Economie

Entretien : Doukkali : «je suis un pur produit des urnes»

© D.R

ALM : Pourquoi postulez-vous aujourd’hui pour la présidence de l’AFEM ?
Khadija Doukkali : Tout d’abord, je tiens à préciser que ma candidature ne résulte pas d’une initiative  personnelle. C‘est la volonté d’une large frange des  membres  fondateurs et des militants  de l’entrepreneuriat  féminin.  Aussi, après concertation, j’ai décidé de me présenter à la fois pour assurer la continuité, préserver les  acquis et inscrire notre  association  dans une nouvelle dynamique. Le Maroc connaît plusieurs  mutations dictées par une conjoncture économique mondiale  où la tendance est à l’ouverture. Il nous faut donc, au regard de ces mutations, de grands chantiers en cours et de l’évolution de notre économie, trouver les moyens de faire de l’entrepreneuriat féminin un facteur de développement à part entière.

Peut-on dire aujourd’hui que l’AFEM est assez représentative de l’entrepreneuriat féminin ?
Il faut dire que comme son nom l’indique, l’association  regroupe les femmes chefs d’entreprises et non les entreprises elles-mêmes. Nous comptons environ 300 membres. Ce qui, au vu de notre jeune âge et du nombre de femmes chefs d’entreprises (le Maroc en compte actuellement  2000, souvent dans le secteur des services) n’est pas un rien. Notre raison d’être c’est d’abord de militer pour l’entrepreneuriat féminin mais c’est surtout de mettre en place des mécanismes  pour accompagner les nouvelles créations d’entreprises. C’est pourquoi nous avons mis en place le premier incubateur d’entreprises à Casablanca. La ville de Fès devra suivre bientôt. Ces incubateurs aident les femmes dans la mise en place de leurs projets, les accompagnent  dans toutes leurs démarches avec l’administration, les  banques.

Quelle sera votre touche personnelle par rapport à l’ancienne équipe dirigeante de l’AFEM ?
Comme je l’ai dit, nous sommes pour la continuité. Au vu des efforts fournis et des résultats obtenus par le bureau actuel, il est opportun de s’appuyer d’abord sur les acquis  puis bien évidemment d’orienter nos actions en fonction de l’attente de nos membres.
Nous initierons plus d’actions pour les régions. C’est important d’impliquer toute personne, quelle que soit sa ville, dans nos actions. À l’international, nous étendrons nos missions de partenariat entre femmes d’affaires marocaines et celles des autres pays. L’échange d’expériences et la coopération, outre qu’il s’agit toujours d’un enrichissement, permettent de tisser des réseaux et de nouer des liens importants. D’ailleurs le «réseautage»  comme moyen d’améliorer sa compétitivité et sa réactivité par rapport au marché fait partie de nos impératifs. 

Quels sont aujourd’hui les problèmes spécifiques que rencontrent les femmes chefs d’entreprises. Sont-ils différents de ceux de leurs collègues masculins ?
À première vue, non. Un chef d’entreprise est soumis aux mêmes démarches vis-à-vis des principaux partenaires de l’entreprise. Mais quand on y regarde de plus près, il est facile de remarquer que les banques, par exemple, ne réservent pas le même traitement aux hommes qu’aux femmes. Pour le même profil, un entrepreneur a toujours plus de crédit aux yeux des banquiers qu’une femme. Peut-être, dira-t-on, c’est lié à la nature même des entreprises dirigées par des femmes. D’ailleurs, à l’occasion de différents colloques, il y a des banquiers qui se sont engagés à mettre en place  des cellules spéciales  pour le traitement des dossiers des femmes chefs d’entreprises. Pour le moment nous ne voyons rien venir.

Quelle lecture faites-vous de l’économie marocaine ?
Il y a de grands chantiers qui sont en cours, des évolutions qui sont constatées. Mais globalement, je dirai que l’entrepreneur n’est pas valorisé. Certains secteurs encore plus. Je prend l’exemple de la pêche maritime que je connais bien. Alors qu’il suffit qu’une usine de 50 personnes ferme à Casablanca pour qu’il y ait polémique; dans ce secteur, l’on assiste ces derniers mois à une série de fermetures. Nul ne s’en émeut.
Cet exemple est valable pour plusieurs secteurs. Je pense qu’il est temps d’aller vers l’entrepreneur, d’écouter ses doléances et de l’accompagner. Aujourd’hui, je dirais que le chef d’entreprise n’a pas le moral. D’ailleurs, à mon sens, l’un des premiers défis des futurs dirigeants de la CGEM sera de redonner le moral à notre tissu entrepreneurial.

Que pensez-vous justement de la candidature de Moulay Hafid Elalamy ?
Il y a de grandes attentes par rapport au futur président et à son équipe. Nous sommes face à plusieurs mutations, et nul que la CGEM ne connaît mieux les défis qui sont posés à l’entreprise. Il est important maintenant que les femmes chefs d’entreprises s’impliquent et aillent elles aussi militer à la CGEM. Jusqu’à présent, il y a une grande frilosité de mes consoeurs par rapport à la confédération patronale.
Or, pour se faire entendre, il faut militer dans les commissions  et dans tous les espaces  offerts par cette tribune. Ce n’est qu’à ce prix que la femme chef d’entreprise fera entendre sa voix.

En matière de militantisme, vous n’êtes pas à vos débuts ?
Toute modestie mise à part, je dirais que je suis un pur produit des urnes. Tout ce que j’ai obtenu jusqu’à présent à travers toutes les fédérations que compte notre secteur, c’est par le travail et le sacrifice. Avoir son entreprise, c’est une bonne chose, mais l’action militante et citoyenne est un complément indispensable. L’AFEM est une nouvelle étape dans ma vie de militante.

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