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Abdellatif Jouahri tire la sonnette d’alarme: Le modèle de développement devrait être revu

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 Le Maroc a réalisé des avancées importantes en matière d’attractivité et d’équilibre macro-économiques, mais beaucoup reste à faire pour atteindre une vitesse de croisière.

Refonte et rupture… Ce sont les recommandations clés tirées du rapport annuel de Bank Al-Maghrib. Présenté au Souverain vendredi dernier à Tétouan, le rapport met en relief un panorama contrasté de l’économie marocaine. Un contexte qui, malgré les acquis, reste plombé par la lenteur d’application et la divergence d’actions. Certes, le Maroc a réalisé des avancées importantes en matière d’attractivité et d’équilibre macroéconomiques, mais beaucoup reste à faire pour atteindre une vitesse de croisière permettant d’asseoir son assise financière et de consolider son positionnement.

Abdellatif Jouahri, gouverneur de la banque centrale, a formulé, dans ce sens, des messages clairs et fermes. Le Maroc a besoin d’initier une véritable refonte de son modèle économique basé principalement sur la demande intérieure comme moteur de croissance. De même, la rupture est de mise, selon M. Jouahri, notamment au niveau de la conception et de la mise en œuvre des politiques publiques. «Le modèle basé sur la demande intérieure comme moteur de croissance qui a prévalu jusqu’à présent a montré ses limites. Outre la faiblesse de la croissance et de la création d’emplois, la sensible détérioration ces dernières années des déficits jumeaux, l’aggravation du niveau d’endettement et la persistance d’un faible niveau de compétitivité de notre tissu productif sont autant de signes de fragilité qui refléteraient son essoufflement », précise Abdellatif Jouahri dans son rapport.

Le gouverneur de Bank Al-Maghrib appelle à une mobilisation incessante en vue d’accélérer les réformes structurelles et rehausser la confiance aussi bien du citoyen que de l’opérateur économique. La réorientation prônée par Abdellatif Jouahri devrait se faire loin des rivalités politiques. «Les défis auxquels fait face notre pays pour réaliser ses ambitions sont considérables, laissant peu de marges aux hésitations et à la passivité dans la conduite de la politique publique. Les enjeux les plus stratégiques pour le pays doivent être placés au-dessus des considérations d’ordre politique ou catégoriel», précise-t-il.

Le rapport de Bank Al-Maghrib inscrit, encore une fois, l’industrialisation au cœur de la transition économique du Maroc. Le document revendique, cependant, la nécessité d’évaluer le rendement des plans sectoriels et leur cohérence d’ensemble. Une évaluation qui, selon la banque centrale, devrait se baser autour de la mise en place d’une planification stratégique, de la priorisation des objectifs et une optimisation dans l’utilisation des ressources. Sur le plan fiscal, Abdellatif Jouahri a attiré l’attention sur la lenteur d’application des recommandations émises, précédemment, en marge des Assises nationales de la fiscalité telles que l’élargissement de l’assiette fiscale et l’intégration de l’informel. L’heure étant d’activer les démarches pour réduire les nombreuses dérogations fiscales dont le rendement économique et social n’est pas démontré.

Ouverture économique : Le challenge

Sm-le-Roi-Mohammed-VI-AfriqueLe Maroc a initié ces dernières années une réflexion sur l’opportunité d’opérer une transition graduelle vers la flexibilité du régime de change marocain.

Dans son rapport, Abdellatif Jouahri a ouvert la parenthèse sur la politique d’ouverture engagée par le Maroc depuis un bon moment. Le Maroc s’est, en effet, tourné vers de nouveaux horizons . L’Afrique représente actuellement une destination phare pour le Maroc faisant du Royaume le hub de la région. De même, le partenariat avec les pays du Conseil de coopération du Golfe s’est également consolidé. Toutefois, la diversification des partenaires est à double enjeu.

Le gouverneur de la banque centrale indique que «cette ouverture permet aussi bien à notre système bancaire qu’à nos entreprises de s’appuyer sur de nouveaux relais de croissance et de consolider la position du Maroc en tant que plate-forme de transition entre l’Afrique et le reste du monde». Et de préciser que «la réussite de ces partenariats nécessite, cependant, un suivi rapproché des autorités et une mobilisation par les opérateurs de moyens à la hauteur des engagements pour que notre pays préserve son statut de partenaire crédible».

Pour mener à bien ce chantier, des défis restent à relever, notamment en termes de résilience et résistance aux chocs extérieurs. En vue de donner un signal de confiance à ses partenaires, le Maroc a initié ces dernières années une réflexion sur l’opportunité d’opérer une transition graduelle vers la flexibilité du régime de change marocain. «Une telle approche est de nature à permettre aux opérateurs de disposer de délais suffisants pour s’adapter progressivement à un environnement plus exigeant et pour développer la capacité et le savoir-faire nécessaires», apprend-on de M. Jouahri.

Le gouverneur de Bank Al-Maghrib explique par ailleurs que «ce choix permettra par ailleurs de renforcer l’autonomie de la politique monétaire et d’améliorer la transmission des décisions de la banque centrale à l’économie réelle». Et de conclure que «Bank Al-Maghrib pourra ainsi opérer le passage au ciblage d’inflation, ce qui lui permettra de mieux ancrer les anticipations et de rehausser sa contribution au développement économique ».

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  Les chantiers à accélérer
La Régionalisation avancée : Selon Abdellatif Jouahri, ce chantier constitue «un pas important vers un développement territorial inclusif et équilibré, renforçant la démocratie locale et favorisant l’investissement et l’émergence de pôles économiques et régionaux. M. Jouahri a appelé à tirer profit des expériences internationales». «Mal planifié, le processus de régionalisation pourrait se transformer en gouffre financier», explique-t-il. Ainsi, M. Jouahri souligne la nécessité d’adopter une approche minutieuse pour éviter les redondances des centres de décision et assurer une utilisation rationnelle des ressources. «Il reste cependant fortement tributaire de la disponibilité de compétences aptes à assumer la gouvernance du développement au niveau local», précise-t-il.

La Réforme de la justice : Abdellatif Jouahri a appelé au réenclenchement de ce chantier qui contribuerait à l’amélioration de l’environnement des affaires, de l’investissement et de l’entrepreneuriat. Le gouverneur a indiqué que «l’aboutissement de ce projet dans des délais raisonnables permettra de faire évoluer la perception négative de la justice par l’investisseur et le citoyen en général».

La Réforme des retraites : La lenteur de l’avancement de ce projet préoccupe Abdellatif Jouahri. L’ampleur des coûts générés par les retards de la mise en œuvre pourrait compromettre la soutenabilité des finances publiques à moyen terme. «La consolidation des acquis à ce titre requiert une revue de la composition des dépenses pour en améliorer davantage la qualité et le rendement. La nouvelle loi organique, en particulier la règle budgétaire et la programmation pluriannuelle qu’elle instaure, devraient d’être d’un grand apport dans ce sens à condition que sa mise en œuvre soit effective et dans les délais préétablis», précise M. Jouahri.

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