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Nurcan Bicakci Arcan : «À ce stade, le mot clé est la flexibilité»

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Entretien avec Nurcan Bicakci Arcan, directrice marketing région CEMEA, SAS

La pandémie de Covid-19 a repoussé les limites du progrès technologique. Elle a accéléré les tendances poussant les entreprises et les Etats à repenser l’organisation du monde de demain. Ainsi, l’intelligence artificielle (IA) et la donnée numérique feront partie intégrante de notre quotidien post-Covid-19. Pour y voir plus clair, Nurcan Bicakci Arcan nous livre son analyse.

ALM : La technologie est au cœur de votre métier, quelles sont les principales tendances qui ont évolué durant la période de la Covid-19 dans la région CEMEA ?

Nurcan Bicakci Arcan : La pandémie a changé notre façon de travailler, d’interagir avec nos clients et d’aborder les défis commerciaux. Tout s’est accéléré considérablement. Au cours des six derniers mois, nous avons assisté à un développement vertigineux de la transformation digitale. Les stratégies numériques qui avaient été planifiées sur des phases de trois ans ont été accélérées durant quelques semaines. Et cela s’est produit dans différentes industries.
Les institutions financières ont rapidement migré leurs canaux physiques vers le numérique. Les prestataires de soins de santé ont basculé vers la télésanté, les prestataires d’assurances vers l’évaluation et le remboursement en libre-service, et les détaillants vers des services d’achats et de livraisons sans contact. À ce stade, le mot clé est «flexibilité». Nous avons vu les modèles historiques devenir obsolètes du jour au lendemain et ceux qui disposaient de systèmes et de processus flexibles et adaptables ont pu opérer leur transition beaucoup mieux que les autres. L’histoire nous montre qu’en temps de crise, l’humanité produit ses meilleures idées et innovations. Les entreprises ne sont pas exemptes de cette règle. Soit elles apprennent, s’adaptent et innovent tout en prenant des décisions difficiles et audacieuses, soit elles sont vouées à disparaître.
Tout au long de cette période, SAS et ses partenaires ont travaillé main dans la main avec leurs clients. Nous leur avons permis de réagir à ces changements en construisant une mémoire organisée qui permet de conserver les apprentissages de l’improvisation et de l’expérimentation que cette période a mises en lumière.

Dans quelle direction nous mène le progrès technologique, notamment durant la période post-Covid-19 ?

La crise a donné un aperçu de notre avenir où le numérique devient central à chaque interaction. Nous constatons déjà de grands changements dans les comportements des consommateurs, et ces changements resteront d’actualité à l’avenir.
Nous avons mené une recherche à l’échelle de la zone EMEA (Europe, Middle East and Africa) qui montre que la Covid-19 a renforcé l’importance de l’expérience client dans les habitudes d’achat des consommateurs. La qualité de l’expérience client reste un facteur d’achat influent, 61% des clients étant prêts à dépenser davantage pour des marques qui ont offert une bonne expérience client pendant la pandémie. Un tiers des clients ont même déclaré qu’ils abandonneraient les marques avec qui ils avaient eu une seule mauvaise expérience.
Plus important encore, 70% des nouveaux clients numériques prévoient de continuer à utiliser les services numériques après le déconfinement. Ce n’est pas qu’une tendance passagère. Les entreprises doivent s’adapter, offrir une expérience hyper personnalisée, ce qui signifie des offres sur mesure et en temps réel sur tous les supports. Les entreprises doivent comprendre le comportement des clients pour créer des expériences qui leur sont uniques sur les différentes étapes du circuit de consommation. Les entreprises doivent s’adapter, devenir analytiques pour être capables de rester compétitives dans ce jeu de marché en constante évolution.

Comment la science de la donnée peut-elle être un outil d’aide à la prise de décision ?

Il y a près de dix ans, la revue d’affaires de Harvard a qualifié la science des données de «métier le plus sexy du 21e siècle». C’était bien prévisible, car l’intérêt pour la science des données n’a cessé de croître et des millions de professionnels sont entrés dans ce domaine. Et ce, pour une bonne raison. À mesure que les entreprises adoptent l’analyse et que la transformation numérique s’accélère, elles deviennent une pièce importante du puzzle.
Mais les données en elles-mêmes ne sont qu’un potentiel. C’est l’intuition analytique et les décisions qui en découlent qui apportent de la valeur aux entreprises.
Nous devons garder à l’esprit que la science des données n’est plus un environnement strictement scientifique. Les compétences techniques, telles que la programmation ou les statistiques, sont toujours importantes. Mais il est tout aussi crucial, sinon plus, que les spécialistes de la science des données passent couramment du langage des données au langage des affaires. Briser les cloisonnements à l’intérieur des entreprises est un prérequis indispensable pour transiter vers une organisation fondée sur les données et prendre des décisions basées sur des analyses. Les analystes doivent réussir à faire le pont avec la direction et établir une communication de haute qualité au sein de l’entreprise. Chez SAS, une telle approche intégrée est au cœur même du développement de la science des données.

L’intelligence artificielle façonnera désormais le futur de nos sociétés. Comment SAS compte-t-elle accompagner cette évolution ?

Nous avons participé à l’évolution de l’IA depuis ses débuts. SAS a commencé son histoire il y a 45 ans à l’Université d’État de Caroline du Nord. La technologie créée pour améliorer le rendement des cultures a évolué pour devenir un logiciel d’analyse de données sophistiquées, précurseur de l’IA moderne.
Et elle a changé la donne pour la société. Au début, les logiciels d’analyse étaient utilisés pour des expériences bien ciblées. Aujourd’hui, nous sommes passés à la prévision. Les réseaux neuronaux, qui imitent le fonctionnement du cerveau humain, et d’autres outils d’apprentissage automatique sont utilisés pour faire diverses prévisions dans différents secteurs. Aujourd’hui, tous les secteurs d’activité y ont recours. Ainsi, la vision par ordinateur fait une différence dans les soins de santé, elle est utilisée pour interpréter les scanners à l’échelle. Par exemple, la SAS collabore avec l’Université d’Amsterdam pour déterminer plus précisément la taille des tumeurs chez les patients atteints de cancer. Je n’hésiterais pas à dire que le SAS soutient l’évolution de l’IA depuis près d’un demi-siècle maintenant.

Quels sont les projets sur lesquels vous travaillez actuellement, en particulier ceux destinés aux entreprises marocaines ?

Nous avons récemment conclu un projet d’intelligence artificielle pour détecter la fraude à l’assurance avec Saham Insurance. C’est important car le nombre de demandes d’assurance a fortement augmenté au Maroc, avec un taux de fraude estimé à près de 1 sur 5. Saham Insurance est la première compagnie d’assurance au Maroc à utiliser l’intelligence artificielle pour lutter contre la fraude.
La coopération avec les universités est également un sujet qui nous tient à cœur, car SAS est fortement ancrée dans le monde universitaire. Au Maroc, nous travaillons en partenariat avec des universités pour préparer les ressources avec les compétences appropriées pour le marché. Cette année, nous avons établi un partenariat avec l’Université Moulay Ismail, et nous suivons le même processus avec l’INPT à Rabat et l’Université Cadi Ayyad à Marrakech. Nous espérons étendre encore ce réseau et contribuer à combler le déficit de compétences qui reste une des faiblesses principales dans le monde entier.

 

 

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