Economie

«Le Maroc doit être plus attractif»

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ALM : Comment se fait-il que le bureau du CIC soit aussi peu connu au Maroc ?
Mohamed Belhoucine : J’ai ouvert le bureau au Maroc depuis 17 ans. C’est un prolongement du groupe CM-CIC et dont le but est d’aider notre clientèle française quand elle veut vendre, acheter ou investir au Maroc. Nous comptons 36 bureaux de représentation dans les différents continents. Par exemple, pour la seule Chine, il y a trois représentants, basés à Pékin, Shanghai et Hong Kong. Au Maroc, nous sommes très connus dans la communauté des affaires. Nous avons d’ailleurs initié plusieurs partenariats mixtes de toutes sortes entre sociétés marocaines et sociétés françaises, clientes ou prospects de notre groupe à travers les filiales spécialisées de notre groupe.
Pourquoi donc cette discrétion par rapport aux médias ?
J’ai fini par devenir «banquier» avec toute la rigueur et la discrétion sur les projets initiés par nos amis français ou par nos compatriotes marocains.
Doit-on comprendre qu’à l’origine vous n’étiez pas banquier?
Absolument. J’ai commencé par une carrière industrielle dans des secteurs stratégiques comme le raffinage du pétrole. Mais aussi dans le maritime, dans l’agroalimentaire et dans l’agriculture. Je ne suis pas d’origine bourgeoise. Je suis issu d’une famille rurale et comme tous les ruraux quand je suis à la campagne en vacances, j’ai les yeux rivés vers le ciel pour voir si la pluie va tomber, en pensant à ma pauvre région. Ce réflexe que j’ai acquis tout jeune n’a pas changé, comme d’ailleurs la situation dans ces régions qui vivent depuis des décennies de l’auto-production, assumant comme elles peuvent la scolarité des enfants. Aujourd’hui encore, les infrastructures de base y font défaut, ce qui rend les investissements rares…
Vous êtes donc de quelle région? Et comment avez-vous pu échapper à votre destin de rural?
Je suis de la région berbère des Zemmours, laquelle commence à 25 kilomètres de Rabat. Ma région a donné les plus grands contestataires du Maroc et par la suite beaucoup de leaders politiques. Tous les grands partis berbères qui sont en train ou ont été créés sont en général issus de cette région. Né à Khemisset en 1940, je ne pouvais aller comme mes grands frères qu’au collège berbère d’Azrou alors qu’il existait un collège tout proche à Rabat mais réservé aux enfants de notables. Tout ceci n’a changé qu’avec l’Indépendance.
Quel est votre parcours professionnel?
J’ai fait la classe de mathématiques au collège Moulay Youssef à Rabat pour les classes préparatoires d’Ecole d’Ingénieurs en France. Puis, j’ai intégré l’Ecole normale supérieure des industries chimiques à Nancy pendant et par la suite, l’Institut français des pétroles pour un DESS Finances et Commerce extérieur. Concernant mon parcours, même si j’ai travaillé à la Samir (qui n’est pas une administration à part entière), j’ai passé la plus grande partie de ma carrière dans le privé où j’ai occupé des postes de Directeur général ou de Président délégué.
Après avoir assisté au colloque de la Lyonnaise des Banques devant 1700 personnes, pouvez-nous dire ce que vous faites en tant que représentant du groupe CM-CIC au Maroc ?
Je rends service à mon pays et à mon groupe et je rapproche en permanence des décideurs privés français et marocains. Dans le privé, il s’agit de faire connaître le Maroc à des promoteurs français qu’ils soient acheteurs, vendeurs ou investisseurs. Dans le domaine de l’investissement, on intervient depuis 17 ans comme Centre national d’investissement (CNI au lieu de CRI). Nous avons accompagné en tant que consultant nos clients pour des implantations au Maroc. Très souvent, c’est à la suite de nos entretiens avec nos clients que ceux-ci découvrent le Maroc dans toutes ses potentialités et qu’ils découvrent l’étendue des besoins, les conventions fiscales, les avantages comparatifs et qu’ils s’acheminent vers leurs projets concrets et ciblés.
Quels sont les investissements les plus fréquemment demandés sur le Maroc?
Nous avons été amenés depuis 17 ans au Maroc à toucher tous les secteurs. Il est clair que les délocalisations viennent en tête des investissements depuis quelques années. Mais il y a aussi les demandes de partenariats avec des sociétés marocaines qui constituent aussi une bonne partie de nos interventions. S’agissant des délocalisations, je ne fais que répéter que le premier besoin pour une délocalisation est la recherche de coûts comparatifs pour installer un centre de production au Maroc, mais aussi le meilleur endroit géographique de localisation. La délocalisation est un oxygène pour des entreprises étrangères écrasées dans leur pays d’origine, et qui veulent rester compétitives. Les partenariats nouveaux concernent des sociétés marocaines, ayant vécu à l’ombre des protections qui doivent disparaître à l’horizon 2012, date où les produits européens entreront sans droits de douane au Maroc. Ces entreprises ont un énorme besoin de se mettre à niveau.
Que pensez-vous de l’économie marocaine. Est-elle compétitive?
D’abord je veux que notre pays reste en marge, comme arrière-pays de l’Europe pour pouvoir encore accueillir plusieurs délocalisations pour ses avantages comparatifs. Ainsi, nous produirons plus d’emplois et partant, de la consommation, et en retour, plus d’attractivité envers les investisseurs. Que l’Europe soit à 25 ou 27 pays, il ne faut pas s’affoler.
Dans l’Union européenne, les convergences imposées devront imposer au nouveau pays, finalement, les mêmes salaires, les mêmes fiscalités.
On verra peut-être un jour des Polonais ou des Hongrois délocaliser au Maroc ou vers la Méditerranée Sud comme autrefois l’Espagne et le Portugal. Il appartient donc au Maroc d’anticiper le phénomène et d’accentuer dans le temps la réalisation de toutes les infrastructures de base dans tout le pays, afin que chaque région puisse bénéficier du flux d’investissements, actuellement concentrés seulement sur Casablanca.
Le niveau de l’éducation, de l’habitat et de la santé est important pour les investisseurs qui veulent avant tout une stabilité politique.

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