Economie

Le textile marocain veut un SMIG régional

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L’industrie textile marocaine est condamnée à s’adapter au nouvel ordre économique mondial imposé au secteur. « Dans l’ancien système, tout était simple, explique Karim Tazi, le président de l’AMITH, les pays du Nord de la Méditerranée s’étaient spécialisés dans la confection des tissus, lesquels sont transférés au Sud, au Maroc par exemple, pour y être façonnés, puis réintroduits en Europe, avec des droits de douane réduits ». Un schéma bien huilé sur lequel s’est endormi, depuis les années 70, le secteur textile marocain.
La date du 1er janvier 2005 qui sonne le réveil est venue donc balayer tout un système. Mais, reconnaît l’AMITH, les difficultés ont commencé bien avant. L’entrée des pays de l’EST dans le jeu (Roumanie, Bulgarie), dotés d’un niveau de qualification meilleur, et d’un coût salarial plus bas que le Maroc, avait déjà sonné une première alerte il y a quatre ans. Le concept se radicalise aujourd’hui avec l’Inde et la Chine. Une nouvelle division du travail est ainsi née.
Les premières commandes des donneurs d’ordres sont envoyées en Asie et le réassort dans les pays proches. «Dans l’ancien contexte, on pouvait se permettre d’être de simples façonniers. Aujourd’hui, cela ne suffit plus », estime M. Tazi, pour qui seul ce métier de façonnier (surtout quand il n’est pas réactif) est en péril. « Le Maroc, poursuit-il, n’a ni la réactivité de la Roumanie (plus proche de l’Europe), ni le niveau de qualification de la Turquie, ni la disponibilité de l’administration tunisienne». C’est de là que doit s’installer la future stratégie.
En attendant ce programme promis d’ici fin février, force est de constater (du moins c’est le point de vue de l’AMITH) que tout n’est pas perdu. Il y a des branches d’activités, qui peuvent encore tirer leur épingle du jeu. « Chine ou pas, s’exclame un industriel, certaines activités, comme les jeans n’ont rien à craindre de la concurrence chinoise». D’autant que, le nouvel environnement économique n’offre pas que des avantages.
Par exemple, les industriels marocains peuvent toujours rattraper des points de compétitivité en exploitant les avantages offerts par l’ALE signé avec la Turquie. « En façonnant les tissus en provenance de la Turquie, explique un membre de l’AMITH, nos produits sont introduits en Europe exemptés, des 13% de droits de douane qu’ils auraient payés si la matière première provenait hors de l’Euromed. ». L’accord signé avec la Turquie est donc loin de représenter un danger pour le secteur.
Mais la survie devra venir de l’intérieur du Maroc. La réponse qu’apportera le gouvernement aux doléances du secteur est très attendue par les opérateurs. Ceux-ci, pour une fois, se veulent modérés. Plus d’attaques directes contre le SMIG, mais les pontes de l’AMITH mettent en épingle les exemples d’un pays comme le Bangladesh, où le salaire minimum a été supprimé. Bien entendu, les industriels ne veulent pas en venir là au Maroc, mais aimeraient l’instauration d’un « SMIG régional ». La question a été évoquée devant le Premier ministre. « C’est une formule largement pratiquée, l’adopter c’est simplement sortir d’une hypocrisie», fait remarquer un opérateur pour qui, « appliquer à Guercif le même SMIG qu’à Casablanca, quand on sait la différence de niveau de vie entre ces deux lieux, c’est pousser les habitants de la petite bourgade dans les radeaux de Gibraltar». Les autres revendications ont trait à la douane. l’AMITH préfère une substitution de la protection non tarifaire à la vieille protection tarifaire qui, dans l’ancien ordre, était destinée à protéger l’industrie locale. «Pour gagner des points sur la compétitivité à l’export, il faut une réduction des droits de douane sur les fournitures et accessoires ». La mise en place des plates-formes d’exportation pourrait aussi sauver beaucoup d’usines, à l’exemple du groupe Décathlon qui tire, à lui seul, 70 a 100 façonniers.
Le partenariat AMITH- Gouvernement trouve sa raison d’être dans la sauvegarde d’emploi, critère qui servira d’arbitrage entre les décisions des uns et des autres. Aussi, dans cette optique, un business plan sera mis en place pour le maintien des entreprises en difficultés. A signaler que le Premier ministre s’oppose déjà à la baisse de 50% des charges de la CNSS, mais reste ouvert à toutes les autres demandes comme la remise à zéro des comptes dans le cadre du régime économiques en douane. En tout cas, la transition du façonnier au fabricant de produit fini demande non seulement du talent mais aussi de l’argent. Reste où le trouver.

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