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Youssef Ait Mansour : «Une tournée dans les lycées pour mieux rapprocher Antigone des élèves»

© D.R

Entretien avec Youssef Ait Mansour, Metteur en scène et acteur

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La troupe Taghanja a récemment interprété, au théâtre Mohammed V de Rabat, la première de la pièce de théâtre «Antigone» en darija sur une traduction d’Abdellatif Laâbi. ALM a eu un entretien avec le metteur en scène qui explique les dessous du choix de cette œuvre programmée à l’enseignement secondaire et la démarche qu’il a utilisée pour sa mise en scène afin de mieux la rapprocher des lycéens. 

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ALM : Vous venez de présenter en darija la première de la pièce de théâtre «Antigone». Qu’est-ce qui vous a décidé à opter pour une telle œuvre ?

Youssef Ait Mansour : Tout d’abord, l’idée a germé lors d’un atelier consacré par l’Institut français à cette œuvre écrite par le dramaturge Jean Anouilh. Pour rappel, cette pièce de théâtre est une adaptation de l’œuvre de Sophocle. Lorsque j’ai pris part à cet atelier, j’ai vu que son encadrant, d’origine française, a monté la pièce en arabe dialectal avec des comédiens marocains pour la présenter au public y compris les lycéens. Cependant, ce projet n’a pas été accompli. Pour ma part, j’étais enthousiaste à l’idée. C’est pourquoi j’ai eu recours à la traduction qui en a été faite en darija par Abdellatif Laâbi tout en remontant au texte de Jean Anouilh. Ainsi, la version d’«Antigone» en dialecte marocain a vu le jour en partenariat avec le théâtre Mohammed V de Rabat.

Cette pièce de théâtre est connue pour sa difficulté. Comment l’avez-vous traitée ?

Il est vrai qu’elle n’est pas aisée. Cependant, mon objectif est d’éluder le regard porté sur la tragédie, notamment ce texte d’origine grecque. D’ailleurs, le contenu de cette œuvre relève de notre vécu quotidien sauf qu’elle est conçue dans une langue qui nous est éventuellement inaccessible du fait que les faits se déroulent dans un palais. C’est pour cela que j’ai opté pour une langue dialectale assez soutenue. Quant à l’intrigue, j’ai essayé de la rapprocher au public tout en mettant en valeur, dès la première scène, la relation d’amour entre Antigone et Hémon. J’ai également mis l’accent sur le mariage de ce couple en tant que moyen permettant d’assurer la pérennité des liens familiaux sans tragédies à l’instar de celle d’Œdipe. Une idée partagée par Créon, l’oncle d’Antigone mais rejettée par celle-ci afin de trancher une décision à caractère politic à savoir l’inhumation de son frère, objet de conflit dans l’œuvre. Ainsi la tragédie a lieu.

Est-ce à dire que vous ne vous êtes pas conformé au texte d’origine ?   

Absolument pas ! J’y suis plutôt resté fidèle.  En fait, la différence réside dans la mise en scène puisque chaque metteur en scène a sa propre technique et son angle de vue. Ce qui m’importe c’est l’histoire d’amour pour faciliter la compréhension de la pièce au spectateur qui s’identifierait aux personnages. J’ai également traité du conflit entre Antigone et son frère Créon puis sa sœur Ismène sans le ressortir au vrai sens du terme. Telle était ma démarche.

Quel regard portez-vous sur la tragédie au Maroc ?

Hélas, il n’existe pas beaucoup de metteurs en scène qui se penchent sur la tragédie. La tendance est plutôt à la comédie. Or, la dramaturgie est l’essence du théâtre. Cet art exige un travail de longue haleine. Pour ma part, «Antigone» m’a pris beaucoup de temps, d’effort et de réflexion pour prendre les textes et les personnages qui m’intéressent. Par exemple je me suis passé des rôles de la reine et de la nourrice. Quant au chœur et messager, je les ai glissés dans la peau d’un seul personnage interprété par Salima Ben Moumen. Par là, les lycéens pourront mieux assimiler l’œuvre.

Pourquoi destiner l’œuvre aux seuls élèves ?

A vrai dire, tout spectateur peut assister à la pièce. Par contre, ma démarche consiste à mieux rapprocher les lycéens de l’œuvre. Déjà, la troupe Taghanja a fait les dernières répétitions devant une dizaine d’élèves de la ville de Salé. Ceux-ci étaient réceptifs à l’œuvre et l’ont mieux assimilée. Je me suis dit que peut-être cette interaction avec les élèves me donnera un nouveau souffle. A travers ma démarche, je veux mieux rapprocher non seulement l’œuvre des élèves mais aussi les planches à un public censé être éduqué au théâtre. D’ailleurs, l’une des lacunes dont souffre l’enseignement c’est l’inexistence d’ateliers en cet art. Pour l’heure, j’envisage de préparer un dossier pour le déposer auprès des académies afin de préparer une tournée dans les lycées en vue de présenter la pièce aux élèves et d’avoir un débat avec eux à ce propos.

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