Economie

CNSS : l’heure des comptes a sonné

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Quarante hauts cadres de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) sont convoqués par le juge d’instruction dans le cadre de l’enquête sur les malversations qu’a connues la Caisse. Sont convoqués ceux qui ont présidé à la destinée de la CNSS de 1972 à 2000. Ainsi, les ex-présidents du Conseil de la Caisse, les anciens directeurs généraux ainsi que les directeurs des plus grands départements de la Caisse seront auditionnés… Ceux qui sont, bien évidemment, encore en vie !
Cette convocation, devant la Cour d’appel de Rabat, intervient suite aux trois rapports d’enquête : le premier parlementaire, le second technique, de l’IGF, alors que le troisième est policier de la BNPJ. Les auditions seront menées par le juge Jamal Serhane dont le calendrier personnel a été fortement mobilisé par l’affaire Slimani-Laâfoura.
Toutefois, sur la forme, s’il est vrai que le juge a pu, finalement, rouvrir le dossier par manque de temps, le timing paraît mal choisi pour la Caisse. La CNSS, depuis le départ de son ex-directeur général, attend la nomination d’un nouveau. À la veille de chantiers immenses et décisifs pour l’ensemble du régime de couverture sociale du Royaume, le travail des équipes opérationnelles risque d’être chamboulé par la vacance de ce poste. Une forte déstabilisation des équipes en résulterait.
Sur le fond, cette nouvelle étape marque, assurément, un pas décisif vers la récupération des deniers publics. Le travail accompli par la Commission parlementaire a mis à nu plusieurs malversations et autres détournements.
En effet, un rapport de la Commission parlementaire, en juin 2002, a  révélé  une fraude à très grande échelle, pratiquée pendant 20 ans au sein de la CNSS. C’est l’un des plus gros scandales financiers qu’ait connu le Royaume chérifien et il y avait de quoi être perplexe. Les sommes détournées s’élèveraient à 47,7 milliards de DH et les montants dilapidés approcheraient les 115 milliards de DH depuis 1972. À titre d’exemple, le préjudice est équivalent aux recettes de l’Etat en 2001, celles de la privatisation comprises.
Il représente une fois et demie les dépenses de fonctionnement de l’Etat pour la même année et plus de six fois les dépenses d’investissement.
Parmi les révélations du rapport: absence d’une comptabilité fiable et de contrôle dans l’attribution des indemnités, falsification des documents et des données, système d’archivage inexistant, violation du système informatique, passation des marchés par entente directe, utilisation illégale de certains comptes de la Caisse.
La mauvaise gestion et les orientations erronées du Conseil d’administration sont mises en cause. Les principaux visés sont Mohammed Gourja, qui a géré la Caisse du 9 avril 1971 au 11 février 1992, Mohammed El Alj (du 11 février 1992 au 1er mai 1995) et Rafiq Haddaoui (du 1er mai 1995 au 10 avril 2001).
Dans le cadre de l’enquête parlementaire, présidée par Rahou El Hilaa,  48 personnes ont été auditionnées, dont des anciens responsables de la Caisse. Le document, épais de 326 pages, a été présenté à la Chambre des conseillers et a bien été discuté. Son transfert devant la justice en plus du travail de l’IGF et de la BNPJ constituent une première pour la Royaume.
Auparavant, dès que le département de Bouzoubâa, ministre de la Justice, avait remis le dossier de la CNSS au juge d’instruction chargé de l’affaire, ce dernier a aussitôt prononcé une mesure d’interdiction de quitter le territoire national à l’encontre des 44 ex-responsables de la Caisse.
Cette mesure reste assurément ordinaire, et non pas d’une inculpation entrant dans le cadre de la procédure concernant l’enquête judiciaire, et notamment l’audition des personnes citées. Maintenant, charge à la justice de se prononcer. Les accusés seront appelés à se défendre. Dès la sortie du rapport, les manifestations étaient nombreuses. Cité à maintes reprises dans le rapport de la Commission parlementaire, Rafiq Haddaoui n’a pas voulu attendre le procès pour réagir. L’ex-directeur général a adressé un virulent réquisitoire contre les résolutions et les multiples interprétations figurant dans les déclarations du président de la Commission.
«Le rapport contient des critiques et parfois même des accusations à l’endroit de ma gestion, sans que sois interrogé sur les questions concernant cette dernière, ni que je puisse donner mon avis, alors qu’il aurait été préférable, pour la pertinence même du rapport, avant sa publication, voire même avant son élaboration, qu’il comporte mes explications.», tenait à préciser Rafiq Haddaoui avant d’ajouter : «Ceci me paraît en contradiction avec les principes élémentaires de recherche de la vérité, car l’une des obligations d’une Commission d’enquête n’est-elle pas précisément d’interroger les personnes concernées et de n’émettre aucune conclusion à leur égard sans les avoir interrogées ?». Maintenant, devant le juge, il aura assurément l’occasion de démonter le bien-fondé de ses propos.

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