Economie

Alain André : Le CNAM sollicité pour la régionalisation

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C’est lors de la visite de François Hollande que la position du Conservatoire national des arts et métiers de Paris a été fortement confortée dans ses implications pour le perfectionnement des compétences au Maroc. Parmi les grands chantiers, un nouvel établissement représentant l’enseignement public français devrait voir le jour dans la capitale. Pour rappel, le CNAM avait été sollicité en France par le ministère de l’intérieur pour la formation de ses cadres dans le cadre de la régionalisation. Ses implications au Maroc et ses entrées facilitées semblent justifier une démarche similaire… En direction du patronat, l’établissement français compte sur l’engagement de la CGEM matérialisé par la signature d’une convention pour développer la culture de la formation continue au sein de la PME. Le capital humain représentant l’ingrédient essentiel à l’accroissement économique. Les enjeux sont clairs. Et à plusieurs niveaux ! Car le Maroc pourrait devenir à terme un hub pour les pays du pourtour méditerranéen, du Moyen-Orient et de l’Afrique subsaharienne.

ALM : Le CNAM est présent au Maroc depuis déjà trois ans. Il semblerait aujourd’hui que la coopération franco-marocaine appuyée par la visite de François Hollande ait boosté le processus. Pouvez-vous nous en livrer les principaux faits ?
Alain André : Permettez-moi tout d’abord de préciser que le Conservatoire national des arts et métiers (Cnam) est présent au Maroc depuis plus de quinze ans. En effet, diverses actions ont été menées soit dans le cadre de la coopération avec l’ambassade de France dans la mise en place du plan d’urgence de l’Education nationale, soit par des conventions précises, directement entre professeurs marocains et professeurs du Cnam, au gré de leurs rencontres et sans qu’une véritable ligne politique ait été définie. Ceci a motivé la décision de créer au Maroc un Centre représentant l’Etablissement public français. Placée sous l’égide de l’ambassade de France dans le cadre de la coopération maroco-française, cette création a donné lieu à une signature de convention entre les deux parties le 5 avril 2005. Toutefois la mise en œuvre de ces accords a rencontré, pour certains, des difficultés tant à Rabat, Casablanca que Oujda, villes où le Cnam était implanté. Dès la nomination du nouvel administrateur général du Cnam, le Recteur Christian Forestier, une réforme d’envergure visant à moderniser l’établissement et à le rendre plus efficient a été entreprise. Le Maroc n’a pas échappé à celle-ci avec la mise en place de nouvelles structures et surtout l’élaboration d’une nouvelle stratégie en liaison directe avec la direction des relations européennes et internationales du Cnam à Paris. Basée sur le fait que l’établissement parisien se devait d’être à l’écoute des besoins en ressources humaines pour permettre au Maroc de mettre en œuvre ses divers plans de développement, cette approche ne devrait pas tarder à porter ses fruits. Toutes les formations dispensées à travers le réseau des partenaires furent pour la plupart reprises, quelquefois avec de nouveaux. D’autres actions furent développées en génie civil, logistique et transport, informatique, médiation sociale en urbanisme, ingénierie pédagogique avec l’Office national de l’eau (ONE). Ceci devait aboutir à la signature le 16 juin 2011 entre le ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur, de la formation des cadres et de la recherche scientifique. Cette convention, accompagnée de plusieurs autres avec différentes universités, marquait ainsi la reconnaissance par les autorités marocaines de la représentation au Maroc du Cnam et de son action. Ceci était confirmé par la nouvelle convention signée avec l’ambassade de France le même jour.
Ces séances de signature trouvaient leur raison d’être dans la remise le soir même des diplômes des premiers ingénieurs et docteurs marocains formés par le Cnam, à la Résidence de l’ambassadeur de France, en présence du secrétaire général de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur, de la formation des cadres et de la recherche scientifique.

Quels sont les principaux points de la convention signée entre le ministère de l’enseignement supérieur français et son homologue marocain lors de la visite du 1er ministre français ?
La visite du président de la République française François Hollande a eu le mérite de concrétiser deux années de négociations mais surtout de travail sur le terrain pour rester dans la ligne politique que nous avions tracée. La convention signée entre les ministres de l’enseignement supérieur du Royaume du Maroc et de la République française porte principalement sur la création d’un établissement de formation tout au long de la vie au Maroc. Ce genre d’établissement n’existe pas aujourd’hui : il s’agit donc là d’un projet innovant pour permettre une ascension sociale des personnes en activité dans les entreprises et leur diplomation.

Le Cnam et ses principaux partenaires au Maroc

*  L’Université Hassan II (ingénieurs en génie électrique et en génie des matériaux)
*  L’Institut supérieur de commerce et d’administration des entreprises, ISCAE (expertise comptable et audit)
*  L’Institut national d’aménagement et d’urbanisme, INAU (mise en place d’un Institut d’études économiques et juridiques appliquées à la construction et à l’habitation)
*  L’Office de la formation professionnelle et de la promotion du travail, OFPPT (offshoring dans les métiers de la vente, de la comptabilité et de la gestion des personnels)
*  L’Université de Salé puis la Chambre française de commerce et d’industrie du Maroc, CFCIM, en formations ouvertes à distance.

