Culture

Zoubeir Benbouchta : «Tanger manque de théâtres»

© D.R

ALM : Tanger dispose d’un théâtre depuis 1913. Quels souvenirs en gardez-vous ?
Zoubeir Benbouchta : Tanger a connu une affluence des étrangers qui sont venus habiter dans cette ville avant qu’elle ne soit mise sous statut international. Ils ont été à l’origine de la création des salles de théâtre comme les deux fameux théâtres Zazuella et Caroussel. En 1913, l’aristocrate espagnol Don Manuel Pena a créé El Gran Cervantès. C’était un chef-d’œuvre qui a contribué activement au développement du théâtre à Tanger. Plusieurs artistes et troupes théâtrales de renom se sont produits sur ses planches ; notamment Youssef Ouahbi et Amina Rizk. Les visites effectuées par ces artistes égyptiens célèbres ont aiguisé la créativité des jeunes Tangérois. Il y a eu également l’apparition de plusieurs troupes tangéroises tels que Firkat Chabbab Tangia, Jawk Lhila Li Tamtil de Tanger, Jawk Al Moghrib, Jamiat Al Waây Al Kawmi et Char Dahabi. De jeunes comédiens vont marquer le théâtre marocain comme Larbi Yakoubi, Bachir Skiraj, le défunt Mustapha Bouy Bouchama et Jilali Ferhati.

Quelle est la situation actuelle du théâtre à Tanger ?
Tanger connaît une effervescence en matière de création de pièces théâtrales grâce notamment à la  troupe de théâtre Bab Bhar Cinémasrah et aux associations de théâtre amateur.  Cela a conduit à l’organisation, au mois de juin dernier, du premier Festival du théâtre de la région de Tanger-Tétouan. Cet événement a connu la participation d’un nombre important de troupes marocaines. De même, l’Institut français du Nord organise, au cours du mois de novembre, des ateliers pour la mise en scène, la dramaturgie et le cinéma.

Tanger souffre actuellement d’une insuffisance en matière d’infrastructures. Comment expliquez-vous cela ?
Tanger manque actuellement de salles de théâtre. Nous sommes obligés parfois de louer des salles de cinéma pour y jouer nos pièces. L’Institut culturel français du Nord nous apporte une aide non négligeable puisqu’il met à notre disposition un lieu où nous pouvons répéter et présenter nos pièces. L’école espagnole Ramon y Cajal et le collège espagnol Cevero Ochea ont cessé, ces dernières années, de mettre leurs salles à notre disposition. Nous en ignorons toujours la cause. Nous avons donc plus recours à la Maison des jeunes, la Maison de la culture de la délégation du ministère de la Culture à Tanger.

Où en est la réhabilitation du théâtre Cervantès ?
Le théâtre Cervantès fait partie du patrimoine de la ville de Tanger. Sa réhabilitation a toujours été au centre des discussions des responsables et à l’ordre du jour du Conseil de la ville. Nous avons toujours appelé à sa restauration, mais tous nos efforts n’ont pas abouti. Ce théâtre qui a été cédé à la municipalité de Tanger en 1974 vient d’être récupéré par l’Espagne. Et nous sommes confiants après la déclaration du ministre espagnol des Affaires étrangères, Miguel Angel Moratinos qui a affirmé, lors du Festival international d’Asilah en 2005, que la réhabilitation de ce monument historique est à l’ordre du jour du gouvernement espagnol.

Quelles sont vos dernières créations ?
Je viens de terminer le texte de la pièce théâtrale intitulée « Zankat Shakespear» qui a bénéficié de la subvention du fonds d’aide pour le théâtre pour l’année 2006-2007. C’est la troisième partie d’une trilogie intitulée « L’hôtel de Shakespear » et dont j’ai déjà écrit la première partie (Ya Mouja Ghani )  et la deuxième (Lalla Jmila). « Zankat Shakespear » est réalisée par Jilali Ferhati qui revient ainsi au théâtre après une absence de plusieurs années. Elle sera interprétée par Kenza Frido, Hanane Ibahimi, Hamid Boukili, Mustapha Houchine, Mohammed Addardour et Jamal Nouaïmane.
 
Pourquoi vos pièces de théâtre s’intéressent-elles seulement à Tanger ?
Je suis un grand passionné de ma ville natale et je la considère comme ma source d’inspiration. Lorsque j’écris sur les souffrances et les malheurs des habitants de Tanger, je décris en fait les souffrances de tous les Marocains. J’estime que je ne fais pas exception à la règle puisque beaucoup d’écrivains et notamment Najib Mahfoud, Abdellah Aroui, Gharssia Markiz, Alberto Mourafia, Williams Hana…. ont écrit sur leurs villes natales. Lorsque Tanger était ville internationale, elle avait abrité un nombre important d’étrangers de différentes nationalités et religions. C’est un héritage important que je dois faire connaître aux jeunes générations. Et comme le dit l’écrivain français Le Clézio «Il m’est impossible de concevoir la réalité de notre temps sans cette profondeur que je donne au passé ».

On vous reproche de ne pas rester longtemps avec la même troupe, comment expliquez-vous cela ?
Comme tous les dramaturges, mes textes sont à la disposition de toutes les troupes. Ceux qui me reprochent cela n’ont pas raison puisqu’au fond, je collabore presque souvent avec les mêmes artistes que je considère comme des amis. Je m’estime heureux de faire partie de al troupe Bab Bhar Cinémasrah. Je me rappelle qu’en 2001, j’avais cultivé, moi et quelques amis, l’espoir de créer un nouveau genre de théâtre. Il s’agissait de Mohmed Addardour, Laarbi Yakoubi, Karima Imighrane, Hamid Boukili, Naïma Gharoudi et Saïd Koubritt. Notre projet a démarré par la présentation de la pièce de «Ya Mouja Ghani» qui sera suivie  par « Moudakirat Chaytania » et « Lalla Jmila».
En 2005, nous avons créé la troupe Bab Bhar Cinémasrah à Tanger. Nous voulions travailler avec les associations de théâtre amateur. Mais nous avons dû faire face à quelques unes qui cherchaient par tous les moyens de nous mettre des bâtons dans les roues. C’est pourquoi nous avons arrêté toute collaboration avec les associations de théâtre amateur.

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