Culture

SOS Ksar en ruine

© D.R

Le bureau de l’Unesco au Maroc, en coopération avec le ministère de la Culture et avec l’appui du PNUD ont organisé, les 29 et 30 novembre dernier à Ouarzazate, des ateliers de consultation locale pour la sauvegarde et la réhabilitation du Ksar Aït Benhaddou. En 1987, ce Ksar a été inscrit sur la liste des patrimoines mondiaux de l’Unesco. Aujourd’hui, au vu de l’état de dégradation du Ksar et en l’absence d’un cadre cohérent de mise en oeuvre des actions de sauvegarde, le site pourrait prochainement figurer sur la liste du patrimoine mondial en péril. D’où la nécessité d’élaborer une nouvelle démarche de sauvegarde et de gestion de ce site. Le but est en fait d’inscrire le Ksar Aït Benhaddou dans une dynamique économique et sociale locale. Le site, associé à Glaoui et à une visite royale au 18ème siècle, remonterait au 11ème siècle (Almoravides). Il est situé à 30 km d’Ouarzazate, sur la rive gauche de l’oued Maleh, sujet à des crues qui rendent le Ksar inaccessible. Et pour cause, les inondations de 1989 ont précipité le départ de la population vers la rive droite de l’oued, qui compte une centaine de foyers contre six pour le Ksar. Dans un rapport élaboré par l’Unesco, le ministère de la Culture et le PNUD, les experts ont noté l’absence de système d’évacuation des eaux usées et pluviales avec risque de dégradation des constructions en terre. Le rapport insiste également sur la nécessité d’aménager les ruelles et leur pavage en coordonnant les travaux des infrastructures, et prévision d’une aire de stationnement pour les véhicules touristiques (6 à 10 autocars par jour) dans le nouveau douar. Le contexte est marqué par la diversité des acteurs, le manque de coordination entre les services administratifs, l’absence d’implication du secteur privé et la non-participation de la société civile. Les activités dans l’environnement du Ksar sont dominées par l’agriculture, l’élevage et l’artisanat (tissage de tapis). Le tourisme constitue actuellement le principal pôle d’attraction de la région: plusieurs Ksours et Kasbahs dont le Ksar Aït Benhaddou, les dunes de Zagora et les vallées de Dadès et Todrha. Sur ce point, notons que le site est visité par 123 000 personnes par an soit la moitié des touristes de la région. Le rythme quotidien peut atteindre 700 à 1 200 visiteurs par jour. En d’autres termes, la réhabilitation du Ksar Aït Benhaddou doit nécessairement s’appuyer sur ces considérations touristiques. Mais aujourd’hui, force est de constater que le développement touristique au niveau du site est entravé notamment par des difficultés d’organisation, d’accueil et de séjour, l’absence d’hygiène et d’aménagement appropriés (cheminement, sanitaires publics, halte…), l’absence du minimum médical requis ainsi que le manque de contrôle et d’encadrement des guides. 24 bazaristes sont installés sur le site du Ksar. Ils sont étrangers à la région (originaires de Taroudant) et leur profession reste inorganisée, souvent opposée à celle des guides chargés des itinéraires touristiques. Ils occupent la rue commerçante du Ksar et s’installent dans les rues résidentielles. En plus de cela, le Ksar souffre d’un grand déficit en équipements collectifs et en infrastructures. L’éducation y est limitée à l’école primaire. Le site est équipé d’un dispensaire rural encadré par un infirmier, seul lien avec la population, d’où un suivi très élémentaire des populations. L’accès à l’eau potable et l’électrification sont également une réelle entrave. Par ailleurs, l’étude pour l’accessibilité au site demeure à ce jour incomplète, de même que les impacts de la mise en place d’un pont. Deux franchissements de l’oued Maleh sont envisageables. Le premier (150 m) débouche sur une des entrées principale du Ksar, dans le prolongement de la rue commerçante des bazaristes du nouveau douar. La seconde option (70 m) débouche à l’arrière du Ksar, moins fréquenté. Les formes de dégradation du Ksar portent essentiellement sur la dégradation des soubassements et des toitures (étanchéité) ainsi que l’utilisation du béton armé. Le tournage de films au sein du Ksar est responsable de l’introduction de formes architecturales exogènes avec des reliquats de décors de cinéma sur les portes et les ouvertures. Sans oublier la prolifération de bazars à l’intérieur du Ksar et la transformation de pièces d’habitation. Pour pallier à ces différents problèmes et bien d’autres, l’ONE a réalisé une étude sur l’électrification du site portant sur les aspects techniques et financiers de la réalisation du réseau, l’éclairage public et les branchements individuels. Pour sa part, l’ONEP effectue l’étude d’adduction d’eau potable du Ksar. La direction de l’Equipement a examiné l’étude du pont réalisée par un bureau d’études privé. Le Comité provincial du tourisme (CPT) a été créé en 2003. Il regroupe les différents professionnels du secteur touristique (agences de voyage, hôtellerie, transport, restauration, maisons d’hôtes). Ces professionnels du tourisme reconnaissent la valeur du site et son rôle dans le développement de leurs activités. Même s’ils demeurent peu mobilisés pour contribuer efficacement à sa sauvegarde, ils se montrent disposés à contribuer à des actions de promotion et de sauvegarde. Même chose pour les habitants eux-mêmes. L’association Aït Aïssa (créée en 1989) des habitants du Ksar reste confrontée à des difficultés de fonctionnement (absence de ressources et problème de coordination entre les membres). L’association mène des actions telles que la collecte des ordures, l’installation de panneaux de propreté, entretien… Aussi, les propriétaires des maisons du Ksar ont un rôle effacé. Quelque 98 propriétaires sont recensés. Les habitants qui ont quitté le Ksar seraient prêts à revenir si des activités économiques viables étaient engagées. Le comité local de sauvegarde mis en place à l’initiative du gouverneur intervient de manière sectorielle et regroupe notamment des administrations comme l’ONEP pour l’adduction d’eau potable, l’ONE pour l’électrification, l’Equipement pour le franchissement du pont. Ainsi que le tourisme pour les maisons d’hôtes, l’Education nationale pour le renforcement des écoles, la Santé pour l’installation d’une infirmerie et les Eaux et Forêts pour la plantation des abords. La question du financement et du suivi reste posée, pour cette structure censée veiller à la réalisation du processus de sauvegarde. En fait, la réhabilitation du Ksar Aït Benhaddou concerne le Ksar et son environnement le plus large, par le renforcement des activités génératrices de revenus. C’est ainsi qu’il est devenu urgent notamment d’améliorer la productivité dans le secteur agricole et d’élevage (chèvre laitière), de promouvoir les produits locaux (tissage de tapis, apiculture…) portant le label Ksar Aït Benhaddou et mobiliser des recettes des visites du site en faveur d’actions de sauvegarde. Les ateliers d’Ouarzazate ont abouti à la signature d’un Pacte de sauvegarde du Ksar Aït Benhaddou entre le ministère de la Culture, la commune Aït Zineb dont dépend le Ksar, l’association Aït Aïssa ainsi que l’UNESCO et le PNUD.

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