L’exposition présentant 24 photographies réalisées par Touhami Ennadre se poursuit jusqu’à 30 juin à la Villa des arts de Rabat. Ces 24 œuvres illustrent une expérience très particulière de Touhami Ennadre au niveau de la photo utilisant la lumière comme un moyen pour refléter une image particulière des êtres humains. Le photographe se définit comme «un peintre dans le noir» dont la palette est riche de cette anti-couleur qu’il utilise pour délimiter ses sujets et structurer l’image avec des lignes et des surfaces.
Le noir révèle pour lui, «l’autre». Cette couleur permet à notre vision de se repérer, d’apprécier la diversité des variations des densités entre les valeurs grises et les valeurs blanches. Ce noir n’est pas funèbre, il éclaire, donne le relief, le modèle et la profondeur, grâce à un savant contre point, entre le clair et l’obscur, entre les lumières et les ombres. Ennadre préfère la lumière, «Le sens de mon travail est de faire ressurgir l’essentiel, il n’est jamais illustratif. Mes photos dépendent uniquement de la rencontre et de ma lumière. Je travaille dans le mouvement et je n’utilise pas de viseur» confirme l’artiste.
Ennadre travaille en dimension 6×6 cm. Il développe lui-même ses rouleaux et tire le tout en épreuves de travail, ensuite, il opère une sélection de l’ordre d’une photographie sur trente ou quarante et constitue la série sur laquelle il travaille.
Commence alors un très long travail. A titre d’exemple, le tirage d’un grand format avec tout ce que cela représente d’essais et de dessins et de découpages des caches, demande un minimum de 12 heures de travail. Ses agrandissements sont uniques, d’un format proche de 1,30×1,50 m. Uniques non pas par refus de la duplication, mais par la nature de son travail. En fait, pour chaque photographie il dessine une série de caches et modules.
Ennadre photographie avec un appareil auquel il a enlevé le viseur et qui devient comme l’extension de son bras, une partie de lui-même. Son art a été comparé aux peintures de Van Gogh et Caravage, ou encore à la poésie de Rimbaud. Selon l’écrivain Tilman
Spengler : «Ennadre montre des images qui, en même temps apparaissent et disparaissent. Ses photographies réécrivent la création, soulèvent parfois jusqu’à l’obsession, la question de la lumière et de l’ombre, de la manière dont elles se forment et se dessinent dans un dialogue à parts égales».
En effet, «Le peintre dans le noir» compte dans à son actif plusieurs séries de photographies, notamment «Les mains, le dos et les pieds» réalisés entre 1978 et 1982, «Accouchements» en 1982, «Les morts exhumés du Vésuve» (1985-1990) et «L’homme des glaces» (1992), «Les yeux de ma mère», «Priére-synagogne», «Jamaâ»… Ennadre a déjà exposé dans les galeries les plus prestigieuses, telles que le Guggenheim Museum de New Yerk, La documenta 11 de Kassel, ou encore la Maison européenne de la photographie à Paris.
Biographie
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