie pas, à la volonté de faire en sorte que les choses s’améliorent, que l’on puisse vivre mieux ce que nous sommes en nous posant les bonnes questions». A cela s’ajoutent d’autres projets d’émissions pour la télévision. Partant de son expérience au sein du jury de la deuxième chaîne dans le cadre de l’opération «15 Ans, 15 Talents», Narjiss Nejjar déplore l’absence de structures à même d’encadrer les jeunes Marocains. «Si au lieu de laisser les jeunes esprits proies à l’oisiveté et aux extrémismes de toutes sortes, on leur avait inculqué les valeurs et l’amour de la culture et de l’art, on n’en serait pas arrivé là. On ne fait que récolter les horreurs qu’on a semées dans les esprits de nos jeunes.»

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