Le volume des fusions a battu tous les records depuis le début 2006, bouleversant le quotidien des salariés qui, s’ils ne sont pas licenciés, doivent s’adapter à une nouvelle culture d’entreprise lors de l’intégration des groupes. «C’est toujours un moment difficile à vivre.
Le boulot principal des gens pendant les trois à six mois après l’annonce, c’est de trouver leur prochain poste au sein de la nouvelle entité», raconte un cadre quinquagénaire souhaitant rester anonyme et qui a vécu plusieurs mariages dans les télécoms, dont celui de deux opérateurs français l’an passé.
Si officiellement les dirigeants affirment souvent que les fusions se font entre "égaux", c’est presque toujours une équipe de managers qui en mange une autre. Cette période entraîne donc des angoisses chez les salariés. «Des gens qui ne savent plus où ils en sont, vous en avez alors à la pelle», continue ce cadre, qui est parvenu à garder son poste. Pour préserver les sensibilités de chacun, certaines entreprises s’accommodent d’une direction bicéphale qui se retrouve parfois dans tout l’organigramme du groupe. Une solution rarement synonyme d’efficacité. Chez DaimlerChrysler, né de l’union d’un constructeur automobile allemand avec un américain, elle a été abandonnée au bout d’un an.
Chez le constructeur aéronautique européen EADS, où elle est le fruit d’un compromis politique ayant permis la création du groupe, elle semble conduire à bien des rivalités inutiles et faire obstacle à des prises de décision.
La période d’intégration, où tous les repères paraissent brouillés et où les salariés s’angoissent sur l’évolution de leur carrière, est par conséquent une période de conflits larvés. Et «un conflit qui n’est pas traité, c’est une capacité de décision de l’entreprise en moins. Il faut arriver à mobiliser les gens, à refabriquer une ambiance», estime Charles Gancel, qui dirige le cabinet de consultants Inter Cultural Management (ICM) à Paris.
• Céline LE PRIOUX (AFP)