Economie

Ibn Mansour : «Il y a des ajustements à faire»

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ALM : Sommes-nous au Maroc en présence d’une bulle spéculative dans l’immobilier ?
Youssef Ibn Mansour : Je dirai que le secteur est en pleine croissance. Le taux de propriétaires est passé de 45 à 60%. Il y a une dynamique assez soutenue, une spirale qui ne peut avoir que des répercussions sur l’offre et la demande. L’accompagnement de tout cela où le cadre institutionnel nécessite des ajustements, notamment au niveau du foncier. Du fait qu’il y a une forte demande, l’offre en terrains a été épuisée.

C’est le foncier qui explique donc la hausse des prix ?
Cela concerne surtout Casablanca. C’est une ville qui attire beaucoup de monde et qui séduit. D’où une pression importante sur le foncier. Cette tendance a été aggravée par le retard pris dans le renouvellement du schéma directeur. Tous ces éléments combinés font que nous sommes aujourd’hui à des niveaux de prix de foncier très élevés.

Avez-vous des données chiffrées sur l’évolution de ces prix du foncier ?
Il y a deux à trois ans, nous étions en moyenne à des niveaux de 300 à 400 dirhams le mètre carré. Aujourd’hui, nous sommes quasiment à 1 500 dirhams le mètre carré. Donc, le foncier destiné au logement social est aujourd’hui hors de prix. De l’autre côté, le coût de construction a augmenté de 15%. Aussi, en dehors des chantiers engagés il y a deux à trois ans, il devient de plus en plus difficile de proposer des logements économiques à 200 000 dirhams.

Autrement dit, il faut revoir ces prix de logement économique à la hausse ?
Absolument. Les promoteurs souhaitent voir ce prix passer à 300 000 dirhams. Peut-être, il faudra moduler cela  en fonction des régions. Il y a actuellement des villes où la valeur vénale de 200 000 dirhams est encore jouable.

Qu’en est-il des marges des promoteurs ?
Elles existaient au moment où les terrains étaient cédés à 300 dirhams. Maintenant les marges ont disparu, du fait du foncier et des coûts de construction et les prix n’ont pas bougés. Il y a un déséquilibre patent.

Au niveau de la Bourse, on ne sent pas sur les cours des entreprises immobilières notamment celui d’Addoha cette effervescence du secteur ?
Pour le cas particulier d’Addoha, c’est une valeur qui a épuisé son potentiel de croissance. Ce titre introduit à 585 dirhams a atteint quand même des niveaux très élevés, épuisant aujourd’hui son gisement de croissance. Quant à l’immobilier dans sa globalité, il représente 7% du PIB. Sachant que chaque point vaut 5 milliards, l’on peut évaluer facilement le poids du secteur dans l’économie marocaine.

Pensez-vous que la révision de la taxe sur le terrain ne puisse aider à résoudre le problème du foncier ?
Cette taxe existait, et n’a pas empêché le fait qu’il y ait eu toujours des terrains gelés au Maroc. S’il y a une chose à faire à ce niveau, c’est de revoir plutôt le coefficient de réévaluation du terrain en prenant en compte le temps resté dans la réserve et l’inflation. Cela inciterait les propriétaires de terrains à céder, sachant qu’ils pourront réaliser des plus-values conséquentes. Or, actuellement, il faut attendre 15 à 20 ans pour qu’un terrain acheté à 100 000 dirhams atteigne 200 000 dirhams.

Cette réévaluation ne comporte-t-elle pas plutôt un risque de spéculation ?
Au contraire. Car maintenant, les taxations sont telles que les gens préfèrent garder le terrain dans le portefeuille pour le valoriser au bout d’un certain nombre d’années. Les plus-values sur la cession des terrains sont taxées à raison de 20% (TPI intégré dans l’IR) pour les personnes physiques et de 35% pour les personnes morales. Il y a un problème d’équité. Cela n’est pas de nature à encourager la cession de terrains. Si les gens avaient la garantie de payer moins d’impôts, ils seront plus enclins à céder  leurs biens. Cela sachant que la nature des terrains gelés n’est pas la même. Il y a des surfaces gelées car comportant des équipements, d’autres appartenant à des institutions orientées vers la constitution de réserves foncières. Souvent des problèmes liés à l’héritage, aux statuts, entrent en ligne de compte. Compte tenu de toutes ces complexités, je pense qu’augmenter la taxe sur le terrain nu (nous avons d’ailleurs eu à l’expérimenter par le passé), ne résoudra pas le problème.

Quelle incidence des  contractions de l’immobilier à l’international (Espagne, USA) sur le Maroc ?
Au Maroc, le secteur immobilier est dans une phase de rattrapage par rapport aux prix pratiqués à l’international. Cela bien que les économies ne soient pas comparables. En Espagne, l’immobilier représente 30% du PIB, aux USA c’est quasiment une locomotive. Ce n’est pas encore le cas au Maroc. La décennie 90 n’a pas connu de croissance, ce qui a retardé le secteur. Actuellement, le réveil de l’immobilier est lié à la reprise générale. Reste à résoudre un problème : la gestion urbaine des villes. Il n’est pas facile de gérer des villes qui se sont developpées de manière désordonnée. L’Etat doit trouver une solution rapide à cela.

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