Economie

Les génériques de guerre

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Chacun sa vérité. C’est le moins que l’on puisse désormais dire concernant le débat aussi complexe autour de l’Accord de libre-échange prévu entre le Maroc et les Etats-Unis dans son volet relatif aux médicaments. Si certains y sont favorables et en louent les mérites, d’autres sonnent d’ores et déjà l’alarme et crient à la rétention de l’information.
Entre les deux, le torchon brûle bel et bien. Lors de la session des questions orales à la 2ème Chambre, tenue le 27 janvier, le ministre délégué aux Affaires étrangères, Taïb Fassi Fihri, a affirmé que cet accord s’inscrit dans le cadre « des efforts déployés par le Maroc visant à intégrer l’économie nationale dans l’environnement régional et international, accompagner le processus de la mondialisation, diversifier les partenariats économiques et à attirer les investissements étrangers ». Mais ce n’est pas tout. Lors de cette même intervention, le ministre aurait également reconnu que les mesures de protection de la propriété intellectuelle concernant les médicaments ne se limitent pas aux accords ADPIC sur lesquels le Maroc s’était déjà engagé à l’OMC, mais comportent, en plus, des mesures encore plus restrictives notamment une durée supplémentaire de protection des données confidentielles pour une période de 5 ans, et la prolongation de la protection des brevets pour une durée de 3 ans, en cas de nouvelles indications. Voilà qui vient contredire la version officielle, selon laquelle il ne s’agissait dans l’accord de libre-échange que de tenir les engagements marocains à l’OMC. Pour l’ALCS, qui a relayé cette information, « Les mesures de protections supplémentaires contenues dans l’ALE ne figurent pas dans les accords précités. Aucun engagement international n’impose au Maroc de les accepter ». Ces mesures sont en totale contradiction avec la déclaration de l’OMC à Doha et selon laquelle l’accord ADPIC « devrait être interprété et mis en oeuvre d’une manière qui appuie les droits des membres de l’OMC de protéger la santé publique et, en particulier, de promouvoir l’accès de tous les médicaments ».
Pour le ministère de la Santé, dont 90% du total des achats en matière de médicaments, 500 millions de DH, sont des génériques, le Maroc n’a fait que donner suite aux accords ADPIC dont il est signataire. Mais, citant des sources américaines, l’association Act-Up, solidaire de l’ALCS affirme qu’il est établi que ces dispositions ne figurent pas dans les accords ADPIC de l’OMC. La mouture de l’accord issue du 6ème cycle de négociations qui a eu lieu en décembre 2003 comporte un certain nombre de dispositions dont l’effet peut entraver la production et la commercialisation des génériques au Maroc. Ces dispositions, que l’on retrouve dans d’autres accords négociés entre les États-Unis et des pays en développement, concernent, notamment, la possibilité de rallonger la durée de protection par un brevet au-delà des 20 ans requis par l’OMC et la possibilité d’obtenir un nouveau brevet d’une durée de 20 ans pour un produit déjà commercialisé. Les conditions d’enregistrement des médicaments octroient aux premières compagnies enregistrant leur produit une « exclusivité des données » auprès de la direction nationale de la pharmacie, ce qui aura pour effet de maintenir un monopole pour une durée de 5 ans. Contrairement à ce que laissent entendre les responsables marocains.
Pour l’heure, rien n’est encore perdu pour le Maroc. Les accords ADPIC n’entreront en vigueur qu’en 2006. Sur les 324 nouveaux produits enregistrés cette année, 70% sont des génériques.

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