Economie

Douane : Un plan contre la sous-facturation

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Pour les industriels marocains, c’est un ouf de soulagement. Fin mars, au terme d’une rencontre avec des industriels et des exportateurs, l’Administration des Douanes et des Impôts indirects (ADII) a décidé enfin de lutter contre les importations massives et frauduleuses de certains produits. Un programme d’action sera publié dans les brefs délais, sur la base d’une liste des produits prioritaires, secteur par secteur. Des responsables de suivis, côté exportateurs, appuieront l’administration dans sa démarche.
Depuis deux ans, la plupart des produits importées massivement d’Asie affichent des prix plus bas que les coûts de leurs matières premières. Exemple éloquent, les articles de ménage en acier inoxydable : la valeur moyenne du prix au kilogrammes de ce produit fini importé est de 14 kilogramme d’après des chiffres fournis par les industriels sur la base de l’Office des Changes. Cela, alors qu’en moyenne, entre 2 000 et 2002, l’acier comme matière première a coûté entre 28 et 30 dirhams dans les places financières internationales.
Même en se plaçant dans le cas extrême où le coût de la main d’oeuvre est nul dans ces pays d’Asie, on ne peut arriver à un tel niveau de prix, déclare un membre de l’Asmex. Et d’ajouter: «Peut-être les articles fabriqués au Maroc ont des problèmes de productivité, peut-être il y a les coûts de facteurs qui n’est pas en leur faveur, mais derrière ces prix extrêmement bas, il y a la sous facturation qui joue les premiers rôles. Si cela se poursuit, c’est la fin de l’industrie marocaine».
Le phénomène prend de l’ampleur. Tous les secteurs de l’industrie légère sont touchés, les articles de ménage, les confiseries, l’habillement et même l’artisanat local qui subit les contrecoups de l’importation des produits en cuivre et en argent particulièrement bon marché.
En 2003, le secteur de l’agroalimentaire, traditionnellement pénalisé par des coûts élevés sur les intrants, impute une perte de 35% de son chiffre d’affaires à la sous-facturation. Cela représente une marge d’investissements supérieure à 10% et autant de richesses perdues. Pour Hakim Marrakchi, membre de l’Asmex, la faute est aussi due à l’évolution de la législation économique. «Les matières premières continuent de payer des droits de douanes élevés alors que, en vertu des accords signés avec nombre de pays, les produits importés à l’état fini payent de moins en moins à l’entrée».
Mais, admet-il, «ce n’est que la face cachée de l’iceberg, beaucoup de produits importés sont sous-facturés». Conséquence, la marge de négociations des industriels marocains auprès des centrales d’achats européens et à l’étranger s’amenuise. «Notre déficit de productivité sur le marché local libère des capacités à l’export. Mais à la longue, l’invasion des produits asiatiques n’incitera plus à l’investissement et par ricochet, posera un problème de survie pour l’industrie marocaine dans sa totalité». Il faut dire que la plupart de ces produits importés mis en cause proviennent des pays d’Asie, entre autres la Chine qui depuis deux ans monte en puissance au Maroc. «Nous n’avons pas peur de la Chine, déclare-t-on à l’Asmex. Mais encore faut-il que les importations entrent au Maroc de façon légale». Ce qui, selon les exportateurs, est de moins en moins le cas. La sous-facturation menace l’industrie et compromet le programme de mise à niveau.
«Normalement, déclare un exportateur d’articles ménagers, le différentiel correspondant au droit d’importation devrait nous permettre de nous mettre à niveau en trois ou quatre ans». Or, aujourd’hui, poursuit-il, «les importations sous-facturées ont ramenés ce différentiel à zéro». Souvent la facturation ne mentionne que 25% du prix réel. Par quels circuits les fournisseurs récupèrent-ils le reliquat ? Les industriels souhaitent en particulier que la douane passe à l’inspection automatique, devenue indispensable avec l’ouverture du marché et les règles de l’OMC. «Autrement, il y aura toujours possibilité de passer à travers les mailles du filet», avertit un opérateur. La mise en place «des prix d’alerte», sorte de seuil à partir duquel la surveillance est accrue n’a pas servi à résoudre le problème puisque ce système repose sur l’appréciation de l’agent chargé du contrôle.
Peut-être, comme le suggère M. Marrakchi, une meilleure surveillance des «importateurs à risque» ramènerait la fraude à un seuil plus acceptable. Encore faut-il, dans cette optique, que l’ADII trouve une définition pratique à cette notion.

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