Vous avez déjà signé une convention de partenariat avec la région de l’Oriental. Quelle est votre stratégie de développement à l’échelon national dans le cadre de la régionalisation ?
Sur le plan régional, des actions ont été engagées dans le but d’accompagner la politique de régionalisation impulsée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI.
C’est ainsi qu’un accord-cadre a été signé avec le Conseil régional de l’Oriental, en particulier pour la mise en place des technopôles d’Oujda et de Berkane et afin d’apporter un appui aux formations sur l’environnement et les énergies renouvelables qui constituent déjà pour la région des pôles de compétences. Cette action de régionalisation, recommandée par le Conseil économique et social du Royaume, va se poursuivre dans le but d’effectuer un rapprochement avec les régions françaises avec lesquelles il existe souvent un jumelage ou une convention.

Avez-vous déjà mené une opération du genre en France ?
Il faut savoir qu’en France, le CNam s’appuie sur plus de vingt centres régionaux qui sont pour la plupart liés par des conventions aux Conseils régionaux qui contribuent à leur financement pour assurer les formations en ressources humaines nécessaires au développement territorial.

Quelles sont vos recommandations pour que votre expertise ait un impact positif dans le cadre du processus de régionalisation au Maroc ?
Je demeure persuadé que la meilleure recommandation pour réussir une telle entreprise est de mobiliser tous les acteurs régionaux autour des mêmes axes de développement : organismes ou instituts de formation, Conseils régionaux, représentations du patronat… C’est par l’échange et la réflexion en commun suivis de l’action que pourront être atteints les résultats escomptés.

En direction de l’entreprise marocaine, vous avez signé, lors de la visite du Premier ministre français, une convention avec la CGEM. Quels sont les principaux axes de coopération entre les deux entités ?
Dans le cadre de la convention signée entre les deux ministres, le rôle de la Confédération générale des entreprises au Maroc (CGEM) est d’apporter son concours pour la définition des besoins des entreprises et des Fédérations afin d’aider au montage d’une ingénierie pédagogique des formations qui seront dispensées dans le futur établissement marocain de formation tout au long de la vie, en conformité avec les besoins des entreprises.

Concrètement, comment les actions seront-elles menées ?
L’accompagnement se fera par le biais d’un comité de pilotage où les différentes parties seront représentées.

Dans la logique du CNAM, les enseignants sont recrutés selon des critères bien déterminés. Pouvez-vous nous éclairer sur la démarche pour qu’un enseignant-chercheur marocain puisse prétendre enseigner dans le cadre du CNAM ?
Le Cnam a pour mission de dispenser des formations et de délivrer des diplômes répondant aux mêmes critères de qualité en France et dans le monde. Pour ce faire, il doit s’appuyer sur un corps professoral ayant les mêmes qualités pédagogiques à Paris, New York, Shanghai, Casablanca ou ailleurs. De ce fait, l’agrément donné aux professeurs du Cnam se fait sur l’examen du Curriculum Vitae de ceux-ci pour une matière déterminée. Si le candidat correspond, il est agréé pour une durée pouvant aller de 1 à 3 ans. Aujourd’hui nous comptons plus de soixante-dix professeurs de très haut niveau agréés au Maroc.

Le CNAM compte 150 centres de formation à travers le monde. Il offre 1.500 formations et prétend à 350 métiers. Quelle sera l’offre au Maroc ? Envisagez-vous d’en faire un hub pour le reste de l’Afrique francophone ?
Ceci ne sera plus du ressort du Cnam seul mais d’un travail étroit, en partenariat entre le nouvel établissement de formation tout au long de la vie et notre établissement. Nos formations pourront être dispensées soit à distance, soit par le biais d’accords passés avec les établissements de formation dans les pays du pourtour méditerranéen, du Moyen-Orient et de l’Afrique subsaharienne.

Dans son rôle premier, le CNAM permet la validation des expériences. Pouvez-vous nous éclairer sur la voie à suivre pour y accéder ?
Tout d’abord, il ne s’agit pas du rôle premier du Cnam qui se décline en formation, recherche et développement et diffusion de la culture scientifique et technique. La validation des acquis de l’expérience (VAE) n’est qu’un des moyens légaux pour obtenir ou valider un diplôme sur la base d’une reconnaissance des acquis de l’expérience tout au long de la vie des candidats. Ces derniers sont appuyés par un conseiller spécialiste. Cette démarche personnelle et strictement confidentielle est soumise à un jury domicilié en France qui statue de manière irrévocable sur le dossier qui lui est soumis.

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