Culture

Reportage à Ramallah : Les Palestiniens ne croient plus aux promesses de paix

© D.R

La paix est un rêve auquel les Palestiniens ne semblent plus croire aujourd’hui et la visite du président américain ne change en rien cette vision. Le pessimisme est au rendez-vous et, à Ramallah, chacun continue sa petite vie sans s’investir plus que d’habitude dans le débat politique engagé.
« La visite de Bush ne changera rien dans ma vie», déclare Ahmad, manutentionnaire de 27 ans, vivant à Ramallah. « Tous les présidents américains, à la fin de leur mandat, veulent la paix et à chaque fois on n’obtient rien parce qu’il ne reste pas assez de temps. La politique américaine a toujours soutenu les Israéliens, jamais les Arabes, et il n’y a pas de raisons que ça change. C’est notre expérience avec les Américains qui me fait dire ça», insiste le jeune homme, les bras pleins de cartons. «Aujourd’hui nous avons juste deux choix : la politique américaine ou iranienne. Moi, je ne veux ni l’un ni l’autre. L’Iran n’aime pas les Palestiniens et les Américains non plus. Ils ont un plan et ils essayent de le mettre en place. La politique est sale et pour moi, la paix est un rêve inaccessible. La solution viendra du ciel», conclut-il. Ashraf, son collègue du même âge, n’attend pas plus de la démarche du président des Etats-Unis : «La visite de Bush dans notre pays ne nous donnera rien. Il n’y aura pas de paix si les Israéliens restent dans les terres de 67 car nous n’aurons pas de possibilités d’établir notre Etat» explique-t-il. «Dans un premier temps, les Américains et les Israéliens devraient s’accorder pour stopper les attaques contre les Palestiniens. Depuis Oslo en 1993 la situation est la même, rien n’a changé», se désole-t-il.
Le président Bush est dans la ligne de mire de l’opinion publique palestinienne et chacun se demande pourquoi, en fin de mandat, il s’investit dans un processus de paix. « Cela fait 7 ans qu’il est président des Etats-Unis et il ne se réveille que maintenant ?», se demande Nesreen 25 ans, pharmacienne. «Il ne fera rien. Nous vivons dans la misère depuis plusieurs années et nous continuerons à vivre dans la misère. Ils n’ont jamais rien fait pour nous, ni les Israéliens ni les Américains ni même Mahmoud Abbas. Je ne leur fais pas confiance», conclut-elle. Reem, 32 ans, est d’un avis plus drastique. «Même dans la Bible il est écrit «la terre sainte est une terre de paix qui ne verra jamais la paix» et c’est vrai», s’exclame-t-elle. «Nous sommes nés dans cette saleté et nous n’en sortirons pas. Nous étions mieux lorsque nous étions à 100% sous occupation israélienne, car nous avions certes les mauvais côtés de l’occupation, mais nous bénéficions des bons comme le droit de se déplacer librement, la haute technologie, l’éducation etc. Aujourd’hui, nous n’avons que la violence et l’oppression» explique Reem. «Je me sens désolée pour Mahmoud Abbas, car il doit gérer Israël d’un côté, le monde de l’autre, les Palestiniens avec le Hamas etc., mais nous ne savons pas diriger un Etat, nous sommes des gens négatifs car nous avons appris à être négatifs. Il n’y a pas de solutions» conclut-elle.
Les efforts américains ne trompent pas les Palestiniens : «Je n’attends pas grand-chose de la visite de Bush car je pense que c’est une campagne de relation publique», déclare Tayseer, 47 ans, artiste peintre originaire du camp de réfugiés de Jabaliya, dans la bande de Gaza. «J’espère, mais je ne pense pas que nous obtiendrons quelque chose de sérieux de cette visite. J’apprécie qu’ils commencent à parler du cas israélo-palestinien et qu’ils prennent du temps et des efforts pour essayer de le résoudre» admet-il. «Je pense que nous devons négocier. C’est le seul moyen, car la violence ne donne rien, ni à l’un ni à l’autre. Nous devons vivre sur la même terre et être ami. Ce n’est pas facile pour nous, Palestiniens, d’oublier 78% de la Palestine, mais c’est la vie», explique calmement Tayseer. Sa vision de la politique américaine a quelque chose de désuet : « Parfois, je trouve la politique américaine stupide : comment ils gèrent l’Irak et le conflit israélo-palestinien, c’est comme un jeu. Ce n’est pas solide». Convaincu que le président Abbas tente du mieux qu’il peut d’établir la paix, Tayseer révèle son angoisse : « Les Américains et les Israéliens disent toujours que les Palestiniens refusent tout. Abbas dit non, je ne refuse rien, discutons. Donc il aide. Mais s’il n’y a pas de résultats, si après les négociations, rien ne se passe, la violence deviendra la seule solution», s’inquiète-t-il. «Si Abbas échoue, ce sera un message clair pour les gens ici et la violence sera la seule voie. J’espère que les Américains et les Israéliens comprennent ça», conclut l’artiste. George W. Bush n’a donc, pour le moment, pas convaincu la rue palestinienne qui reste persuadée que la paix est un lointain mirage.

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